Robert Lepage n’a pas fini de déployer ses dons de magicien et de catalyseur de moments qui font l’histoire. Dès les premiers instants de la représentation d’Hamlet (première ébauche) sous le chapiteau du Festival des Arts de Saint-Sauveur, le public en a eu une nouvelle preuve.
À la trame musicale signée John Gzowski, est venu s’entremêler le puissant grondement de tonnerre d’un dramatique orage voleur de spectacle. La nature s’était invitée comme bande sonore informelle pour envelopper parfaitement ce rassemblement estival autour de Shakespeare.
Façon de dire que cette nouvelle création d’Ex Machina, révélée en cours de création, bénéficiait d’une sorte de protection céleste ! C’est donc accompagnés de l’hypnotique rythme percussif de gouttes tambourinant sur le chapiteau que se sont exécutés Guillaume Côté (dans le rôle-titre) et les agiles interprètes.
Deux heures de pur enchantement, offert dans un espace temporel où l’émotion, le rituel, le métaphorique s’emparent de l’espace en offrant une toute nouvelle dimension à Hamlet, sans jamais en dénaturer le sens.
La scénographie a beau être minimaliste, la proposition dépouillée de verbes du tandem Lepage-Côté foisonne néanmoins en charges symboliques et en scènes où les corps exécutent des moments canoniques du théâtre. On y retrouve l’esthétique et l’astuce de Lepage avec ses jeux d’ombre, ses transparences, ses effets visuels où la danse collabore avec les rideaux et son don incomparable pour créer et distiller des atmosphères hors du temps.
Être ou ne pas être…
Robert Lepage est un artiste qui ne se prive de rien : ni de liberté artistique, ni de prises de risques, ni de collaborations au potentiel fertile. Le maître de la métamorphose scénique continue ici de tisser une œuvre en expansion, infusant de son génie des explorations de styles et de disciplines, avec un désir d’aller plus loin dans la mise en valeur du talent d’autres artistes.
Nous sommes bel et bien dans le registre du ballet dans ce spectacle athlétique dont la trame narrative est guidée par de brefs titres qui ponctuent les divers tableaux et décrivent leur contenu. Et comme suite logique au travail du metteur en scène, le corps répond aux doutes, aux excès, à la folie qui émanent du crâne, nous rappelant que le geste, le mouvement sont aussi des éléments du théâtre shakespearien.
Un travail de finesse a été accompli, question de dégager, avec une clarté d’intention, le sens du texte sans recourir à la parole et laissant toute la place au potentiel du mouvement et à l’expressivité des interprètes. Dans sa relecture du personnage de Hamlet, Guillaume Côté le rend avec prestance et assurance, exagérant la nature sombre, voire brutale, du prince du Danemark continuellement bafoué par son entourage.
Le mouvement est net et précis, les lignes sont épurées, dans cet écrin où l’évocation est le langage principal que partagent des personnages qui épousent avec brio et intégrité les codes shakespeariens. La virtuosité des interprètes de même que leur talent pour le jeu permettent des propositions à la fois novatrices et authentiques.
L’érudition de Robert Lepage — qui a longuement exploré son sujet, notamment avec Hamlet Collage — jumelée à la virtuosité de Guillaume Côté qui s’est entouré d’agiles danseurs, composent une pièce qui, bien qu’encore au stade d’ébauche, a déjà atteint de hauts niveaux de qualité.
Plus intuitive que cérébrale — paradoxe étonnant, pour une pièce autour d’un être qui réfléchit trop ! — cette pièce de 120 minutes (sans entracte) nous entraîne dans les codes, les archétypes, les références de la tragédie shakespearienne, en évoquant certains moments intemporels.
Le mouvement chorégraphique est déjà bien ancré à cette étape et l’on présume que le spectacle continuera son évolution scénographique d’ici la prochaine mouture. Mais pour l’heure, cette première ébauche s’avère aussi enchanteresse que le songe d’une nuit d’été.
Mise en scène : Robert Lepage. Chorégraphie : Guillaume Côté. D’après l’œuvre de William Shakespeare. Musique originale : John Gzowski. Éclairages : Simon Rossiter. Costumes : Monika Onozko. Co-conception de la scénographie et des accessoires : Vanessa Cadrin. Direction de création : Steve Blanchet. Assistance à la création et directrice des répétitions : Anisa Tejpar. Assistance à la mise en scène et régie générale : Félix Dagenais. Directrice de production : Nadia Bellefeuille. Directeur technique : Antoine Caron. Régie éclairages : Billy Bergeron. Régie son et vidéo : Samuel Sérandour. Chef machiniste : Sébastien Côté. Régie accessoires : Jeanne Lapierre. Régie costumes : Émilie Potvin. Consultant aux combats : Jack Rennie. Interprétation : Greta Hodgkinson, Natasha Poon Woo, Robert Glumbeck, William Yong, Carleen Zouboules, Lukas Malkowski, Connor Mitton et Willem Sadler. Une coproduction de Côté Danse, Ex Machina et Dvoretsky Productions, présentée dans le cadre du Festival des arts de Saint-Sauveur du 26 au 28 juillet 2023.
