La compagnie Les Incomplètes, fondée à Québec, ouvre la saison du Théâtre jeunesse Les Gros Becs avec une création en plein air : Berce-moi est un parcours déambulatoire multidisciplinaire qui prend place dans le boisé du Domaine de Maizerets en 14 stations comme autant de variations toutes en douceur autour du thème de la chaise berçante.
Une première mouture de ce projet avait été présentée au Parc naturel régional de Portneuf en septembre 2020. Certaines propositions ont été conservées, mais de nouvelles ont été créées en lien avec l’histoire des communautés qui ont vécu sur le territoire de la ville de Québec. Le parcours dure une heure, le public étant réparti en petits groupes d’une dizaine de personnes (les départs étant aux 15 minutes), qui suivent un·e guide « maître du temps », qui se fait très discret ou discrète et mène le groupe sans que l’on s’en rende vraiment compte. Les stations sont installées le long d’une boucle du sentier du boisé, parcours qui commence sur une section en bois sur pilotis, au milieu d’une végétation dense, puis se poursuit le long de la rivière : le groupe se trouve vite immergé dans un voyage végétal et musical multipliant les références aux berceuses. L’ensemble offre un bel équilibre entre le tableau vivant (conte, chanson, actions) et l’installation (photo, vidéo, sons), entre des moments d’adresse au public où on va lui raconter une histoire, lui chanter quelque chose, et des moments de simple contemplation, des immersions sonores discrètes, comme ces voix qui sortent de la végétation autour de la passerelle du début, évoquant toutes sortes d’usages et d’anecdotes autour des chaises berçantes.
Une déambulation poétique
Un empilement de chaises nous accueille : Maude Boutin-St Pierre est concentrée sur sa tâche, une pyramide se construisant sous nos yeux, jusqu’à la toute petite chaise de poupée. Un peu plus loin, Andrée Levesque Sioui chante des berceuses des Premières Nations en s’accompagnant de divers instruments de percussion, partageant sourires et cœurs dessinés avec les doigts, comme, plus tard, Jane Erharhdt entonnera des airs irlandais, s’accompagnant à la guitare; on apprécie grandement la douceur de ces mélodies. Se balançant dans une petite cabine encadrée de dentelles et de voilages, Madeleine (Anne-Marie Olivier), toute réjouie, nous raconte l’expérience insolite de découvrir, en pleine nuit dans son salon, une chaise qui basculait toute seule, alors qu’elle venait de rêver de sa mère décédée. Venant toucher la chaise, elle a eu la sensation de retrouver sa mère et parle de ce moment comme d’« un baiser soufflé de loin ».
Une boucle plus loin, Sophie Pommerleau semble s’offrir une pause sur sa chaise, alors que toutes sortes de linges et de voiles sont étendus sur des fils. Elle chante des airs français et s’endort doucement : « à Paris, il y a un petit grain d’or / un petit grain d’or et l’enfant s’endort, / jusqu’au bout du jour, dors mon bel amour ». « La Laine des moutons » est le titre de la station de Mathieu Fecteau qui, calme et concentré, file la laine sur un rouet, après l’avoir peignée et dégrossie. Deux moutons nous observent depuis leur enclos. Entre les arbres sont suspendus des écheveaux colorés, que le fileur sort progressivement de chaudières de teintures. Une sorte de symphonie textile s’écrit dans les airs ! De très grandes photos de chaises installées en divers lieux naturels (David Bross, Émilie Dumais et Dorian Rollin) ponctuent le parcours et contribuent à créer une poétique de la chaise berçante. Poétique sur laquelle brode l’installation vidéo de Josiane Roberge (deux lignes de personnes se berçant dans des chaises en plein air se croisent dans des montages superposés). Le parcours s’achève dans un village d’une vingtaine de maisons de toutes dimensions, avec des pattes en branches (ou peut-être celles-ci ont-elles poussé comme cela ?), d’où s’échappent des chants en plusieurs langues (une installation sonore de Meriol Lehmann). Chacune à son rythme, les maisonnettes laissent filtrer rires et notes.
Il n’y a rien d’explicatif ou de didactique dans cette proposition : c’est par petites touches que le propos se construit et que nous faisons notre tour, en nous laissant bercer et charmer par tel ou tel aspect d’une station (cette création est proposée aux jeunes de 4 ans et plus). Le seul bémol serait la proximité avec l’autoroute qui longe littéralement le parc et vient couvrir parfois les voix, mais cela est ponctuel. À la fin du parcours, on retrouve la grande prairie avec la sensation d’avoir fait un long voyage ou un long rêve, une nuit bercée par de doux airs, des contes, autant d’évocations qui nous replongent dans nos souvenirs d’enfance, bercé·es par une chaleur, des sonorités, des chansons familières et aimées !
Conception et mise en scène : Josiane Bernier, Audrey Marchand et Laurence Primeau Lafaille. Scénographie : Dominique Giguère. Costumes : Danielle Boutin. Vidéo : Josiane Roberge et Les Incomplètes. Son : Meriol Lehmann et Les Incomplètes. Photographies : David Bross, Émilie Dumais et Dorian Rollin. Photos : Emilie Dumais. Avec Mathieu Fecteau, Andrée Levesque Sioui, Anne-Marie Olivier et Sophie Pomerleau. Une production des Incomplètes présentée au Domaine de Maizerets dans le cadre de la programmation du Théâtre jeunesse Les Gros Becs jusqu’au 26 septembre 2021.
