Comme la musique, la bonne chère adoucit les mœurs, c’est bien connu. Le jeune public de la Maison Théâtre en a, ces jours-ci, la réjouissante démonstration avec la rencontre, autour de la table d’un restaurant, de trois diplomates qui ne parlent pas la même langue et qui doivent pourtant s’entendre sur un projet d’aqueduc traversant leurs pays respectifs. Quoi de mieux que de beaux plats pour inspirer la communauté d’esprit et faire tomber toutes les résistances ?
C’est le pari des chefs de ce festin visuel servi par L’Arrière Scène, Simon Boulerice, Sylvie Laliberté et Serge Marois, dont l’âme enfantine sait mitonner de savoureux spectacles. Celui-ci a la légèreté d’une partition sans paroles, d’un théâtre d’objets avant tout ludique, coloré et musical, où les bambins (de 4 à 8 ans) en ont plein les yeux et les oreilles, et suivent avec curiosité les efforts fantaisistes de ces adultes jouant comme des enfants à créer une loufoque installation hydraulique.
Joyeux commensaux
Au début, les personnages se présentent, très sérieux, avec leur mallette et leur air important. Une fois « avalé » l’étonnement de ne pas partager la même langue, ils déploient leurs plans et tentent de s’expliquer en gesticulant. Iouri, qui s’exprime en russe, voudrait faire passer l’eau par voie souterraine, Vanessa propose plutôt, en anglais, la voie terrestre, tandis que l’hispanophone Amelia prône la voie aérienne. Aucune de ces idées ne fonctionnant, il leur faut revoir leurs positions, partager leurs idées et laisser libre cours à leur créativité en travaillant ensemble à un nouveau projet, dont la maquette s’élabore sur la table, comme un jeu de construction, avec des pièces s’imbriquant les unes dans les autres, auxquelles s’ajoutent des ingrédients du repas, tels les spaghettis utilisés comme haubans. Au fur et à mesure que les plats sortent de la cuisine, sur des tapis roulants, la construction prend la forme d’une petite cité fantaisiste, tout illuminée, qui ouvre la porte à l’imaginaire. Les jeux de pouvoir de nos diplomates, joyeux commensaux, se sont mués en jeu tout court, mais, en s’amusant et en « s’écoutant », les personnages sont arrivés à un résultat qui satisfait tout le monde : n’est-ce pas là un bel éloge de la communication respectueuse et du travail d’équipe ?
Évidemment, la mise en scène de Serge Marois met le jeu à l’avant-plan. Comme dans un film muet, les interprètes, avec force lazzi, suivent la musique jazzée de Pierre Labbé, expressive à souhait. Premier à entrer en scène, Sasha Samar laisse aussitôt deviner le cœur juvénile de son Iouri, avec ses chaussettes vert pomme sous un habit sombre et son échange de fourchettes, après s’être gratté le dos avec la sienne, avant l’arrivée de ses homologues féminines. Celles-ci, campées par Sharon James et Sarah Desjeunes, sont comiquement fagotées dans des tailleurs bouffants qui leur donnent une silhouette de poupées.
Si on aurait souhaité un rythme un peu plus soutenu par moments, la fin jubilatoire enchante. Alors que les convives se félicitent de la réussite de leur projet, le dernier plat vient les surprendre : un plateau de fruits d’où monte une musique en sourdine. Chacun·e sépare son fruit et alors la musique retentit. La mélodie entraînante de la pièce Tequila les amène d’abord à se trémousser timidement, puis à danser franchement et à se délester de leurs habits protocolaires, dévoilant des tenues colorées et décontractées, robe d’été, bermudas et jupe en tulle rose. Ainsi, sous la neutralité obligée de leur fonction, leur vraie personnalité se révèle, à la faveur de l’amitié nouvelle qui les unit. On se prend à rêver que certaines rencontres au sommet se passent exactement comme cela !
Idéation : Simon Boulerice, Sylvie Laliberté et Serge Marois. Mise en scène : Serge Marois. Scénographie : Clélia Brissaud. Musique originale : Pierre Labbé. Éclairages : Thomas Godefroid. Costumes : Marilyne Roy. Interprétation : Sarah Desjeunes, Sharon James et Sasha Samar. Une production de L’Arrière Scène, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 22 mars 2020.
