Des forces telluriques s’affrontent dans le dernier chef d’œuvre de Mozart, La flûte enchantée. Les enjeux de cette lutte portent sur l’amour et l’amitié, mais aussi sur la victoire de la lumière, avec son cortège de puissance, de beauté et de sagesse, sur les forces de la nuit comme le mensonge, la superstition, l’ignorance. Emporté dans la tourmente de ce combat, le prince Tamino entreprend de libérer la fille de la Reine de la Nuit, la jeune Parmina enlevée par Sarastro, grand prête du temple du soleil. Le prince est accompagné par l’oiseleur Papageno, jouisseur inconditionnel. Les deux s’engagent dans un rituel initiatique qui les arrachera à l’obscurité pour les emporter dans la lumière, sous la protection d’Isis et Osiris.
Cet opéra de Mozart, créé en 1791, propose un univers merveilleux sur fond de mythologie égyptienne. À travers les méandres du surnaturel et des affabulations, les hommes doivent surmonter leurs démons: peur, corps torturé par l’amour physique, désespoir, désir de suicide, toutes tensions négatives vaincues par la détermination, la persévérance, l’extase de l’amour. C’est la condition pour de devenir humain. Bref, les valeurs chrétiennes augmentées de la philosophie des Lumières que l’on retrouve dans la franc-maçonnerie dont Mozart était adepte.
Lepage et ses acolytes proposent une ode à la légèreté, une plongée en apnée au pays des merveilles. En lever de rideau, le plateau vide, délimité par un fond lumineux serti d’étoiles, situe l’opéra dans un espace neutre qui servira de matrice aux tableaux que le metteur en scène déploie à partir du vide. C’est que celui-ci travaille ici selon la technique du black art, manipulation d’accessoiristes invisibles dans le noir. Tout repose sur la minutie: éclairage d’une précision chirurgicale, petite magie jouant sur l’invisible, scènes de foule finement chorégraphiées, effets visuels séduisants comme cette boîte aux miroirs où les protagonistes deviennent multitude…
Tout bouge, apparaît et disparaît, s’agglutine et se disloque, puis s’évanouit dans le vide. Tout est suspendu à la musique, en surgit et s’y engouffre. D’où la prégnance des tableaux et des arias. On retiendra longtemps le célèbre air Der Hölle Rache kocht in meinem Herzen, où la Reine de la nuit, envoûtante Audrey Luna, qui a subjugué la salle, conjure sa fille d’assassiner Sarastro, son ennemi juré. La magie opère dans chaque tableau. Ce monde merveilleux fonctionne par séduction et enchaînements improbables. Le personnage de Papageno est ici fondamental et remarquablement soutenu par un Gordon Brintner dans une grande forme. Il est le héros populaire de cette aventure. De même, la puissante voix de basse de John Relyea propose un immense Sarastro en grand prêtre.
Malgré la tourmente dans laquelle il est plongé, Robert Lepage signe ici une mise en scène qui, à travers des instantanés fabuleux, souligne l’extraordinaire beauté de la musique de Mozart. L’ovation de dix minutes (!) que lui a réservée le public de la première a sûrement agi comme un baume. Au-delà de l’appréciation immédiate de cette exceptionnelle mise en scène, le public affirmait son inconditionnel soutien à l’artiste et au directeur de la compagnie Ex Machina.
Musique: Wolfgang Amadeus Mozart. Livret: Emanuel Schikaneder. Direction du Chœur de l’Opéra de Québec et de l’Orchestre symphonique de Québec: Thomas Rösner. Mise en scène: Robert Lepage. Scénographie: Jamie Harrison. Costumes: Kym Barrett. Éclairages: Simon Wilkinson. Direction de création: Steve Blanchet. Avec John Relyea (Sarastro), Audrey Luna (la Reine de la nuit), Simone Osborne (Pamina), Frédéric Antoun (Tamino), Gordon Bintner (Papageno) et Pascale Beaudin (Papagena). Une production d’Ex Machina. À la Salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec, à l’occasion du Festival d’opéra de Québec, jusqu’au 6 août 2018.
