Le premier spectacle à être présenté à la Maison pour la danse, un lieu à l’architecture éthérée conjuguant des studios et des bureaux au cœur du quartier Saint-Roch, à Québec, est un triptyque signé par la chorégraphe Lina Cruz.
Un projet collaboratif, hybride, sensible et taillé dans l’humour absurde, qui nous ramène aux premiers humains, aux premiers rites, aux premiers paramètres de notre humanité. Trois duos composent Triptyque Cryptique, qui porte fort bien son nom. La proposition navigue volontairement dans l’étrange, le bouffon, le clownesque, tout en portant une certaine poésie, voire une tendresse, ce qui constitue un mélange pour le moins éclectique.
Nous sommes dans un grand studio où les gradins surélevés n’occupent qu’une petite portion de l’espace. Les spectateurs surplombent les danseurs et pourraient être les témoins d’une démonstration sociologique. Mais c’est de danse qu’il s’agit et on constate peu à peu, malgré l’inspiration néandertalienne, que chaque geste est minutieusement pensé et exécuté, dans un mélange dosé de rudesse et de finesse, de nœuds et d’envolées.
Le spectacle s’ouvre avec Tunnel #3, où Harold Rhéaume et Lydia Wagerer incarne un couple incongru dans un univers souterrain. Les lampes qu’ils portent au front leur donnent des allures de spéléologues. Les sons des roches qu’ils entrechoquent, des bouteilles d’eau qui se cognent, se réverbèrent pour constituer une trame sonore de mine, de grotte et de rivière souterraine. Les lampes illuminent à plusieurs reprises leurs visages rapprochés, aux aguets, à l’affût. Chacun fait son affaire jusqu’à ce que les corps se cherchent, se servent d’appui, s’enroulent avec des contorsions incongrues et soigneusement orchestrées. Rhéaume chantera La vie en rose la tête dans un bloc de bois. La chorégraphie se terminera sur l’image d’un enfant qu’on berce, si bien qu’on peut y voir une improbable romance entre deux créatures.
Créatures. C’est justement le mot qui me revient sans cesse en tête pour qualifier les deux drôles de personnages du duo Tempo Al Dente, interprétés par Raphaëlle Fougères et Geneviève Robitaille. Mi-oiseaux, mi-serpents, les deux femmes jouent, tout au long, avec une horloge, qui roule entre deux parenthèses rouges qui font office de limites et sur un tapis central qui rappelle l’espace de combat. Là encore, on jouera avec les sons, beaucoup avec la voix, mixant les sifflements et les grognements et les syllabes. Le duo éventrera l’horloge, y trouvera un festin, se laissera gagner par le rire… On croirait voir deux cyborgs égarées dans une toile de Dali, mangeant goulûment les entrailles de quelque machine rouillée.
Le troisième duo, En attendant la nuit blanche implique Jean-François Duke et Fabien Piché dans une version déjantée d’En attendant Godot où l’on déclame en italien. La chorégraphie est presque sportive, alliant sauts, portés, courses, impacts. Près des coulisses, Philippe Noiraut s’en donne à cœur joie pour créer des sons et des ritournelles atonales à satiété. On navigue entre saturation et dépouillement. L’exercice a quelque chose de la Fête des Fous au Moyen Âge. Fabien Piché se déshabille sans cesse, comme pris de frénésie. Le spectacle se conclut par un délire qui rassemble les six danseurs qui cèdent aux joies de la rencontre sur un cercle de lumière.
Chorégraphies, costumes et accessoires: Lina Cruz. Éclairages: Émie Durette Yockell. Musique: Philippe Noiraut. Avec Jean-François Duke, Raphaëlle Fougères, Fabien Piché, Harold Rhéaume, Geneviève Robitaille et Lydia Wagerer. Une coproduction du Fils d’Adrien danse, des Productions Fila 13 et du Collectif XYZ. Présenté par la Rotonde au Studio A de la Maison pour la danse de Québec jusqu’au 20 octobre 2017.