Robert Lepage n’a pas fini de déployer ses dons de magicien et de catalyseur de moments qui font l’histoire. Dès les premiers instants de la représentation d’Hamlet (première ébauche) sous le chapiteau du Festival des Arts de Saint-Sauveur, le public en a eu une nouvelle preuve.
À la trame musicale signée John Gzowski, est venu s’entremêler le puissant grondement de tonnerre d’un dramatique orage voleur de spectacle. La nature s’était invitée comme bande sonore informelle pour envelopper parfaitement ce rassemblement estival autour de Shakespeare.
Façon de dire que cette nouvelle création d’Ex Machina, révélée en cours de création, bénéficiait d’une sorte de protection céleste ! C’est donc accompagnés de l’hypnotique rythme percussif de gouttes tambourinant sur le chapiteau que se sont exécutés Guillaume Côté (dans le rôle-titre) et les agiles interprètes.
Deux heures de pur enchantement, offert dans un espace temporel où l’émotion, le rituel, le métaphorique s’emparent de l’espace en offrant une toute nouvelle dimension à Hamlet, sans jamais en dénaturer le sens.
La scénographie a beau être minimaliste, la proposition dépouillée de verbes du tandem Lepage-Côté foisonne néanmoins en charges symboliques et en scènes où les corps exécutent des moments canoniques du théâtre. On y retrouve l’esthétique et l’astuce de Lepage avec ses jeux d’ombre, ses transparences, ses effets visuels où la danse collabore avec les rideaux et son don incomparable pour créer et distiller des atmosphères hors du temps.
Être ou ne pas être…
Robert Lepage est un artiste qui ne se prive de rien : ni de liberté artistique, ni de prises de risques, ni de collaborations au potentiel fertile. Le maître de la métamorphose scénique continue ici de tisser une œuvre en expansion, infusant de son génie des explorations de styles et de disciplines, avec un désir d’aller plus loin dans la mise en valeur du talent d’autres artistes.
Nous sommes bel et bien dans le registre du ballet dans ce spectacle athlétique dont la trame narrative est guidée par de brefs titres qui ponctuent les divers tableaux et décrivent leur contenu. Et comme suite logique au travail du metteur en scène, le corps répond aux doutes, aux excès, à la folie qui émanent du crâne, nous rappelant que le geste, le mouvement sont aussi des éléments du théâtre shakespearien.
Un travail de finesse a été accompli, question de dégager, avec une clarté d’intention, le sens du texte sans recourir à la parole et laissant toute la place au potentiel du mouvement et à l’expressivité des interprètes. Dans sa relecture du personnage de Hamlet, Guillaume Côté le rend avec prestance et assurance, exagérant la nature sombre, voire brutale, du prince du Danemark continuellement bafoué par son entourage.
Le mouvement est net et précis, les lignes sont épurées, dans cet écrin où l’évocation est le langage principal que partagent des personnages qui épousent avec brio et intégrité les codes shakespeariens. La virtuosité des interprètes de même que leur talent pour le jeu permettent des propositions à la fois novatrices et authentiques.
L’érudition de Robert Lepage — qui a longuement exploré son sujet, notamment avec Hamlet Collage — jumelée à la virtuosité de Guillaume Côté qui s’est entouré d’agiles danseurs, composent une pièce qui, bien qu’encore au stade d’ébauche, a déjà atteint de hauts niveaux de qualité.
Plus intuitive que cérébrale — paradoxe étonnant, pour une pièce autour d’un être qui réfléchit trop ! — cette pièce de 120 minutes (sans entracte) nous entraîne dans les codes, les archétypes, les références de la tragédie shakespearienne, en évoquant certains moments intemporels.
Le mouvement chorégraphique est déjà bien ancré à cette étape et l’on présume que le spectacle continuera son évolution scénographique d’ici la prochaine mouture. Mais pour l’heure, cette première ébauche s’avère aussi enchanteresse que le songe d’une nuit d’été.
Hamlet (première ébauche)
Mise en scène : Robert Lepage. Chorégraphie : Guillaume Côté. D’après l’œuvre de William Shakespeare. Musique originale : John Gzowski. Éclairages : Simon Rossiter. Costumes : Monika Onozko. Co-conception de la scénographie et des accessoires : Vanessa Cadrin. Direction de création : Steve Blanchet. Assistance à la création et directrice des répétitions : Anisa Tejpar. Assistance à la mise en scène et régie générale : Félix Dagenais. Directrice de production : Nadia Bellefeuille. Directeur technique : Antoine Caron. Régie éclairages : Billy Bergeron. Régie son et vidéo : Samuel Sérandour. Chef machiniste : Sébastien Côté. Régie accessoires : Jeanne Lapierre. Régie costumes : Émilie Potvin. Consultant aux combats : Jack Rennie. Interprétation : Greta Hodgkinson, Natasha Poon Woo, Robert Glumbeck, William Yong, Carleen Zouboules, Lukas Malkowski, Connor Mitton et Willem Sadler. Une coproduction de Côté Danse, Ex Machina et Dvoretsky Productions, présentée dans le cadre du Festival des arts de Saint-Sauveur du 26 au 28 juillet 2023.