Quels sont les grands enjeux du théâtre contemporain des Premiers Peuples et du rapport complexe et nécessairement politique qu’il entretient avec son public, largement non autochtone? Bref résumé de la pensée originale de Naomi Fontaine, de la nation innue, de Dylan Robinson, de la nation stó:lõ, et de Jill Carter, de la nation anishinaabe, qui se penchent sur les fondements de cette rencontre.
Shuni, publié en 2019, est une longue lettre que Naomi Fontaine adresse à son amie Julie (Shuni en innu-aimun), qui s’apprête à revenir à Mani-utenam à titre de missionnaire. L’autrice lui explique avec une tendresse teintée de lassitude ce qu’elle doit savoir en tant que Non-Autochtone. Les Innus n’ont ni besoin d’être sauvés ni qu’on parle en leur nom, et ils ne se résument pas à une série de statistiques défaitistes. Elle ajoute que, si Shuni veut vraiment aider la communauté, elle commencera par l’écouter en toute conscience qu’on ne peut jamais tout savoir d’une culture qui n’est pas la nôtre. Shuni constatera peut-être alors que les Innus n’ont pas besoin d’elle autant qu’elle a besoin d’eux. « Je sais que l’intention est bonne », écrit Fontaine de ceux et celles qui, comme Shuni, s’aventurent chez l’autre avec le désir d’aider, « […] mais je sais aussi que ce n’est pas suffisant. » (Naomi Fontaine, Shuni : Ce que tu dois savoir, Julie, Montréal, Mémoire d’encrier, 2019, p. 11.)
Cette lettre à Shuni aurait été porteuse pendant l’été 2018 alors que la controverse autour du spectacle Kanata, que préparait Robert Lepage pour le Théâtre du Soleil, faisait rage. L’écoute était rare au moment où la sphère publique québécoise défendait les bonnes intentions du metteur en scène, oubliant, comme le souligne Fontaine, qu’elles ne suffisent pas à elles seules à rendre un projet valable. Parler des Autochtones n’équivaut pas à parler avec eux. Pour défaire la longue histoire de colonisation, de mépris et de méconnaissance des Premiers Peuples, il faudra du temps, mais également que la majorité, au Québec, accepte d’écouter et de remettre en cause son propre discours identitaire, où la marginalisation passée des Québécois·es occupe souvent toute la place. En définitive, si Kanata nous a appris une chose, c’est qu’afin de traverser le vaste fossé colonial qui sépare toujours les Autochtones des peuples colonisateurs du Canada (dont font partie les Québécois·es, quoi qu’ils et elles en disent), il nous faudra trouver ensemble de nouvelles façons de faire.
Shuni jette les bases de ce nouveau programme. Car, à travers son amie, c’est bien sûr à nous, les Non-Autochtones, que Fontaine s’adresse, inscrivant sa réflexion dans un courant plus large, nourri par une nouvelle génération d’auteurs et d’autrices autochtones au Québec et, de façon plus marquée, au Canada anglophone, pour qui la question de la décolonisation est centrale. Bien que certaines de ces voix d’expression anglaise commencent à être traduites au Québec, elles restent toujours marginales. Si elles avaient été disponibles en 2018, que nous auraient-elles appris sur les enjeux dont Kanata était momentanément devenu le symbole, soit la décolonisation des relations et le rôle que le théâtre peut y jouer ? Nous proposons ici un bref aperçu des travaux de Dylan Robinson et de Jill Carter, deux artistes et universitaires dont les réflexions éclairantes sont en lien avec ces questions.
