La plus récente pièce de Dave Jenniss, Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, a fait beaucoup de chemin depuis sa première version présentée au Festival du Jamais Lu en 2019. Le superflu est disparu, l’arc dramatique, resserré considérablement, et les personnages, encore mieux définis. Le dramaturge d’origine wolastoqey et québécoise a écrit et mis en scène une histoire contemporaine fort pertinente.
Inspiré par le décès de son propre père, Dave Jenniss articule le récit autour d’une guerre des clans entre les Kaktanish et les Tienis. Le fils aîné des premiers, François (Charles Bender), essaie de développer un port méthanier pour assurer la croissance économique de sa communauté, projet auquel s’oppose le fils des seconds, Sébastien (Nicolas Desfossés), qui dit vouloir préserver l’environnement avant toute chose.
Pour sa part, le cadet Kaktanish et alter ego du dramaturge, Martin (Nicolas Gendron), revient au pays après trois années de fuite. Son incapacité à faire face à la disparition de son père (Roger Wylde) lui a toutefois permis de donner un sens à sa vie en reconnectant avec ses racines et sa langue ancestrale. Au retour, il doit assumer le fait que son amoureuse Sophie (Marilyn Provost) vit désormais avec son ennemi juré, Sébastien Tienis.
Sans renouveler le genre des drames familiaux aux accents shakespeariens de Roméo et Juliette et du Roi Lear, Dave Jenniss fait valser habilement le récit entre le présent et le passé, le réel et l’onirique. L’auteur s’intéresse à la filiation et à la fratrie, au pardon et à la réconciliation et, surtout, aux zones grises existant dans les agissements et les croyances des un·es et des autres. Rien ni personne n’est tout à fait transparent dans cette histoire.
Territoire
L’un des mots qui reviennent le plus souvent dans le texte, « territoire », s’érige presque en porte-à-faux avec la représentation, et ce, malgré l’excellente musique en direct, une scénographie aux lignes brisées et des images vidéo évocatrices. La dimension de la Petite Licorne nous empêche, en fait, de saisir l’immensité suggérée et de voir ce que les personnages appellent de toutes leurs forces.
Le trio principal d’interprètes, formé de Charles Bender, Nicolas Gendron et Nicolas Desfossés porte très bien la parole de l’auteur. Malheureusement, l’inexpérience théâtrale de leurs deux autres collègues détonne quelque peu dans ce décor coincé qui ne pardonne pas.
N’empêche que le beau texte et la mise en scène alerte de Dave Jenniss donnent une profondeur et une réelle importance au propos de la pièce. La Cendre de ses os évoque le contexte qui est le nôtre en soulignant que la réconciliation est toujours possible entre des positions divergentes, que la survie est assurée malgré le fait qu’on ait perdu la langue des ancêtres ou que la pureté de sang soit contestée, que la fierté est bien moins une affaire de nation ou de clans opposés que de respect, de partage et de sentiments éprouvés envers les proches.
Au-delà de tout ça, il n’y a que poudre aux yeux et petite politique. L’une et l’autre n’intéressent guère Dave Jenniss. Ce ne sont que des mots et des actions que le dramaturge et metteur en scène dénonce avec élégance. Sa parole empreinte de bienveillance et de sagesse fait du bien à entendre.
Texte et mise en scène : Dave Jenniss. Traduction et conseil en langue Wolastoqiyik : Allan Tremblay. Assistance à la mise en scène : Édith Paquet. Décor : Julie-Christina Picher. Costumes : Rose Belhumeur. Éclairages : Renaud Pettigrew. Direction musicale et musique sur scène : Kyra Shaughnessy. Musique et chant (bande sonore) : Caleb Johnson. Conception vidéo : Gaspard Philippe. Collaboration à la conception vidéo : Terry Randy Awashish. Avec Charles Bender, Nicolas Desfossés, Nicolas Gendron, Marilyn Provost et Roger Wylde. Une production des Productions Ondinnok en codiffusion avec La Manufacture, présentée au Théâtre La Licorne jusqu’au 12 novembre 2021.