Comme la musique, la bonne chère adoucit les mœurs, c’est bien connu. Le jeune public de la Maison Théâtre en a, ces jours-ci, la réjouissante démonstration avec la rencontre, autour de la table d’un restaurant, de trois diplomates qui ne parlent pas la même langue et qui doivent pourtant s’entendre sur un projet d’aqueduc traversant leurs pays respectifs. Quoi de mieux que de beaux plats pour inspirer la communauté d’esprit et faire tomber toutes les résistances ?
C’est le pari des chefs de ce festin visuel servi par L’Arrière Scène, Simon Boulerice, Sylvie Laliberté et Serge Marois, dont l’âme enfantine sait mitonner de savoureux spectacles. Celui-ci a la légèreté d’une partition sans paroles, d’un théâtre d’objets avant tout ludique, coloré et musical, où les bambins (de 4 à 8 ans) en ont plein les yeux et les oreilles, et suivent avec curiosité les efforts fantaisistes de ces adultes jouant comme des enfants à créer une loufoque installation hydraulique.
Joyeux commensaux
Au début, les personnages se présentent, très sérieux, avec leur mallette et leur air important. Une fois « avalé » l’étonnement de ne pas partager la même langue, ils déploient leurs plans et tentent de s’expliquer en gesticulant. Iouri, qui s’exprime en russe, voudrait faire passer l’eau par voie souterraine, Vanessa propose plutôt, en anglais, la voie terrestre, tandis que l’hispanophone Amelia prône la voie aérienne. Aucune de ces idées ne fonctionnant, il leur faut revoir leurs positions, partager leurs idées et laisser libre cours à leur créativité en travaillant ensemble à un nouveau projet, dont la maquette s’élabore sur la table, comme un jeu de construction, avec des pièces s’imbriquant les unes dans les autres, auxquelles s’ajoutent des ingrédients du repas, tels les spaghettis utilisés comme haubans. Au fur et à mesure que les plats sortent de la cuisine, sur des tapis roulants, la construction prend la forme d’une petite cité fantaisiste, tout illuminée, qui ouvre la porte à l’imaginaire. Les jeux de pouvoir de nos diplomates, joyeux commensaux, se sont mués en jeu tout court, mais, en s’amusant et en « s’écoutant », les personnages sont arrivés à un résultat qui satisfait tout le monde : n’est-ce pas là un bel éloge de la communication respectueuse et du travail d’équipe ?
Évidemment, la mise en scène de Serge Marois met le jeu à l’avant-plan. Comme dans un film muet, les interprètes, avec force lazzi, suivent la musique jazzée de Pierre Labbé, expressive à souhait. Premier à entrer en scène, Sasha Samar laisse aussitôt deviner le cœur juvénile de son Iouri, avec ses chaussettes vert pomme sous un habit sombre et son échange de fourchettes, après s’être gratté le dos avec la sienne, avant l’arrivée de ses homologues féminines. Celles-ci, campées par Sharon James et Sarah Desjeunes, sont comiquement fagotées dans des tailleurs bouffants qui leur donnent une silhouette de poupées.
Si on aurait souhaité un rythme un peu plus soutenu par moments, la fin jubilatoire enchante. Alors que les convives se félicitent de la réussite de leur projet, le dernier plat vient les surprendre : un plateau de fruits d’où monte une musique en sourdine. Chacun·e sépare son fruit et alors la musique retentit. La mélodie entraînante de la pièce Tequila les amène d’abord à se trémousser timidement, puis à danser franchement et à se délester de leurs habits protocolaires, dévoilant des tenues colorées et décontractées, robe d’été, bermudas et jupe en tulle rose. Ainsi, sous la neutralité obligée de leur fonction, leur vraie personnalité se révèle, à la faveur de l’amitié nouvelle qui les unit. On se prend à rêver que certaines rencontres au sommet se passent exactement comme cela !
À Table!
Idéation : Simon Boulerice, Sylvie Laliberté et Serge Marois. Mise en scène : Serge Marois. Scénographie : Clélia Brissaud. Musique originale : Pierre Labbé. Éclairages : Thomas Godefroid. Costumes : Marilyne Roy. Interprétation : Sarah Desjeunes, Sharon James et Sasha Samar. Une production de L’Arrière Scène, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 22 mars 2020.