Vers le début d’une vraie rencontre
Partant de l’idée que le théâtre est à la fois un lieu de réinvention et, paradoxalement, un véhicule par lequel les discours dominants sont normalisés, Robinson et Carter examinent, d’une part, comment les artistes autochtones contemporains investissent cet espace pour exprimer une forme de souveraineté et, d’autre part, comment ces gestes d’autoreprésentation sont reçus par un public largement non autochtone. Dylan Robinson nous rappelle que, pour la plupart des Premiers Peuples, le théâtre, la danse et les arts en général ont toujours eu plusieurs fonctions, servant autant de pratique diplomatique et de nourriture pour les sens que de mode de transmission de la mémoire et de connaissances du territoire. Cela explique en partie que les autorités coloniales se soient empressées de bannir ces chants, danses ou colliers de wampum qui représentaient les archives d’une communauté et le patrimoine lui permettant de se projeter dans le futur. La Loi sur les Indiens a criminalisé ces pratiques jusqu’en 1951, mais les communautés ont toujours continué à transmettre ce patrimoine, même fragmenté, auquel s’abreuve aujourd’hui la relève. En parallèle, les Premières Nations se sont vues représentées sur les scènes commerciales par le biais de récits souvent racistes et paternalistes, mis de l’avant unilatéralement par des Non-Autochtones. Du coup, ces personnages réducteurs, soit passifs et tragiques, soit nobles guerriers, ont longtemps fait figure de vérité dans la sphère publique allochtone. Depuis 35 ans, les artistes autochtones cherchent à défaire ces perceptions, mais l’asymétrie des pouvoirs et de l’accès aux ressources rendent toujours la tâche difficile.
Cela dit, il importe, selon Robinson, de développer un vocabulaire critique capable de saisir les enjeux du théâtre autochtone, forcément politique, qui a d’abord cherché à s’affranchir des stéréotypes, mais qui ne tient plus nécessairement à se justifier ou à s’expliquer à un public non autochtone. Robinson voit dans le théâtre contemporain des Premiers Peuples une continuation des pratiques traditionnelles criminalisées par la Loi sur les Indiens. Il note que ce théâtre sert de lieu de transmission des savoirs, de mise en scène de conceptions du monde et d’affirmation d’une forme de souveraineté que Robinson relie au corps, au ressenti, aux sens. (Dylan Robinson, « Welcoming Sovereignty » dans Performing Indigeneity, New Essays on Canadian Theatre Vol. VI, édité par Yvette Nolan et Ric Knowles, Playwrigths Canada Press, 2016, p. 5-32.) Robinson décloisonne en effet le concept de souveraineté pour y inclure des formes d’autodétermination qui, tout en s’inscrivant dans un territoire donné, dépassent les paramètres strictement juridiques de la souveraineté telle que définie dans la tradition eurocentrique. Il s’agit là, selon lui, d’une pratique résistante qui reconnaît que la souveraineté autochtone, après des siècles de dépossession territoriale, ne se limite plus à l’occupation d’un lieu (bien que ce lien soit profondément important), et comprend désormais un ensemble de pratiques visant à réoccuper des espaces tant physiques que symboliques dont les Premiers Peuples ont été dépossédés, y réaffirmant une présence, une histoire, un futur, des relations, etc. Se raconter au théâtre, se mettre en scène en ses propres termes devient alors un geste souverain.
Quand Naomi Fontaine suggère à Shuni qu’elle a peut-être davantage besoin des Innus qu’eux d’elle, elle touche à un enjeu de fond pour Robinson et Carter, qui s’inquiètent du rôle accessoire que joue trop souvent encore la figure de l’Autochtone tragique sur la scène théâtrale. Carter note que la mise en scène d’une réelle détresse autochtone est une arme à deux tranchants : d’un côté, il faut que les artistes puissent se raconter sur scène et nommer ce qui les habite, il en va de la santé de la communauté ; d’un autre côté, Carter remarque que cette souffrance est devenue instrumentalisée, une sorte de commodité théâtrale qui garantit la catharsis du public sans nécessairement provoquer de changements de fond, ou d’actions tangibles hors de l’espace théâtral. (Jill Carter, « Discarding Sympathy, Disrupting Catharsis: The Mortification of Indigenous Flesh as Survivance-Intervention », Theatre Journal, vol. 67, no 3, octobre 2015, p. 413-432.) La catharsis, selon Aristote, est ce procédé par lequel les spectateurs et les spectatrices se libèrent d’émotions négatives en éprouvant de la pitié ou de la terreur pour ce qui se passe sur scène. C’est une libération par procuration. Carter demande : que vaut cette libération au théâtre si elle passe par la consommation par le groupe dominant du malheur de ceux et celles qu’il marginalise ? Elle note que ce processus reproduit la même logique qui organise la société coloniale qui est la nôtre, c’est-à-dire l’appropriation et la consommation de tout ce qui est autochtone – territoires, ressources, mais aussi le spectacle de la souffrance des Premiers Peuples. Dans ce contexte, la catharsis ne fait peut-être que dédouaner le public allochtone qui, s’étant senti outré, ou choqué, ou ému par une souffrance qu’il voit comme extérieure à lui-même (plutôt que comme le résultat d’une relation de pouvoir asymétrique dont il est partie prenante), rentrera à la maison, convaincu d’en avoir fait assez, ou d’être du bon bord de l’histoire.
