Maître du mashup, le musicien, imitateur, acteur, compositeur et concepteur de décors Rick Miller propose, avec Boom X, une incursion tentaculaire dans l’univers culturel et social de la génération X, dont il fait partie. Comme un mixtape multidisciplinaire, son solo performatif contient un peu de tout, sur tous les tons, mais parvient heureusement, grâce à un fil narratif qui passe du générationnel au personnel, à ne pas seulement rester en surface.
Il s’agit du deuxième volet d’une démarche en trois temps, dont chaque segment est un spectacle indépendant. Miller s’est intéressé aux baby boomers dans Boom et conçoit cette année Boom YZ, qui s’attardera à ceux et celles qui sont né·es après 1995. L’intérêt de Boom X, outre les multiples référents publicitaires, musicaux et culturels qui peuvent faire sourire ou émouvoir ceux et celles qui ont traversé les années 1970 et 1980, est le statut particulier du créateur qui devient à la fois sujet, témoin, observateur et critique de tout ce que cette période a porté. Après l’avoir présenté sur scène en anglais, le performeur le livre en français (avec certaines archives en anglais, surtitrées, et des bribes d’allemand) au Carrefour international de théâtre de Québec, dont il est un habitué.
Dès l’arrivée des spectateurs et des spectatrices dans la salle principale du théâtre Le Diamant, on titille leur fibre nostalgique en faisant résonner des succès souvenirs (Jackson Five et autres) dans les haut-parleurs. Rick Miller entre sur scène muni d’un micro-casque, salue la foule, pose sa prémisse, puis multipliera les tours de passe-passe et les apparitions en allant et venant entre une petite scène ronde, placée derrière un tulle qui sert d’écran, et l’avant-scène. Il enfile les perruques et les costumes à la vitesse d’un humoriste étoile, souvent en faisant en même temps les voix de tous les personnages : ceux et celles qu’il a interrogé·es – et qui s’avéreront tous et toutes avoir un lien très personnel avec lui – ainsi que toutes les personnalités publiques citées.
Faire du théâtre, c’est jouer
Que l’exercice, d’un point de vue purement spectaculaire, puisse susciter les oh ! et les ah !, nommer des évènements historiques à la chaîne en ponctuant le tout d’extraits de chansons et d’archives télévisuelles, ne suffirait pas à créer une expérience théâtrale substantielle. Oui, on peut éclater de rire devant sa simulation d’un vidéoclip grunge à l’aide d’une caméra, d’une perruque et d’une maquette en carton, et apprécier d’entendre des succès des Sex Pistols et de Jean Leloup, mais au final, c’est le côté gamin, complètement investi, de la performance de Rick Miller qui a du charme. Faire du théâtre, après tout, c’est jouer, et suivre cette idée de fabriquer quelque chose à partir de rien – ou plutôt, dans ce cas précis, à partir de milliers d’informations, d’images et de souvenirs cousus ensemble.
Si on connaît bien la grande majorité des évènements évoqués, quelques idées imagées du créateur né à Montréal et établi à Toronto permettent de regarder la génération X sous un nouvel angle. L’évolution de la carrière cinématographique de John Travolta est en parfaite cohésion avec les trois décennies qu’elle couvre. Le baseball serait une métaphore de l’échec et de ce constat que la vie, finalement, implique nécessairement de tourner un peu en rond.
Tout au long du spectacle, l’artiste entremêle les propos de quatre représentants de la génération X : Annika, qui a vécu en Allemagne de l’Est avant d’immigrer à Montréal, Steph, une comédienne qui a grandi dans une petite ville de l’Ontario où il y avait peu de diversité culturelle, Brandon, un dj mordu d’histoire musicale, né d’une mère africaine et d’un père blanc, et Howard, professeur d’architecture, amateur de sports et de spectacles d’arénas. Peu à peu, entre leurs témoignages, des fils s’attachent. L’anecdotique allège les passages plus lourds, où ils et elles évoquent le racisme, le sexisme et la répression qui a marqué, autant sinon plus que tout le reste, les années 1970 et 1980. Rick Miller, à certains moments clés, délaisse son enthousiasme intarissable, le fla-fla et les guitares pour poser des constats empreints de gravité et d’un brin de sagesse, jamais moralisatrice. Son naturel revient toutefois rapidement au galop, et il ne peut s’empêcher de nous offrir une finale où tout est bien qui finit bien.
Texte, mise en scène, interprétation, conception des décors, du son et composition : Rick Miller. Producteur délégué : Jeff Lord. Éclairages : Bruno Matte. Vidéo et projections : Nicolas Dostie et Irina Litvinenko. Costumes et accessoires : Virginie Leclerc. Assistance à la mise en scène, régie et dramaturgie : Craig Francis. Une production de Kidoons et de WYRD Productions, en association avec Theatre Calgary et The 20k Collective, présentée au Diamant, à l’occasion du Carrefour international de théâtre de Québec, jusqu’au 5 juin 2021.
