Le studio d’essai de Méduse déploie ses armes pour l’équipe de l’auteur Daniel Danis (Le chant du dire-dire, Kiwi), et du metteur en scène Alexandre Fecteau (Changing Room, Le NoShow).
La technologie coule partout, sur la table centrale, derrière les chaises pour les spectateurs-agitateurs, sur les tables latérales remplies de micros, de capteurs, de consoles, d’écrans, d’ordinateurs. Ici une caméra sur pied, là des fils attachés en couettes, des micros incertains de leur fonction, accroché à la grille technique un hémisphère lumineux au-dessus de l’équipe de théâtre : l’auteur, le metteur en scène, les comédiens.
Jour 1
Séjour s’avère être « notre » séjour dans l’utérus où se trame une pièce radiophonique en devenir. Au premier « atelier », les choses sont encore imprécises : l’auteur quittera bientôt sa table en aparté pour s’asseoir à la table centrale. Il interviendra d’ici. Les instructions nous parviennent par bribes, tous les protagonistes sont présentés avec leur fonction respective et leurs rôles multiples. Le théâtre à nu, aucun des subterfuges de la scène ne sera gardé secret. Ce n’est pas dans cette zone que la magie opère, mais bien dans la mise en bouche du texte de Danis.
On assiste à la genèse d’un événement à venir. Une espèce d’autopsie à rebours où la compréhension des créateurs se raffine, les questionnements fusent, les réponses s’ajustent, les intonations donnent de l’ampleur à la matière brute du texte encore en construction. La mise en bouche n’est pas seulement un jeu phonétique, mais bien la translation de mots en images, puis de cette vision à nouveau en mots. Les comédiens, comme le souligne Danis, ne doivent pas seulement dire, mais faire vivre les images que ces mots animent dans leur cerveau. Et puis nous les faire voir. Par tâtonnements successifs, par injection de sens, par analyse du rythme et des intentions, par mise en contraste, par prise en compte que la pièce sera radiophonique, que la scénographie, le décor, les costumes qu’invente devant nous Elaine Pearson doivent surgir dans l’oreille des auditeurs.
En arrière scène, Ariane Plante et Marc Doucet trament du sonore, soumettent des hypothèses, les comédiens suggèrent des pistes, bref nous assistons en direct à la construction d’une œuvre. Et ce premier jour tout est malléable, aucune des parties ne s’approprie le sens. Le texte bouge et s’invente (encore une scène à écrire cette nuit !), la mise en scène se développe par essai-erreur. Au passage, on nous explique pourquoi le galeriste japonais a un accent français… Et si la trame se dessine autour de Lucia, artiste et protégée dudit galeriste japonais et que le décor est celui bien réel de la rue St-Joseph, entre la Bibliothèque Gabrielle-Roy, la Bordée, la Brûlerie et l’Hôtel Pur, nous pressentons que bien d’autres choses moins concrètes vont surgir.
Jour 2
Plus de public, composé surtout de connaisseurs et de gens du milieu. Les collègues viennent lorgner le travail dans cet atelier de création ouvert : tous attendent des commentaires, des suggestions. Autour du ring sur les sièges des spectateurs, des comédiens, des metteurs en scène, des critiques, des scénographes. Certains participeront avec joie et générosité, mettront leur grain de sel dans la concoction.
Déjà, le poids du travail audio se fait sentir. Les propositions commencent à mieux cerner la scène, lui donner du relief, l’inscrire dans une texture physique augmentée.
Il est encore trop tôt pour comprendre. Mais on retrouve le Danis des mondes parallèles, monde tangible contre rêve, fantasme contre violence physique, indécidabilité entre vrai et faux, entre le vécu et le projeté. Il y a un éboueur, une neuropsychologue, une artiste, une anthropologue…
Dès lors, Séjour se donne à voir comme spectacle d’un spectacle à venir. Celui-ci aura la forme d’une diffusion radiophonique. Alors les réflexions sur l’art du texte et de sa manifestation sonore, la promesse de la poésie du quotidien moirée de fantastique trouveront leur écho dans leur épaisseur médiatique.
Texte de Daniel Danis. Mise en scène de Alexandre Fecteau. Présenté en atelier ouvert jusqu’au 7 juin, au Studio d’essai de Méduse, dans le cadre du Carrefour international de théâtre.