Le théâtre des Premiers Peuples au Canada est riche, et il s’y développe depuis plus de 35 ans un vocabulaire unique, que la metteure en scène métisse Yvette Nolan appelle « une médecine » de l’âme, du corps et des communautés. Au Québec, la compagnie Ondinnok célèbre ses 35 ans en 2020, et une relève inspirée est en place. Au Canada anglais, il existe un plus grand nombre de compagnies autochtones et une présence institutionnelle qu’on ne retrouve pas encore au Québec. On compte, par exemple, des lieux de formation et de création, des résidences menées par et pour des Autochtones, et des programmes universitaires où une relève, dont font partie Robinson et Carter, étudie et met en contexte ce travail foisonnant. Ce théâtre choisit de plus en plus de se refuser au type de relation cathartique avec un public non autochtone, tel qu’examiné par Carter, et exprime plutôt, selon Robinson, une forme de souveraineté, en affirmant que l’histoire, la souffrance et les savoirs des Premières Nations ne sont pas objets de consommation ou de curiosité. Ce théâtre se base sur la reconnaissance, comme le rappelle Fontaine, qu’on ne peut pas tout savoir de l’autre et que cette prise de conscience marque le début d’une vraie rencontre.
Quels sont les grands enjeux du théâtre contemporain des Premiers Peuples et du rapport complexe et nécessairement politique qu’il entretient avec son public, largement non autochtone? Bref résumé de la pensée originale de Naomi Fontaine, de la nation innue, de Dylan Robinson, de la nation stó:lõ, et de Jill Carter, de la nation anishinaabe, qui se penchent sur les fondements de cette rencontre.
Shuni, publié en 2019, est une longue lettre que Naomi Fontaine adresse à son amie Julie (Shuni en innu-aimun), qui s’apprête à revenir à Mani-utenam à titre de missionnaire. L’autrice lui explique avec une tendresse teintée de lassitude ce qu’elle doit savoir en tant que Non-Autochtone. Les Innus n’ont ni besoin d’être sauvés ni qu’on parle en leur nom, et ils ne se résument pas à une série de statistiques défaitistes. Elle ajoute que, si Shuni veut vraiment aider la communauté, elle commencera par l’écouter en toute conscience qu’on ne peut jamais tout savoir d’une culture qui n’est pas la nôtre. Shuni constatera peut-être alors que les Innus n’ont pas besoin d’elle autant qu’elle a besoin d’eux. « Je sais que l’intention est bonne », écrit Fontaine de ceux et celles qui, comme Shuni, s’aventurent chez l’autre avec le désir d’aider, « […] mais je sais aussi que ce n’est pas suffisant. » (Naomi Fontaine, Shuni : Ce que tu dois savoir, Julie, Montréal, Mémoire d’encrier, 2019, p. 11.)