Le premier spectacle à être présenté à la Maison pour la danse, un lieu à l’architecture éthérée conjuguant des studios et des bureaux au cœur du quartier Saint-Roch, à Québec, est un triptyque signé par la chorégraphe Lina Cruz.
Un projet collaboratif, hybride, sensible et taillé dans l’humour absurde, qui nous ramène aux premiers humains, aux premiers rites, aux premiers paramètres de notre humanité. Trois duos composent Triptyque Cryptique, qui porte fort bien son nom. La proposition navigue volontairement dans l’étrange, le bouffon, le clownesque, tout en portant une certaine poésie, voire une tendresse, ce qui constitue un mélange pour le moins éclectique.
Nous sommes dans un grand studio où les gradins surélevés n’occupent qu’une petite portion de l’espace. Les spectateurs surplombent les danseurs et pourraient être les témoins d’une démonstration sociologique. Mais c’est de danse qu’il s’agit et on constate peu à peu, malgré l’inspiration néandertalienne, que chaque geste est minutieusement pensé et exécuté, dans un mélange dosé de rudesse et de finesse, de nœuds et d’envolées.
Le spectacle s’ouvre avec Tunnel #3, où Harold Rhéaume et Lydia Wagerer incarne un couple incongru dans un univers souterrain. Les lampes qu’ils portent au front leur donnent des allures de spéléologues. Les sons des roches qu’ils entrechoquent, des bouteilles d’eau qui se cognent, se réverbèrent pour constituer une trame sonore de mine, de grotte et de rivière souterraine. Les lampes illuminent à plusieurs reprises leurs visages rapprochés, aux aguets, à l’affût. Chacun fait son affaire jusqu’à ce que les corps se cherchent, se servent d’appui, s’enroulent avec des contorsions incongrues et soigneusement orchestrées. Rhéaume chantera La vie en rose la tête dans un bloc de bois. La chorégraphie se terminera sur l’image d’un enfant qu’on berce, si bien qu’on peut y voir une improbable romance entre deux créatures.
Créatures. C’est justement le mot qui me revient sans cesse en tête pour qualifier les deux drôles de personnages du duo Tempo Al Dente, interprétés par Raphaëlle Fougères et Geneviève Robitaille. Mi-oiseaux, mi-serpents, les deux femmes jouent, tout au long, avec une horloge, qui roule entre deux parenthèses rouges qui font office de limites et sur un tapis central qui rappelle l’espace de combat. Là encore, on jouera avec les sons, beaucoup avec la voix, mixant les sifflements et les grognements et les syllabes. Le duo éventrera l’horloge, y trouvera un festin, se laissera gagner par le rire… On croirait voir deux cyborgs égarées dans une toile de Dali, mangeant goulûment les entrailles de quelque machine rouillée.
Le troisième duo, En attendant la nuit blanche implique Jean-François Duke et Fabien Piché dans une version déjantée d’En attendant Godot où l’on déclame en italien. La chorégraphie est presque sportive, alliant sauts, portés, courses, impacts. Près des coulisses, Philippe Noiraut s’en donne à cœur joie pour créer des sons et des ritournelles atonales à satiété. On navigue entre saturation et dépouillement. L’exercice a quelque chose de la Fête des Fous au Moyen Âge. Fabien Piché se déshabille sans cesse, comme pris de frénésie. Le spectacle se conclut par un délire qui rassemble les six danseurs qui cèdent aux joies de la rencontre sur un cercle de lumière.
Triptyque Cryptique
Chorégraphies, costumes et accessoires: Lina Cruz. Éclairages: Émie Durette Yockell. Musique: Philippe Noiraut. Avec Jean-François Duke, Raphaëlle Fougères, Fabien Piché, Harold Rhéaume, Geneviève Robitaille et Lydia Wagerer. Une coproduction du Fils d’Adrien danse, des Productions Fila 13 et du Collectif XYZ. Présenté par la Rotonde au Studio A de la Maison pour la danse de Québec jusqu’au 20 octobre 2017.