La plus récente pièce de Dave Jenniss, Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os, a fait beaucoup de chemin depuis sa première version présentée au Festival du Jamais Lu en 2019. Le superflu est disparu, l’arc dramatique, resserré considérablement, et les personnages, encore mieux définis. Le dramaturge d’origine wolastoqey et québécoise a écrit et mis en scène une histoire contemporaine fort pertinente.
Inspiré par le décès de son propre père, Dave Jenniss articule le récit autour d’une guerre des clans entre les Kaktanish et les Tienis. Le fils aîné des premiers, François (Charles Bender), essaie de développer un port méthanier pour assurer la croissance économique de sa communauté, projet auquel s’oppose le fils des seconds, Sébastien (Nicolas Desfossés), qui dit vouloir préserver l’environnement avant toute chose.
Pour sa part, le cadet Kaktanish et alter ego du dramaturge, Martin (Nicolas Gendron), revient au pays après trois années de fuite. Son incapacité à faire face à la disparition de son père (Roger Wylde) lui a toutefois permis de donner un sens à sa vie en reconnectant avec ses racines et sa langue ancestrale. Au retour, il doit assumer le fait que son amoureuse Sophie (Marilyn Provost) vit désormais avec son ennemi juré, Sébastien Tienis.
Sans renouveler le genre des drames familiaux aux accents shakespeariens de Roméo et Juliette et du Roi Lear, Dave Jenniss fait valser habilement le récit entre le présent et le passé, le réel et l’onirique. L’auteur s’intéresse à la filiation et à la fratrie, au pardon et à la réconciliation et, surtout, aux zones grises existant dans les agissements et les croyances des un·es et des autres. Rien ni personne n’est tout à fait transparent dans cette histoire.
Territoire
L’un des mots qui reviennent le plus souvent dans le texte, « territoire », s’érige presque en porte-à-faux avec la représentation, et ce, malgré l’excellente musique en direct, une scénographie aux lignes brisées et des images vidéo évocatrices. La dimension de la Petite Licorne nous empêche, en fait, de saisir l’immensité suggérée et de voir ce que les personnages appellent de toutes leurs forces.
Le trio principal d’interprètes, formé de Charles Bender, Nicolas Gendron et Nicolas Desfossés porte très bien la parole de l’auteur. Malheureusement, l’inexpérience théâtrale de leurs deux autres collègues détonne quelque peu dans ce décor coincé qui ne pardonne pas.
N’empêche que le beau texte et la mise en scène alerte de Dave Jenniss donnent une profondeur et une réelle importance au propos de la pièce. La Cendre de ses os évoque le contexte qui est le nôtre en soulignant que la réconciliation est toujours possible entre des positions divergentes, que la survie est assurée malgré le fait qu’on ait perdu la langue des ancêtres ou que la pureté de sang soit contestée, que la fierté est bien moins une affaire de nation ou de clans opposés que de respect, de partage et de sentiments éprouvés envers les proches.
Au-delà de tout ça, il n’y a que poudre aux yeux et petite politique. L’une et l’autre n’intéressent guère Dave Jenniss. Ce ne sont que des mots et des actions que le dramaturge et metteur en scène dénonce avec élégance. Sa parole empreinte de bienveillance et de sagesse fait du bien à entendre.
Nmihtaqs Sqotewamqol / La Cendre de ses os
Texte et mise en scène : Dave Jenniss. Traduction et conseil en langue Wolastoqiyik : Allan Tremblay. Assistance à la mise en scène : Édith Paquet. Décor : Julie-Christina Picher. Costumes : Rose Belhumeur. Éclairages : Renaud Pettigrew. Direction musicale et musique sur scène : Kyra Shaughnessy. Musique et chant (bande sonore) : Caleb Johnson. Conception vidéo : Gaspard Philippe. Collaboration à la conception vidéo : Terry Randy Awashish. Avec Charles Bender, Nicolas Desfossés, Nicolas Gendron, Marilyn Provost et Roger Wylde. Une production des Productions Ondinnok en codiffusion avec La Manufacture, présentée au Théâtre La Licorne jusqu’au 12 novembre 2021.