Cette lettre à Shuni aurait été porteuse pendant l’été 2018 alors que la controverse autour du spectacle Kanata, que préparait Robert Lepage pour le Théâtre du Soleil, faisait rage. L’écoute était rare au moment où la sphère publique québécoise défendait les bonnes intentions du metteur en scène, oubliant, comme le souligne Fontaine, qu’elles ne suffisent pas à elles seules à rendre un projet valable. Parler des Autochtones n’équivaut pas à parler avec eux. Pour défaire la longue histoire de colonisation, de mépris et de méconnaissance des Premiers Peuples, il faudra du temps, mais également que la majorité, au Québec, accepte d’écouter et de remettre en cause son propre discours identitaire, où la marginalisation passée des Québécois·es occupe souvent toute la place. En définitive, si Kanata nous a appris une chose, c’est qu’afin de traverser le vaste fossé colonial qui sépare toujours les Autochtones des peuples colonisateurs du Canada (dont font partie les Québécois·es, quoi qu’ils et elles en disent), il nous faudra trouver ensemble de nouvelles façons de faire.
Shuni jette les bases de ce nouveau programme. Car, à travers son amie, c’est bien sûr à nous, les Non-Autochtones, que Fontaine s’adresse, inscrivant sa réflexion dans un courant plus large, nourri par une nouvelle génération d’auteurs et d’autrices autochtones au Québec et, de façon plus marquée, au Canada anglophone, pour qui la question de la décolonisation est centrale. Bien que certaines de ces voix d’expression anglaise commencent à être traduites au Québec, elles restent toujours marginales. Si elles avaient été disponibles en 2018, que nous auraient-elles appris sur les enjeux dont Kanata était momentanément devenu le symbole, soit la décolonisation des relations et le rôle que le théâtre peut y jouer ? Nous proposons ici un bref aperçu des travaux de Dylan Robinson et de Jill Carter, deux artistes et universitaires dont les réflexions éclairantes sont en lien avec ces questions.
Vers le début d’une vraie rencontre
Partant de l’idée que le théâtre est à la fois un lieu de réinvention et, paradoxalement, un véhicule par lequel les discours dominants sont normalisés, Robinson et Carter examinent, d’une part, comment les artistes autochtones contemporains investissent cet espace pour exprimer une forme de souveraineté et, d’autre part, comment ces gestes d’autoreprésentation sont reçus par un public largement non autochtone. Dylan Robinson nous rappelle que, pour la plupart des Premiers Peuples, le théâtre, la danse et les arts en général ont toujours eu plusieurs fonctions, servant autant de pratique diplomatique et de nourriture pour les sens que de mode de transmission de la mémoire et de connaissances du territoire. Cela explique en partie que les autorités coloniales se soient empressées de bannir ces chants, danses ou colliers de wampum qui représentaient les archives d’une communauté et le patrimoine lui permettant de se projeter dans le futur. La Loi sur les Indiens a criminalisé ces pratiques jusqu’en 1951, mais les communautés ont toujours continué à transmettre ce patrimoine, même fragmenté, auquel s’abreuve aujourd’hui la relève. En parallèle, les Premières Nations se sont vues représentées sur les scènes commerciales par le biais de récits souvent racistes et paternalistes, mis de l’avant unilatéralement par des Non-Autochtones. Du coup, ces personnages réducteurs, soit passifs et tragiques, soit nobles guerriers, ont longtemps fait figure de vérité dans la sphère publique allochtone. Depuis 35 ans, les artistes autochtones cherchent à défaire ces perceptions, mais l’asymétrie des pouvoirs et de l’accès aux ressources rendent toujours la tâche difficile.
Cela dit, il importe, selon Robinson, de développer un vocabulaire critique capable de saisir les enjeux du théâtre autochtone, forcément politique, qui a d’abord cherché à s’affranchir des stéréotypes, mais qui ne tient plus nécessairement à se justifier ou à s’expliquer à un public non autochtone. Robinson voit dans le théâtre contemporain des Premiers Peuples une continuation des pratiques traditionnelles criminalisées par la Loi sur les Indiens. Il note que ce théâtre sert de lieu de transmission des savoirs, de mise en scène de conceptions du monde et d’affirmation d’une forme de souveraineté que Robinson relie au corps, au ressenti, aux sens. (Dylan Robinson, « Welcoming Sovereignty » dans Performing Indigeneity, New Essays on Canadian Theatre Vol. VI, édité par Yvette Nolan et Ric Knowles, Playwrigths Canada Press, 2016, p. 5-32.) Robinson décloisonne en effet le concept de souveraineté pour y inclure des formes d’autodétermination qui, tout en s’inscrivant dans un territoire donné, dépassent les paramètres strictement juridiques de la souveraineté telle que définie dans la tradition eurocentrique. Il s’agit là, selon lui, d’une pratique résistante qui reconnaît que la souveraineté autochtone, après des siècles de dépossession territoriale, ne se limite plus à l’occupation d’un lieu (bien que ce lien soit profondément important), et comprend désormais un ensemble de pratiques visant à réoccuper des espaces tant physiques que symboliques dont les Premiers Peuples ont été dépossédés, y réaffirmant une présence, une histoire, un futur, des relations, etc. Se raconter au théâtre, se mettre en scène en ses propres termes devient alors un geste souverain.
