L’expérience se révèle fort attrayante et évocatrice : l’adaptation très libre d’un film des années 1970 de Jean Eustache, La Maman et la putain, concoctée par la metteure en scène Julie Duclos et sa compagnie L’In-quarto, dresse un portrait non complaisant d’un groupe de trentenaires d’aujourd’hui. Mais, mettre en scène des comportements amoureux de couples voulant vivre une sexualité autre, ouverte, c’est-à-dire « s’aimer sans dépendance, en restant libre et en laissant libre », paraît un peu anachronique en notre ère de rectitude où rien ne vaut une vie rangée.
La pièce Nos serments, qui sans doute ne pouvait venir que de France, qu’on peut d’ailleurs qualifier de « franco-française », se déroule sur une période de temps assez longue. Plusieurs années où l’on nous fait partager les épisodes de vie de François, « chômeur professionnel » glandant dans les appartements des femmes qu’il rencontre et qui le font vivre, du moins pour deux d’entre elles. Il y aura Mathilde, en ouverture de spectacle, avec qui le dialogue est devenu impossible, elle gagnée par l’hystérie, lui inatteignable.
Puis, il y aura Esther, magnifique de joie de vivre, amoureuse qui va lentement déchanter, se désenchanter, en voyant François s’amouracher d’une infirmière polonaise, Oliwia, à la présence de plus en plus envahissante. Si les deux femmes fraternisent d’emblée, les choses se corsent rapidement. « On peut papillonner, mais là c’est une romance », dira Esther à François, devant l’indéniable envoûtement qui fait voler en éclat leur belle entente de couple, jusque-là préservé de toute menace sérieuse.
Alternant les scènes hyperréalistes et des passages filmés en extérieur, le spectacle s’étire en longueurs malgré d’intenses moments, joués par des interprètes bien investis dans leurs rôles. On sent que l’improvisation, qui fut à la base du travail de création, leur a permis de révéler beaucoup d’eux-mêmes à travers leurs personnages. De beaux personnages, ceux d’Esther et d’Oliwia, femmes émancipées néanmoins victimes du machisme ambiant, étant particulièrement riches. Ceux de François et de son ami Gilles, à côté, paraissent quelque peu unidimensionnels. Mais c’est sans doute là aussi une réussite, car ces hommes-là existent. « Il parle beaucoup mais il dit jamais rien, y a beaucoup d’hommes comme ça », dira d’ailleurs Esther à Oliwia, à propos de François.
La deuxième partie du spectacle, après l’entracte, constitue pratiquement un épilogue. Après que François ait quitté Esther pour Oliwia, provoquant un tsunami d’émotions marquant toutes les phases de la déprime amoureuse, on retrouvera François quelques années plus tard, séparé d’Oliwia, avec qui il a eu un enfant, l’infirmière s’apprêtant à se marier avec un médecin. C’est sur l’écran, prenant le relais de la scène, qu’on les revoit attablés dans un café, heureux de ce qu’ils sont devenus…
La pièce se termine, de façon révélatrice, sur cet épisode filmique. On ne s’étonnerait pas de voir, dans les années à venir, la metteure en scène opter pour le 7e art…
Texte de Julie Duclos et Guy-Patrick Sainderichin. Mise en scène de Julie Duclos. Très librement inspiré par le film La maman et la putain de Jean Eustache. Une production de L’In-quarto, présentée à l’occasion du FTA au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui les 1er et 2 juin 2016.
L’expérience se révèle fort attrayante et évocatrice : l’adaptation très libre d’un film des années 1970 de Jean Eustache, La Maman et la putain, concoctée par la metteure en scène Julie Duclos et sa compagnie L’In-quarto, dresse un portrait non complaisant d’un groupe de trentenaires d’aujourd’hui. Mais, mettre en scène des comportements amoureux de couples voulant vivre une sexualité autre, ouverte, c’est-à-dire « s’aimer sans dépendance, en restant libre et en laissant libre », paraît un peu anachronique en notre ère de rectitude où rien ne vaut une vie rangée.
La pièce Nos serments, qui sans doute ne pouvait venir que de France, qu’on peut d’ailleurs qualifier de « franco-française », se déroule sur une période de temps assez longue. Plusieurs années où l’on nous fait partager les épisodes de vie de François, « chômeur professionnel » glandant dans les appartements des femmes qu’il rencontre et qui le font vivre, du moins pour deux d’entre elles. Il y aura Mathilde, en ouverture de spectacle, avec qui le dialogue est devenu impossible, elle gagnée par l’hystérie, lui inatteignable.
Puis, il y aura Esther, magnifique de joie de vivre, amoureuse qui va lentement déchanter, se désenchanter, en voyant François s’amouracher d’une infirmière polonaise, Oliwia, à la présence de plus en plus envahissante. Si les deux femmes fraternisent d’emblée, les choses se corsent rapidement. « On peut papillonner, mais là c’est une romance », dira Esther à François, devant l’indéniable envoûtement qui fait voler en éclat leur belle entente de couple, jusque-là préservé de toute menace sérieuse.
Alternant les scènes hyperréalistes et des passages filmés en extérieur, le spectacle s’étire en longueurs malgré d’intenses moments, joués par des interprètes bien investis dans leurs rôles. On sent que l’improvisation, qui fut à la base du travail de création, leur a permis de révéler beaucoup d’eux-mêmes à travers leurs personnages. De beaux personnages, ceux d’Esther et d’Oliwia, femmes émancipées néanmoins victimes du machisme ambiant, étant particulièrement riches. Ceux de François et de son ami Gilles, à côté, paraissent quelque peu unidimensionnels. Mais c’est sans doute là aussi une réussite, car ces hommes-là existent. « Il parle beaucoup mais il dit jamais rien, y a beaucoup d’hommes comme ça », dira d’ailleurs Esther à Oliwia, à propos de François.
La deuxième partie du spectacle, après l’entracte, constitue pratiquement un épilogue. Après que François ait quitté Esther pour Oliwia, provoquant un tsunami d’émotions marquant toutes les phases de la déprime amoureuse, on retrouvera François quelques années plus tard, séparé d’Oliwia, avec qui il a eu un enfant, l’infirmière s’apprêtant à se marier avec un médecin. C’est sur l’écran, prenant le relais de la scène, qu’on les revoit attablés dans un café, heureux de ce qu’ils sont devenus…
La pièce se termine, de façon révélatrice, sur cet épisode filmique. On ne s’étonnerait pas de voir, dans les années à venir, la metteure en scène opter pour le 7e art…
Nos serments
Texte de Julie Duclos et Guy-Patrick Sainderichin. Mise en scène de Julie Duclos. Très librement inspiré par le film La maman et la putain de Jean Eustache. Une production de L’In-quarto, présentée à l’occasion du FTA au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui les 1er et 2 juin 2016.