Il y a déjà vingt ans de cela, Daniele Finzi Pasca nous avait séduits avec Icaro, théâtre de l’intime pour un spectateur privilégié qui devient complice de cette fable inclassable sur l’amitié et la maladie.
On a retrouvé cette touche magique, cette volonté de pratiquer le « théâtre de la caresse », ce parti-pris de jeter un regard sur les choses à partir des coulisses, dans les productions signées pour le Cirque Éloize (tout particulièrement Rain et La nebbia), le Cirque du Soleil ou son projet Donka; une lettre à Tchekhov.
Avec Bianco su bianco, Finzi Pasca souhaitait revenir aux origines, à la plus simple expression. Il s’inspire une fois encore d’instants volés pour tisser un canevas lâche sur lequel il dessine à traits légers, en blanc : celui de la neige, de la forêt d’ampoules (détournement de celle qui illuminait la cérémonie de clôture des Jeux de Sotchi), des hôpitaux, de l’absence, des souvenirs qui nous fuient dès qu’on les conjure. Le blanc des clowns aussi, qui peuvent se permettre d’aborder, l’air de ne pas y toucher, la violence, la maladie, la mort, mais surtout le doute. Doit-on se méfier de la gentillesse des gens quand on porte sur le corps la marque des blessures intentées? Peut-on s’ouvrir à l’amour? Est-il encore possible de vivre sa vie sans se faire broyer par la soif de pouvoir des autres?
Pour transmettre ces bribes d’histoires qui, par aplats successifs, font sens, Daniele Finzi Pasca s’est adjoint les talents du couple formé par Helena Bittencourt (que l’on avait notamment pu découvrir dans Donka) et Goos Meeuwsen (qui habite l’espace de façon spectaculaire). Dès les premiers instants, leur complicité se révèle palpable. Elle joue sur le registre plus dramatique, il reste expert dans un comique souvent voilé de tendresse. Pourtant, il y a quelque chose qui ne lève pas ou plutôt qui finit par lever, mais beaucoup plus – trop? – tard.
L’auteur a peut-être voulu exprimer ici trop de choses, aborder trop de sujets. Il aurait eu avantage à élaguer, à concentrer le propos, en partie parce que l’accent portugais de Bittencourt et la façon dont elle transforme certaines consonnes rend parfois difficile l’intelligibilité du texte, très dense (particulièrement quand elle raconte par-dessus une boucle musicale qu’elle a elle-même programmée quelques instants auparavant). On dérive alors dans une certaine rêverie, se laisse alors happer par la féérie du dispositif scénique. Paradoxe puisque le spectacle traite notamment des mots ayant perdu leur luminosité, leur sens.
Malgré tout, il faut admettre qu’une poésie diffuse se dégage de l’entreprise… comme si on avait contemplé le tout à travers un voile de neige.
Mise en scène de Daniele Finzi Pasca. Une production de la Compagnie Finzi Pasca. À la Cinquième salle de la Place des arts jusqu’au 29 novembre 2014.
Il y a déjà vingt ans de cela, Daniele Finzi Pasca nous avait séduits avec Icaro, théâtre de l’intime pour un spectateur privilégié qui devient complice de cette fable inclassable sur l’amitié et la maladie.
On a retrouvé cette touche magique, cette volonté de pratiquer le « théâtre de la caresse », ce parti-pris de jeter un regard sur les choses à partir des coulisses, dans les productions signées pour le Cirque Éloize (tout particulièrement Rain et La nebbia), le Cirque du Soleil ou son projet Donka; une lettre à Tchekhov.
Avec Bianco su bianco, Finzi Pasca souhaitait revenir aux origines, à la plus simple expression. Il s’inspire une fois encore d’instants volés pour tisser un canevas lâche sur lequel il dessine à traits légers, en blanc : celui de la neige, de la forêt d’ampoules (détournement de celle qui illuminait la cérémonie de clôture des Jeux de Sotchi), des hôpitaux, de l’absence, des souvenirs qui nous fuient dès qu’on les conjure. Le blanc des clowns aussi, qui peuvent se permettre d’aborder, l’air de ne pas y toucher, la violence, la maladie, la mort, mais surtout le doute. Doit-on se méfier de la gentillesse des gens quand on porte sur le corps la marque des blessures intentées? Peut-on s’ouvrir à l’amour? Est-il encore possible de vivre sa vie sans se faire broyer par la soif de pouvoir des autres?
Pour transmettre ces bribes d’histoires qui, par aplats successifs, font sens, Daniele Finzi Pasca s’est adjoint les talents du couple formé par Helena Bittencourt (que l’on avait notamment pu découvrir dans Donka) et Goos Meeuwsen (qui habite l’espace de façon spectaculaire). Dès les premiers instants, leur complicité se révèle palpable. Elle joue sur le registre plus dramatique, il reste expert dans un comique souvent voilé de tendresse. Pourtant, il y a quelque chose qui ne lève pas ou plutôt qui finit par lever, mais beaucoup plus – trop? – tard.
L’auteur a peut-être voulu exprimer ici trop de choses, aborder trop de sujets. Il aurait eu avantage à élaguer, à concentrer le propos, en partie parce que l’accent portugais de Bittencourt et la façon dont elle transforme certaines consonnes rend parfois difficile l’intelligibilité du texte, très dense (particulièrement quand elle raconte par-dessus une boucle musicale qu’elle a elle-même programmée quelques instants auparavant). On dérive alors dans une certaine rêverie, se laisse alors happer par la féérie du dispositif scénique. Paradoxe puisque le spectacle traite notamment des mots ayant perdu leur luminosité, leur sens.
Malgré tout, il faut admettre qu’une poésie diffuse se dégage de l’entreprise… comme si on avait contemplé le tout à travers un voile de neige.
Bianco su bianco
Mise en scène de Daniele Finzi Pasca. Une production de la Compagnie Finzi Pasca. À la Cinquième salle de la Place des arts jusqu’au 29 novembre 2014.