Quand Naomi Fontaine suggère à Shuni qu’elle a peut-être davantage besoin des Innus qu’eux d’elle, elle touche à un enjeu de fond pour Robinson et Carter, qui s’inquiètent du rôle accessoire que joue trop souvent encore la figure de l’Autochtone tragique sur la scène théâtrale. Carter note que la mise en scène d’une réelle détresse autochtone est une arme à deux tranchants : d’un côté, il faut que les artistes puissent se raconter sur scène et nommer ce qui les habite, il en va de la santé de la communauté ; d’un autre côté, Carter remarque que cette souffrance est devenue instrumentalisée, une sorte de commodité théâtrale qui garantit la catharsis du public sans nécessairement provoquer de changements de fond, ou d’actions tangibles hors de l’espace théâtral. (Jill Carter, « Discarding Sympathy, Disrupting Catharsis: The Mortification of Indigenous Flesh as Survivance-Intervention », Theatre Journal, vol. 67, no 3, octobre 2015, p. 413-432.) La catharsis, selon Aristote, est ce procédé par lequel les spectateurs et les spectatrices se libèrent d’émotions négatives en éprouvant de la pitié ou de la terreur pour ce qui se passe sur scène. C’est une libération par procuration. Carter demande : que vaut cette libération au théâtre si elle passe par la consommation par le groupe dominant du malheur de ceux et celles qu’il marginalise ? Elle note que ce processus reproduit la même logique qui organise la société coloniale qui est la nôtre, c’est-à-dire l’appropriation et la consommation de tout ce qui est autochtone – territoires, ressources, mais aussi le spectacle de la souffrance des Premiers Peuples. Dans ce contexte, la catharsis ne fait peut-être que dédouaner le public allochtone qui, s’étant senti outré, ou choqué, ou ému par une souffrance qu’il voit comme extérieure à lui-même (plutôt que comme le résultat d’une relation de pouvoir asymétrique dont il est partie prenante), rentrera à la maison, convaincu d’en avoir fait assez, ou d’être du bon bord de l’histoire.
Le théâtre des Premiers Peuples au Canada est riche, et il s’y développe depuis plus de 35 ans un vocabulaire unique, que la metteure en scène métisse Yvette Nolan appelle « une médecine » de l’âme, du corps et des communautés. Au Québec, la compagnie Ondinnok célèbre ses 35 ans en 2020, et une relève inspirée est en place. Au Canada anglais, il existe un plus grand nombre de compagnies autochtones et une présence institutionnelle qu’on ne retrouve pas encore au Québec. On compte, par exemple, des lieux de formation et de création, des résidences menées par et pour des Autochtones, et des programmes universitaires où une relève, dont font partie Robinson et Carter, étudie et met en contexte ce travail foisonnant. Ce théâtre choisit de plus en plus de se refuser au type de relation cathartique avec un public non autochtone, tel qu’examiné par Carter, et exprime plutôt, selon Robinson, une forme de souveraineté, en affirmant que l’histoire, la souffrance et les savoirs des Premières Nations ne sont pas objets de consommation ou de curiosité. Ce théâtre se base sur la reconnaissance, comme le rappelle Fontaine, qu’on ne peut pas tout savoir de l’autre et que cette prise de conscience marque le début d’une vraie rencontre.