Ils sont sept. Sept garçons s’élancent sur la piste comme des gladiateurs qui partent en guerre. Le plancher dépouillé s’ouvre en une tranchée entre les estrades montées sur les deux murs latéraux. Au fond, une empilement de madriers. Entre ce matériau et le vide de la scène, les sept garçons s’inventent des mondes ludiques, lubriques, périlleux, avec tout ce qu’il faut de bravoure et de goût du risque pour ouvrir une zone commune où se rencontrer.
Cela démarre avec une séance de réchauffement remplie de testostérone et du simple plaisir d’amplifier la masse de son corps vers l’épuisement. Cela glisse et roule et se frappe et s’accroche comme des électrons fous qui remplissent la fosse. De fait, le spectacle se présente comme une série de tableaux qui glissent l’un dans l’autre, dans une dynamique toujours réinventée. Dans certains cas, ils sont six contre un, puis en couple ou alors en amoncellement. Comme dans ce tableau où ils s’agglutinent en une « portée de chats » émettant grognements, borborygmes et certains petits cris aigus de plaisir. Le corps, le corps comme ultime refuge de toutes les tensions, de tous les sens, de tout sens.
Pour les sept comédiens, parmi lesquels s’est infiltré un seul danseur de formation, à la demande expresse de Karine Ledoyen, il s’agissait du désir d’explorer le langage du corps dans une structure chorégraphique où la parole serait exclue. Spectacle muet donc, mais volubile par la fureur des corps maladroits exaltant de véracité. Le défi pour Ledoyen consistait à organiser ce chaos ludique auquel les garçons se livraient lors de chaque atelier. Le défi pour les garçons consistait à juguler cette énergie brute à travers une mémoire du corps que leur corps n’avait pas. Il fallait dépasser le plaisir immédiat du corps sollicité et torturé, il fallait bien entrer en interaction.
Cette double tension s’épanouit dans un spectacle d’une étrange beauté. Cette performance se construit dans l’interaction progressive entre la chair vivante et le bois, matériau vivant mais inerte. À travers cette dichotomie banale, les garçons se rencontrent finalement dans des postures qui s’alimentent à plusieurs registres. Le jeu conduit à la complicité, la complicité à la proximité, la proximité à la confidence. Au fil des tableaux se dégagent une mise à nu des garçons qui n’ont plus les trucs de comédiens pour se protéger. Un jeu acrobatique de mains à mains devient une proposition entre deux corps étrangers qui s’entremêlent en une osmose charnelle d’une grande puissance. Rampant dans un labyrinthe dynamique construit par les autres, deux corps sont amenés vers une arène où ils s’affrontent en une lutte envoutante faite d’attraction et de répulsion, où amour et haine fusionnent en une montée érotique qui conduit le dernier survivant sur le fil de l’équilibre. Ils se rejoindront ici en une magnifique scène finale, tous maintenus en équilibre précaire sur la crête des émotions, dans un pur moment de quiétude zen.
À travers les contacts parfois brutaux, les fuites, les amas de corps, les constructions serpentines, les enchevêtrements accrochées par un genou, par une grippe sur la ceinture, par la montée de l’un vers le ciel, prenant appui sur la pyramide du groupe, par les évitements, par le jeu imbriqué avec les madriers, Danse de garçons propose entre la sueur et le souffle accéléré un moment de grande véracité. Ce spectacle qui évite les maniérismes du théâtre et de la danse se situe plus proche de la zone de la performance, où il n’y a pas jeu d’acteur et représentation, mais dépouillement des codes. Il s’agit d’une proposition crue, où la maladresse même devient une qualité. Entre danse et théâtre, ce spectacle offre au corps indiscipliné une scène d’expression brute pour l’être primitif en chacun de nous. Et le public s’est laissé prendre et a chaleureusement salué cette création lors de la première hier soir.
