À Buenos Aires, pendant la dictature, on pratiquait le théâtre dans des maisons, comme une forme de résistance; après la crise économique de 2001, on fit de même pour des raisons financières. C’est cette pratique de «théâtre à la maison» qu’a voulu reproduire Ximena Ferrer, comédienne et codirectrice de la compagnie Singulier Pluriel, avec La Mondiola, en ouvrant son propre foyer à une vingtaine de spectateurs par représentation.
Le début de la performance est résolument festif, et les spectateurs sont invités à porter un chapeau de carton et à déclamer un poème à l’intention d’Antonio (Omar Alexis Ramos), dont on célèbre ce soir le 50e anniversaire. Bientôt, une inconnue portant le nom d’une célèbre actrice italienne, Anna Magnani (Ximena Ferrer), sonne à la porte, prétextant avoir vu l’adresse en rêve. Elle apporte des empanadas et un panier qui recèle des objets ayant appartenu au défunt mari de la maîtresse des lieux, Camille (Liliane Boucher).
Au fil des scènes, la personnalité du défunt se dégage ainsi que la nature des relations entretenues par les protagonistes. On explore les thèmes de l’exil, de l’amour, du deuil, de la création artistique et de la maladie mentale. La présence, d’abord audible sous la forme de cris d’animaux puis vaillamment excentrique, de la fille Lolie (Stéphanie B. Dumont), contribue à donner à l’ensemble un caractère surréaliste (et surréel), accentué par la présence de Sandra Wong en robe traditionnelle cubaine, qui crée une ambiance sonore en direct avec une vingtaine d’instruments. Quand on bascule dans le drame, nous voir tous avec nos chapeaux pointus sur la tête crée une dissonance cognitive à la fois malaisante et cocasse.
L’idée de présenter un spectacle dans un appartement n’est pas ici un simple concept visant à créer l’événement: l’occupation des lieux est totale et le moindre recoin a été scénographié de manière à sublimer la réalité quotidienne. On va et vient ainsi constamment entre le salon, le corridor, la salle à manger et les chambres. Les comédiens évoluent au milieu de nous, n’hésitant pas à nous prendre à témoin, nous faire participer et nous toucher, comme si nous étions bel et bien des amis invités à la fête. Tous les ingrédients d’une soirée d’anniversaire sont d’ailleurs réunis (tour de magie, spectacle de marionnettes, karaoké, shooters), le tout entrecoupé d’abondantes citations et références poétiques, cinématographiques et musicales et de quelques répliques en italien.
Julie Vincent a écrit La Mondiola à partir d’improvisations, et cela se sent, car le texte souffre d’un manque de structure et d’unité, et les scènes sont de qualité variable. Pour apprécier le spectacle, mieux vaut l’accepter comme l’aventure humaine qu’il constitue, et s’ouvrir à la promiscuité physique et émotionnelle qu’il implique, puisque nous sommes plongés directement dans les échanges, les emportements et les débordements. Les interprètes donnent le meilleur d’eux-mêmes et on ne peut rester insensible à leur engagement et à leur générosité.
Texte et mise en scène: Julie Vincent. Dramaturgie: Paul Lefebvre. Musique: Michel Smith et Sandra Wong. Vidéos et photos: Rodolphe St-Arneault. Scénographie: Livia Magnani. Avec Liliane Boucher, Ximena Ferrer, Stéphanie B. Dumont, Omar Alexis Ramos et Sandra Wong. Une production de Singulier Pluriel. Dans un appartement de la rue Fullum, à Montréal, jusqu’au 7 juin 2018.
À Buenos Aires, pendant la dictature, on pratiquait le théâtre dans des maisons, comme une forme de résistance; après la crise économique de 2001, on fit de même pour des raisons financières. C’est cette pratique de «théâtre à la maison» qu’a voulu reproduire Ximena Ferrer, comédienne et codirectrice de la compagnie Singulier Pluriel, avec La Mondiola, en ouvrant son propre foyer à une vingtaine de spectateurs par représentation.
Le début de la performance est résolument festif, et les spectateurs sont invités à porter un chapeau de carton et à déclamer un poème à l’intention d’Antonio (Omar Alexis Ramos), dont on célèbre ce soir le 50e anniversaire. Bientôt, une inconnue portant le nom d’une célèbre actrice italienne, Anna Magnani (Ximena Ferrer), sonne à la porte, prétextant avoir vu l’adresse en rêve. Elle apporte des empanadas et un panier qui recèle des objets ayant appartenu au défunt mari de la maîtresse des lieux, Camille (Liliane Boucher).
Au fil des scènes, la personnalité du défunt se dégage ainsi que la nature des relations entretenues par les protagonistes. On explore les thèmes de l’exil, de l’amour, du deuil, de la création artistique et de la maladie mentale. La présence, d’abord audible sous la forme de cris d’animaux puis vaillamment excentrique, de la fille Lolie (Stéphanie B. Dumont), contribue à donner à l’ensemble un caractère surréaliste (et surréel), accentué par la présence de Sandra Wong en robe traditionnelle cubaine, qui crée une ambiance sonore en direct avec une vingtaine d’instruments. Quand on bascule dans le drame, nous voir tous avec nos chapeaux pointus sur la tête crée une dissonance cognitive à la fois malaisante et cocasse.
L’idée de présenter un spectacle dans un appartement n’est pas ici un simple concept visant à créer l’événement: l’occupation des lieux est totale et le moindre recoin a été scénographié de manière à sublimer la réalité quotidienne. On va et vient ainsi constamment entre le salon, le corridor, la salle à manger et les chambres. Les comédiens évoluent au milieu de nous, n’hésitant pas à nous prendre à témoin, nous faire participer et nous toucher, comme si nous étions bel et bien des amis invités à la fête. Tous les ingrédients d’une soirée d’anniversaire sont d’ailleurs réunis (tour de magie, spectacle de marionnettes, karaoké, shooters), le tout entrecoupé d’abondantes citations et références poétiques, cinématographiques et musicales et de quelques répliques en italien.
Julie Vincent a écrit La Mondiola à partir d’improvisations, et cela se sent, car le texte souffre d’un manque de structure et d’unité, et les scènes sont de qualité variable. Pour apprécier le spectacle, mieux vaut l’accepter comme l’aventure humaine qu’il constitue, et s’ouvrir à la promiscuité physique et émotionnelle qu’il implique, puisque nous sommes plongés directement dans les échanges, les emportements et les débordements. Les interprètes donnent le meilleur d’eux-mêmes et on ne peut rester insensible à leur engagement et à leur générosité.
La Mondiola
Texte et mise en scène: Julie Vincent. Dramaturgie: Paul Lefebvre. Musique: Michel Smith et Sandra Wong. Vidéos et photos: Rodolphe St-Arneault. Scénographie: Livia Magnani. Avec Liliane Boucher, Ximena Ferrer, Stéphanie B. Dumont, Omar Alexis Ramos et Sandra Wong. Une production de Singulier Pluriel. Dans un appartement de la rue Fullum, à Montréal, jusqu’au 7 juin 2018.