Des forces telluriques s’affrontent dans le dernier chef d’œuvre de Mozart, La flûte enchantée. Les enjeux de cette lutte portent sur l’amour et l’amitié, mais aussi sur la victoire de la lumière, avec son cortège de puissance, de beauté et de sagesse, sur les forces de la nuit comme le mensonge, la superstition, l’ignorance. Emporté dans la tourmente de ce combat, le prince Tamino entreprend de libérer la fille de la Reine de la Nuit, la jeune Parmina enlevée par Sarastro, grand prête du temple du soleil. Le prince est accompagné par l’oiseleur Papageno, jouisseur inconditionnel. Les deux s’engagent dans un rituel initiatique qui les arrachera à l’obscurité pour les emporter dans la lumière, sous la protection d’Isis et Osiris.
Cet opéra de Mozart, créé en 1791, propose un univers merveilleux sur fond de mythologie égyptienne. À travers les méandres du surnaturel et des affabulations, les hommes doivent surmonter leurs démons: peur, corps torturé par l’amour physique, désespoir, désir de suicide, toutes tensions négatives vaincues par la détermination, la persévérance, l’extase de l’amour. C’est la condition pour de devenir humain. Bref, les valeurs chrétiennes augmentées de la philosophie des Lumières que l’on retrouve dans la franc-maçonnerie dont Mozart était adepte.
Lepage et ses acolytes proposent une ode à la légèreté, une plongée en apnée au pays des merveilles. En lever de rideau, le plateau vide, délimité par un fond lumineux serti d’étoiles, situe l’opéra dans un espace neutre qui servira de matrice aux tableaux que le metteur en scène déploie à partir du vide. C’est que celui-ci travaille ici selon la technique du black art, manipulation d’accessoiristes invisibles dans le noir. Tout repose sur la minutie: éclairage d’une précision chirurgicale, petite magie jouant sur l’invisible, scènes de foule finement chorégraphiées, effets visuels séduisants comme cette boîte aux miroirs où les protagonistes deviennent multitude…
Tout bouge, apparaît et disparaît, s’agglutine et se disloque, puis s’évanouit dans le vide. Tout est suspendu à la musique, en surgit et s’y engouffre. D’où la prégnance des tableaux et des arias. On retiendra longtemps le célèbre air Der Hölle Rache kocht in meinem Herzen, où la Reine de la nuit, envoûtante Audrey Luna, qui a subjugué la salle, conjure sa fille d’assassiner Sarastro, son ennemi juré. La magie opère dans chaque tableau. Ce monde merveilleux fonctionne par séduction et enchaînements improbables. Le personnage de Papageno est ici fondamental et remarquablement soutenu par un Gordon Brintner dans une grande forme. Il est le héros populaire de cette aventure. De même, la puissante voix de basse de John Relyea propose un immense Sarastro en grand prêtre.
Malgré la tourmente dans laquelle il est plongé, Robert Lepage signe ici une mise en scène qui, à travers des instantanés fabuleux, souligne l’extraordinaire beauté de la musique de Mozart. L’ovation de dix minutes (!) que lui a réservée le public de la première a sûrement agi comme un baume. Au-delà de l’appréciation immédiate de cette exceptionnelle mise en scène, le public affirmait son inconditionnel soutien à l’artiste et au directeur de la compagnie Ex Machina.
La flûte enchantée
Musique: Wolfgang Amadeus Mozart. Livret: Emanuel Schikaneder. Direction du Chœur de l’Opéra de Québec et de l’Orchestre symphonique de Québec: Thomas Rösner. Mise en scène: Robert Lepage. Scénographie: Jamie Harrison. Costumes: Kym Barrett. Éclairages: Simon Wilkinson. Direction de création: Steve Blanchet. Avec John Relyea (Sarastro), Audrey Luna (la Reine de la nuit), Simone Osborne (Pamina), Frédéric Antoun (Tamino), Gordon Bintner (Papageno) et Pascale Beaudin (Papagena). Une production d’Ex Machina. À la Salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec, à l’occasion du Festival d’opéra de Québec, jusqu’au 6 août 2018.