Ils sont sept. Sept garçons s’élancent sur la piste comme des gladiateurs qui partent en guerre. Le plancher dépouillé s’ouvre en une tranchée entre les estrades montées sur les deux murs latéraux. Au fond, une empilement de madriers. Entre ce matériau et le vide de la scène, les sept garçons s’inventent des mondes ludiques, lubriques, périlleux, avec tout ce qu’il faut de bravoure et de goût du risque pour ouvrir une zone commune où se rencontrer.
Cela démarre avec une séance de réchauffement remplie de testostérone et du simple plaisir d’amplifier la masse de son corps vers l’épuisement. Cela glisse et roule et se frappe et s’accroche comme des électrons fous qui remplissent la fosse. De fait, le spectacle se présente comme une série de tableaux qui glissent l’un dans l’autre, dans une dynamique toujours réinventée. Dans certains cas, ils sont six contre un, puis en couple ou alors en amoncellement. Comme dans ce tableau où ils s’agglutinent en une « portée de chats » émettant grognements, borborygmes et certains petits cris aigus de plaisir. Le corps, le corps comme ultime refuge de toutes les tensions, de tous les sens, de tout sens.
Pour les sept comédiens, parmi lesquels s’est infiltré un seul danseur de formation, à la demande expresse de Karine Ledoyen, il s’agissait du désir d’explorer le langage du corps dans une structure chorégraphique où la parole serait exclue. Spectacle muet donc, mais volubile par la fureur des corps maladroits exaltant de véracité. Le défi pour Ledoyen consistait à organiser ce chaos ludique auquel les garçons se livraient lors de chaque atelier. Le défi pour les garçons consistait à juguler cette énergie brute à travers une mémoire du corps que leur corps n’avait pas. Il fallait dépasser le plaisir immédiat du corps sollicité et torturé, il fallait bien entrer en interaction.
Cette double tension s’épanouit dans un spectacle d’une étrange beauté. Cette performance se construit dans l’interaction progressive entre la chair vivante et le bois, matériau vivant mais inerte. À travers cette dichotomie banale, les garçons se rencontrent finalement dans des postures qui s’alimentent à plusieurs registres. Le jeu conduit à la complicité, la complicité à la proximité, la proximité à la confidence. Au fil des tableaux se dégagent une mise à nu des garçons qui n’ont plus les trucs de comédiens pour se protéger. Un jeu acrobatique de mains à mains devient une proposition entre deux corps étrangers qui s’entremêlent en une osmose charnelle d’une grande puissance. Rampant dans un labyrinthe dynamique construit par les autres, deux corps sont amenés vers une arène où ils s’affrontent en une lutte envoutante faite d’attraction et de répulsion, où amour et haine fusionnent en une montée érotique qui conduit le dernier survivant sur le fil de l’équilibre. Ils se rejoindront ici en une magnifique scène finale, tous maintenus en équilibre précaire sur la crête des émotions, dans un pur moment de quiétude zen.
À travers les contacts parfois brutaux, les fuites, les amas de corps, les constructions serpentines, les enchevêtrements accrochées par un genou, par une grippe sur la ceinture, par la montée de l’un vers le ciel, prenant appui sur la pyramide du groupe, par les évitements, par le jeu imbriqué avec les madriers, Danse de garçons propose entre la sueur et le souffle accéléré un moment de grande véracité. Ce spectacle qui évite les maniérismes du théâtre et de la danse se situe plus proche de la zone de la performance, où il n’y a pas jeu d’acteur et représentation, mais dépouillement des codes. Il s’agit d’une proposition crue, où la maladresse même devient une qualité. Entre danse et théâtre, ce spectacle offre au corps indiscipliné une scène d’expression brute pour l’être primitif en chacun de nous. Et le public s’est laissé prendre et a chaleureusement salué cette création lors de la première hier soir.
Danse de garçons
Chorégraphie de Karine Ledoyen
Coproduction de Dans K par K et Daniel Danis Arts/Science
Jusqu’au 1er juin à la Salle Multi de Méduse, Québec, dans le cadre du Carrefour international de théâtre