Alors qu’elle semblait avoir été oubliée, voire occultée, par notre société, voici que, 20 ans après sa mort, la chanteuse Pauline Julien (1928-1998), véritable étendard de l’émancipation des femmes et de l’indépendance du Québec, revient momentanément sur le devant de la scène. Un spectacle-hommage par des interprètes d’ici, un documentaire dont on dit le plus grand bien, et des œuvres théâtrales prennent ou prendront l’affiche en 2018. Dont celle-ci, au titre évocateur, tiré d’un poème de Gérald Godin, l’amoureux compagnon des beaux jours et de l’infortune.
Le projet de ce spectacle a été porté depuis plusieurs années par la comédienne Catherine Allard, qui entre ici dans les souliers de l’artiste fougueuse, mais joue aussi son propre rôle, tout comme Gabriel Robichaud, son partenaire de scène, qui incarne celui qu’on appellera le député-poète, tout en se permettant quelques décrochages. C’est ainsi que l’auteure, Marie-Christine Lê-Huu, tisse une habile trame où alternent et dialoguent le passé et le présent, l’ambition première étant de faire vivre la force d’une émotion partagée à travers le temps.
Pauline Julien, comédienne, puis chanteuse, que Godin, journaliste au Nouvelliste de Trois-Rivières, dans son premier texte sur elle, en 1961, qualifia d’« oiseau avec une crinière », se révèle un personnage d’une belle complexité. Déterminée et fonceuse, surnommée « la pasionaria », défendant ses causes sur toutes les tribunes, en français et en anglais, colérique, elle était aussi rongée par le doute et, derrière l’image publique, d’une fragilité lui faisant frôler la dépression. Celle qui l’interprète sur scène rend bien ces facettes contrastées.
À l’évidence, on ne peut évoquer ce couple emblématique sans revisiter l’histoire politique et culturelle du Québec des années 60 à l’an 2000. La passion de ces deux-là, l’un envers l’autre, comme pour leur pays en devenir, leurs combats, leur emprisonnement durant la crise d’octobre 1970, l’élection du poète, battant dans son propre comté le premier ministre libéral Robert Bourassa, l’espoir déçu deux fois plutôt qu’une lors des référendums pour la souveraineté du Québec, puis la maladie qui les touchera tous les deux sont relatés à travers divers dispositifs.
Catherine Allard, comédienne plus que chanteuse, interprète avec foi et investissement quelques-unes des plus belles chansons de la Julien, du Réjean Ducharme, du Bertolt Brecht, du Gilles Vigneault, du Gilbert Langevin, soutenue par le pianiste Gaël Lane-Lépine et un contrebassiste, Gabriel Lapointe ou Cédric Dind-Lavoie en alternance. Plus discret, à l’image de son personnage, Gabriel Robichaud a aussi quelques beaux moments, lisant les poèmes ou les lettres de Godin. La projection d’images, photos et vidéos, rappelle des épisodes marquants, comme la Nuit de la poésie où le poète lut son brûlot Énumération.
Si on peut être dérouté lorsque, par exemple, Robichaud arrête la représentation pour exprimer ses doutes sur la pertinence des combats d’une époque révolue, on ne peut qu’adhérer à la force de conviction exprimée par sa partenaire, conforme à celle du modèle qui l’a inspirée. Si la fin de ces deux vies paraît prenante et tragique, mise en parallèle de l’échec de leur lutte politique, le spectacle intelligemment mis en scène par Benoît Vermeulen, nous rappelle qu’en politique, il n’y a jamais rien de définitif.
Texte : Marie-Christine Lê-Huu. Mise en scène : Benoît Vermeulen. Assistance à la mise en scène et régie : Ariane Lamarre. Conception décor, accessoires et costumes : Nathalie Trépanier. Conception costumes : Estelle Charron. Conception maquillage : Angelo Barsetti. Conception éclairages : Étienne Boucher. Conception sonore : Gaël Lane-Lépine. Conception vidéo : Julien Blais. Coaching vocal : Marie-Claire Séguin. Consultation aux mouvements : Myriam Allard. Avec Catherine Allard, Gabriel Robichaud, Gaël Lane-Lépine et Gabriel Lapointe ou Cédric Dind-Lavoie. Une production du Collectif de la Renarde et du Théâtre Les gens d’en bas, présentée à la Salle Fred-Barry jusqu’au 29 septembre 2018, puis en tournée au Québec et au Nouveau-Brunswick en 2018 et en 2019.