La compagnie Les Incomplètes, fondée à Québec, ouvre la saison du Théâtre jeunesse Les Gros Becs avec une création en plein air : Berce-moi est un parcours déambulatoire multidisciplinaire qui prend place dans le boisé du Domaine de Maizerets en 14 stations comme autant de variations toutes en douceur autour du thème de la chaise berçante.
Une première mouture de ce projet avait été présentée au Parc naturel régional de Portneuf en septembre 2020. Certaines propositions ont été conservées, mais de nouvelles ont été créées en lien avec l’histoire des communautés qui ont vécu sur le territoire de la ville de Québec. Le parcours dure une heure, le public étant réparti en petits groupes d’une dizaine de personnes (les départs étant aux 15 minutes), qui suivent un·e guide « maître du temps », qui se fait très discret ou discrète et mène le groupe sans que l’on s’en rende vraiment compte. Les stations sont installées le long d’une boucle du sentier du boisé, parcours qui commence sur une section en bois sur pilotis, au milieu d’une végétation dense, puis se poursuit le long de la rivière : le groupe se trouve vite immergé dans un voyage végétal et musical multipliant les références aux berceuses. L’ensemble offre un bel équilibre entre le tableau vivant (conte, chanson, actions) et l’installation (photo, vidéo, sons), entre des moments d’adresse au public où on va lui raconter une histoire, lui chanter quelque chose, et des moments de simple contemplation, des immersions sonores discrètes, comme ces voix qui sortent de la végétation autour de la passerelle du début, évoquant toutes sortes d’usages et d’anecdotes autour des chaises berçantes.
Une déambulation poétique
Un empilement de chaises nous accueille : Maude Boutin-St Pierre est concentrée sur sa tâche, une pyramide se construisant sous nos yeux, jusqu’à la toute petite chaise de poupée. Un peu plus loin, Andrée Levesque Sioui chante des berceuses des Premières Nations en s’accompagnant de divers instruments de percussion, partageant sourires et cœurs dessinés avec les doigts, comme, plus tard, Jane Erharhdt entonnera des airs irlandais, s’accompagnant à la guitare; on apprécie grandement la douceur de ces mélodies. Se balançant dans une petite cabine encadrée de dentelles et de voilages, Madeleine (Anne-Marie Olivier), toute réjouie, nous raconte l’expérience insolite de découvrir, en pleine nuit dans son salon, une chaise qui basculait toute seule, alors qu’elle venait de rêver de sa mère décédée. Venant toucher la chaise, elle a eu la sensation de retrouver sa mère et parle de ce moment comme d’« un baiser soufflé de loin ».
Une boucle plus loin, Sophie Pommerleau semble s’offrir une pause sur sa chaise, alors que toutes sortes de linges et de voiles sont étendus sur des fils. Elle chante des airs français et s’endort doucement : « à Paris, il y a un petit grain d’or / un petit grain d’or et l’enfant s’endort, / jusqu’au bout du jour, dors mon bel amour ». « La Laine des moutons » est le titre de la station de Mathieu Fecteau qui, calme et concentré, file la laine sur un rouet, après l’avoir peignée et dégrossie. Deux moutons nous observent depuis leur enclos. Entre les arbres sont suspendus des écheveaux colorés, que le fileur sort progressivement de chaudières de teintures. Une sorte de symphonie textile s’écrit dans les airs ! De très grandes photos de chaises installées en divers lieux naturels (David Bross, Émilie Dumais et Dorian Rollin) ponctuent le parcours et contribuent à créer une poétique de la chaise berçante. Poétique sur laquelle brode l’installation vidéo de Josiane Roberge (deux lignes de personnes se berçant dans des chaises en plein air se croisent dans des montages superposés). Le parcours s’achève dans un village d’une vingtaine de maisons de toutes dimensions, avec des pattes en branches (ou peut-être celles-ci ont-elles poussé comme cela ?), d’où s’échappent des chants en plusieurs langues (une installation sonore de Meriol Lehmann). Chacune à son rythme, les maisonnettes laissent filtrer rires et notes.
Il n’y a rien d’explicatif ou de didactique dans cette proposition : c’est par petites touches que le propos se construit et que nous faisons notre tour, en nous laissant bercer et charmer par tel ou tel aspect d’une station (cette création est proposée aux jeunes de 4 ans et plus). Le seul bémol serait la proximité avec l’autoroute qui longe littéralement le parc et vient couvrir parfois les voix, mais cela est ponctuel. À la fin du parcours, on retrouve la grande prairie avec la sensation d’avoir fait un long voyage ou un long rêve, une nuit bercée par de doux airs, des contes, autant d’évocations qui nous replongent dans nos souvenirs d’enfance, bercé·es par une chaleur, des sonorités, des chansons familières et aimées !
Berce-moi
Conception et mise en scène : Josiane Bernier, Audrey Marchand et Laurence Primeau Lafaille. Scénographie : Dominique Giguère. Costumes : Danielle Boutin. Vidéo : Josiane Roberge et Les Incomplètes. Son : Meriol Lehmann et Les Incomplètes. Photographies : David Bross, Émilie Dumais et Dorian Rollin. Photos : Emilie Dumais. Avec Mathieu Fecteau, Andrée Levesque Sioui, Anne-Marie Olivier et Sophie Pomerleau. Une production des Incomplètes présentée au Domaine de Maizerets dans le cadre de la programmation du Théâtre jeunesse Les Gros Becs jusqu’au 26 septembre 2021.