Le studio d’essai de Méduse déploie ses armes pour l’équipe de l’auteur Daniel Danis (Le chant du dire-dire, Kiwi), et du metteur en scène Alexandre Fecteau (Changing Room, Le NoShow).
La technologie coule partout, sur la table centrale, derrière les chaises pour les spectateurs-agitateurs, sur les tables latérales remplies de micros, de capteurs, de consoles, d’écrans, d’ordinateurs. Ici une caméra sur pied, là des fils attachés en couettes, des micros incertains de leur fonction, accroché à la grille technique un hémisphère lumineux au-dessus de l’équipe de théâtre : l’auteur, le metteur en scène, les comédiens.
Jour 1
Séjour s’avère être « notre » séjour dans l’utérus où se trame une pièce radiophonique en devenir. Au premier « atelier », les choses sont encore imprécises : l’auteur quittera bientôt sa table en aparté pour s’asseoir à la table centrale. Il interviendra d’ici. Les instructions nous parviennent par bribes, tous les protagonistes sont présentés avec leur fonction respective et leurs rôles multiples. Le théâtre à nu, aucun des subterfuges de la scène ne sera gardé secret. Ce n’est pas dans cette zone que la magie opère, mais bien dans la mise en bouche du texte de Danis.
On assiste à la genèse d’un événement à venir. Une espèce d’autopsie à rebours où la compréhension des créateurs se raffine, les questionnements fusent, les réponses s’ajustent, les intonations donnent de l’ampleur à la matière brute du texte encore en construction. La mise en bouche n’est pas seulement un jeu phonétique, mais bien la translation de mots en images, puis de cette vision à nouveau en mots. Les comédiens, comme le souligne Danis, ne doivent pas seulement dire, mais faire vivre les images que ces mots animent dans leur cerveau. Et puis nous les faire voir. Par tâtonnements successifs, par injection de sens, par analyse du rythme et des intentions, par mise en contraste, par prise en compte que la pièce sera radiophonique, que la scénographie, le décor, les costumes qu’invente devant nous Elaine Pearson doivent surgir dans l’oreille des auditeurs.
En arrière scène, Ariane Plante et Marc Doucet trament du sonore, soumettent des hypothèses, les comédiens suggèrent des pistes, bref nous assistons en direct à la construction d’une œuvre. Et ce premier jour tout est malléable, aucune des parties ne s’approprie le sens. Le texte bouge et s’invente (encore une scène à écrire cette nuit !), la mise en scène se développe par essai-erreur. Au passage, on nous explique pourquoi le galeriste japonais a un accent français… Et si la trame se dessine autour de Lucia, artiste et protégée dudit galeriste japonais et que le décor est celui bien réel de la rue St-Joseph, entre la Bibliothèque Gabrielle-Roy, la Bordée, la Brûlerie et l’Hôtel Pur, nous pressentons que bien d’autres choses moins concrètes vont surgir.
Jour 2
Plus de public, composé surtout de connaisseurs et de gens du milieu. Les collègues viennent lorgner le travail dans cet atelier de création ouvert : tous attendent des commentaires, des suggestions. Autour du ring sur les sièges des spectateurs, des comédiens, des metteurs en scène, des critiques, des scénographes. Certains participeront avec joie et générosité, mettront leur grain de sel dans la concoction.
Déjà, le poids du travail audio se fait sentir. Les propositions commencent à mieux cerner la scène, lui donner du relief, l’inscrire dans une texture physique augmentée.
Il est encore trop tôt pour comprendre. Mais on retrouve le Danis des mondes parallèles, monde tangible contre rêve, fantasme contre violence physique, indécidabilité entre vrai et faux, entre le vécu et le projeté. Il y a un éboueur, une neuropsychologue, une artiste, une anthropologue…
Dès lors, Séjour se donne à voir comme spectacle d’un spectacle à venir. Celui-ci aura la forme d’une diffusion radiophonique. Alors les réflexions sur l’art du texte et de sa manifestation sonore, la promesse de la poésie du quotidien moirée de fantastique trouveront leur écho dans leur épaisseur médiatique.
Séjour
Texte de Daniel Danis. Mise en scène de Alexandre Fecteau. Présenté en atelier ouvert jusqu’au 7 juin, au Studio d’essai de Méduse, dans le cadre du Carrefour international de théâtre.