Maître du mashup, le musicien, imitateur, acteur, compositeur et concepteur de décors Rick Miller propose, avec Boom X, une incursion tentaculaire dans l’univers culturel et social de la génération X, dont il fait partie. Comme un mixtape multidisciplinaire, son solo performatif contient un peu de tout, sur tous les tons, mais parvient heureusement, grâce à un fil narratif qui passe du générationnel au personnel, à ne pas seulement rester en surface.
Il s’agit du deuxième volet d’une démarche en trois temps, dont chaque segment est un spectacle indépendant. Miller s’est intéressé aux baby boomers dans Boom et conçoit cette année Boom YZ, qui s’attardera à ceux et celles qui sont né·es après 1995. L’intérêt de Boom X, outre les multiples référents publicitaires, musicaux et culturels qui peuvent faire sourire ou émouvoir ceux et celles qui ont traversé les années 1970 et 1980, est le statut particulier du créateur qui devient à la fois sujet, témoin, observateur et critique de tout ce que cette période a porté. Après l’avoir présenté sur scène en anglais, le performeur le livre en français (avec certaines archives en anglais, surtitrées, et des bribes d’allemand) au Carrefour international de théâtre de Québec, dont il est un habitué.
Dès l’arrivée des spectateurs et des spectatrices dans la salle principale du théâtre Le Diamant, on titille leur fibre nostalgique en faisant résonner des succès souvenirs (Jackson Five et autres) dans les haut-parleurs. Rick Miller entre sur scène muni d’un micro-casque, salue la foule, pose sa prémisse, puis multipliera les tours de passe-passe et les apparitions en allant et venant entre une petite scène ronde, placée derrière un tulle qui sert d’écran, et l’avant-scène. Il enfile les perruques et les costumes à la vitesse d’un humoriste étoile, souvent en faisant en même temps les voix de tous les personnages : ceux et celles qu’il a interrogé·es – et qui s’avéreront tous et toutes avoir un lien très personnel avec lui – ainsi que toutes les personnalités publiques citées.
Faire du théâtre, c’est jouer
Que l’exercice, d’un point de vue purement spectaculaire, puisse susciter les oh ! et les ah !, nommer des évènements historiques à la chaîne en ponctuant le tout d’extraits de chansons et d’archives télévisuelles, ne suffirait pas à créer une expérience théâtrale substantielle. Oui, on peut éclater de rire devant sa simulation d’un vidéoclip grunge à l’aide d’une caméra, d’une perruque et d’une maquette en carton, et apprécier d’entendre des succès des Sex Pistols et de Jean Leloup, mais au final, c’est le côté gamin, complètement investi, de la performance de Rick Miller qui a du charme. Faire du théâtre, après tout, c’est jouer, et suivre cette idée de fabriquer quelque chose à partir de rien – ou plutôt, dans ce cas précis, à partir de milliers d’informations, d’images et de souvenirs cousus ensemble.
Si on connaît bien la grande majorité des évènements évoqués, quelques idées imagées du créateur né à Montréal et établi à Toronto permettent de regarder la génération X sous un nouvel angle. L’évolution de la carrière cinématographique de John Travolta est en parfaite cohésion avec les trois décennies qu’elle couvre. Le baseball serait une métaphore de l’échec et de ce constat que la vie, finalement, implique nécessairement de tourner un peu en rond.
Tout au long du spectacle, l’artiste entremêle les propos de quatre représentants de la génération X : Annika, qui a vécu en Allemagne de l’Est avant d’immigrer à Montréal, Steph, une comédienne qui a grandi dans une petite ville de l’Ontario où il y avait peu de diversité culturelle, Brandon, un dj mordu d’histoire musicale, né d’une mère africaine et d’un père blanc, et Howard, professeur d’architecture, amateur de sports et de spectacles d’arénas. Peu à peu, entre leurs témoignages, des fils s’attachent. L’anecdotique allège les passages plus lourds, où ils et elles évoquent le racisme, le sexisme et la répression qui a marqué, autant sinon plus que tout le reste, les années 1970 et 1980. Rick Miller, à certains moments clés, délaisse son enthousiasme intarissable, le fla-fla et les guitares pour poser des constats empreints de gravité et d’un brin de sagesse, jamais moralisatrice. Son naturel revient toutefois rapidement au galop, et il ne peut s’empêcher de nous offrir une finale où tout est bien qui finit bien.
Boom X
Texte, mise en scène, interprétation, conception des décors, du son et composition : Rick Miller. Producteur délégué : Jeff Lord. Éclairages : Bruno Matte. Vidéo et projections : Nicolas Dostie et Irina Litvinenko. Costumes et accessoires : Virginie Leclerc. Assistance à la mise en scène, régie et dramaturgie : Craig Francis. Une production de Kidoons et de WYRD Productions, en association avec Theatre Calgary et The 20k Collective, présentée au Diamant, à l’occasion du Carrefour international de théâtre de Québec, jusqu’au 5 juin 2021.