Alors qu’elle semblait avoir été oubliée, voire occultée, par notre société, voici que, 20 ans après sa mort, la chanteuse Pauline Julien (1928-1998), véritable étendard de l’émancipation des femmes et de l’indépendance du Québec, revient momentanément sur le devant de la scène. Un spectacle-hommage par des interprètes d’ici, un documentaire dont on dit le plus grand bien, et des œuvres théâtrales prennent ou prendront l’affiche en 2018. Dont celle-ci, au titre évocateur, tiré d’un poème de Gérald Godin, l’amoureux compagnon des beaux jours et de l’infortune.
Le projet de ce spectacle a été porté depuis plusieurs années par la comédienne Catherine Allard, qui entre ici dans les souliers de l’artiste fougueuse, mais joue aussi son propre rôle, tout comme Gabriel Robichaud, son partenaire de scène, qui incarne celui qu’on appellera le député-poète, tout en se permettant quelques décrochages. C’est ainsi que l’auteure, Marie-Christine Lê-Huu, tisse une habile trame où alternent et dialoguent le passé et le présent, l’ambition première étant de faire vivre la force d’une émotion partagée à travers le temps.
Pauline Julien, comédienne, puis chanteuse, que Godin, journaliste au Nouvelliste de Trois-Rivières, dans son premier texte sur elle, en 1961, qualifia d’« oiseau avec une crinière », se révèle un personnage d’une belle complexité. Déterminée et fonceuse, surnommée « la pasionaria », défendant ses causes sur toutes les tribunes, en français et en anglais, colérique, elle était aussi rongée par le doute et, derrière l’image publique, d’une fragilité lui faisant frôler la dépression. Celle qui l’interprète sur scène rend bien ces facettes contrastées.
À l’évidence, on ne peut évoquer ce couple emblématique sans revisiter l’histoire politique et culturelle du Québec des années 60 à l’an 2000. La passion de ces deux-là, l’un envers l’autre, comme pour leur pays en devenir, leurs combats, leur emprisonnement durant la crise d’octobre 1970, l’élection du poète, battant dans son propre comté le premier ministre libéral Robert Bourassa, l’espoir déçu deux fois plutôt qu’une lors des référendums pour la souveraineté du Québec, puis la maladie qui les touchera tous les deux sont relatés à travers divers dispositifs.
Catherine Allard, comédienne plus que chanteuse, interprète avec foi et investissement quelques-unes des plus belles chansons de la Julien, du Réjean Ducharme, du Bertolt Brecht, du Gilles Vigneault, du Gilbert Langevin, soutenue par le pianiste Gaël Lane-Lépine et un contrebassiste, Gabriel Lapointe ou Cédric Dind-Lavoie en alternance. Plus discret, à l’image de son personnage, Gabriel Robichaud a aussi quelques beaux moments, lisant les poèmes ou les lettres de Godin. La projection d’images, photos et vidéos, rappelle des épisodes marquants, comme la Nuit de la poésie où le poète lut son brûlot Énumération.
Si on peut être dérouté lorsque, par exemple, Robichaud arrête la représentation pour exprimer ses doutes sur la pertinence des combats d’une époque révolue, on ne peut qu’adhérer à la force de conviction exprimée par sa partenaire, conforme à celle du modèle qui l’a inspirée. Si la fin de ces deux vies paraît prenante et tragique, mise en parallèle de l’échec de leur lutte politique, le spectacle intelligemment mis en scène par Benoît Vermeulen, nous rappelle qu’en politique, il n’y a jamais rien de définitif.
Je cherche une maison qui vous ressemble
Texte : Marie-Christine Lê-Huu. Mise en scène : Benoît Vermeulen. Assistance à la mise en scène et régie : Ariane Lamarre. Conception décor, accessoires et costumes : Nathalie Trépanier. Conception costumes : Estelle Charron. Conception maquillage : Angelo Barsetti. Conception éclairages : Étienne Boucher. Conception sonore : Gaël Lane-Lépine. Conception vidéo : Julien Blais. Coaching vocal : Marie-Claire Séguin. Consultation aux mouvements : Myriam Allard. Avec Catherine Allard, Gabriel Robichaud, Gaël Lane-Lépine et Gabriel Lapointe ou Cédric Dind-Lavoie. Une production du Collectif de la Renarde et du Théâtre Les gens d’en bas, présentée à la Salle Fred-Barry jusqu’au 29 septembre 2018, puis en tournée au Québec et au Nouveau-Brunswick en 2018 et en 2019.