Comment fonctionnez-vous à la Fratrie, de la conception à la production et, en particulier, avec ce cabaret intitulé Corps et confettis ?
La Fratrie, c’est Erika Mathieu, Alex Trahan, moi-même et nos collaborateurs∙trices depuis des années. C’est la « chosen family ». L’horizontalité définit notre processus de création, nous sommes toujours avides des idées et des opinions des gens avec qui on travaille. On aime créer un « safe space » qui donne envie aux artistes de porter la production. Ce n’est pas de la création collective, car il y a toujours un meneur à la base de chaque projet. Erika, Alex et moi débordons d’idées et d’envies scéniques, mais notre plus grande force réside dans notre capacité de s’entourer d’artistes qui matérialisent notre vision. Avec Corps et confettis, c’est d’autant plus vrai parce que j’avais cette vision d’un cabaret qui pourrait célébrer les gens de la communauté LGBTQ2IA+. J’avais besoin d’artistes qui voulaient se révéler. Mon idée était de partir des fantasmes et on verra sur scène le fruit de discussions intimes avec les interprètes et les concepteurs∙trices qui ont accepté de nourrir la création de leurs propres expériences. Mon rôle a été d’orchestrer et d’orienter les réflexions afin d’en dessiner un portrait signifiant.
L’idée d’un cabaret a-t-elle à voir avec ton expérience multidisciplinaire ?
Je suis quelqu’un de très curieux, ce qui m’amène à travailler avec des artistes de différentes disciplines et à sortir des sentiers battus. J’aime comprendre ce qui se passe dans la tête des autres, de voir comment iels approchent la scène, le travail du corps, du texte. Ma démarche artistique s’est construite à travers toutes ces rencontres. L’idée du cabaret a commencé à faire son bout de chemin durant la pandémie. J’avais besoin de quelque chose de festif, de rassembleur pour le retour en salle. J’avais envie de réunir des créateurs∙trices et de faire un énorme happening, de braquer la lumière sur des artistes dont j’admirais la démarche artistique. Notre équipe est majoritairement composée de personnes queer, ce qui était très important pour moi. Avec le dérapage chez nos voisins du sud et tout ce qui se passe dans le monde contre la communauté, j’avais envie de célébrer notre différence. Loin de moi l’idée de faire un spectacle pamphlétaire, mais je voulais mettre ces humains de l’avant, d’entendre leurs pensées, leurs réflexions sur les enjeux qu’iels vivent au quotidien.
Corps et confettis © Julie Artacho
Corps et confettis renvoie à l’idée d’une célébration dans un esprit de légèreté. Mais la Fratrie ne se concentre jamais uniquement sur le « beau » dans l’humain.
C’est vrai. Nous revendiquons le droit à la beauté, à la légèreté, aux fantasmes. Mais je pense que pour que ce soit intéressant sur scène, il faut les mettre en contraste. L’idée de partir des fantasmes scéniques de chaque interprète ouvre la porte à une vulnérabilité qui peut être à la fois enivrante et lumineuse, mais aussi sombre et difficile. Le cabaret célèbre cette quête d’authenticité, ce désir d’embrasser les ténèbres en nous. Certain.es artistes avaient des fantasmes qui leur permettaient d’extérioriser certaines craintes ou angoisses ou encore de prendre la parole sur des expériences vécues. J’ai laissé la porte ouverte pour créer un tout à l’image de la Fratrie. Le corps peut aussi renvoyer à la perception de l’autre, à notre angoisse d’être vu, perçu, et, en contrepartie, notre désir de l’être à tout prix. Notre désir d’être sexualisé à certains moments, mais de ne pas l’être à d’autres. Cette contradiction est intéressante.
Que peut-on dire des artistes de la distribution ?
Je respecte et admire énormément le travail des artistes avec qui je collabore. Iels ont toustes en commun d’avoir une fougue hallucinante. Stacey Désilier a une présence scénique inhabituelle. Elle vibre de partout et commande aux spectateurs de la suivre. Jossua Dufour Collin est un danseur extraordinaire, d’une rare sensibilité. Alex Trahan peut tout faire sur scène. Il ne craint pas d’essayer, de se tromper, de sortir de sa zone de confort. Il est d’une rigueur absolue. Yann Villeneuve, qui signe aussi la conception sonore du cabaret, a une intelligence, une compréhension de la scène hors du commun. Natacha Filiatrault est indescriptible. Quand elle entre sur scène, impossible de rester indifférent. En plus d’être une comédienne de haut calibre, elle est une danseuse hors norme. Finalement, Antoniya c’est l’intensité en beauté. Sa voix est unique. J’aimerais aussi attirer l’attention sur le travail des conceptrices : Anne-Sara Gendron, Joëlle LeBlanc et Claudie Gagnon. Leur travail est tout aussi important pour moi que celui des interprètes. Leurs réflexions sur le métier, leur talent et leur dévouement sont excessivement précieux. Finalement, Erika Mathieu, scénariste et co-fondatrice de la Fratrie, signe certains textes du spectacle. Elle possède ce don de traiter d’enjeux profonds au cœur de scènes hilarantes.
La mise en scène t’attire, mais voyant ton parcours, ça ne veut pas dire que tu abandonnes le jeu pour autant, non ?
Absolument pas. J’ai l’impression qu’un aspect nourrit l’autre. J’adore faire de la mise en scène, parce que ça m’apporte une liberté complètement différente que lorsque je suis interprète pour d’autres. Je ne pensais pas aimer ça à ce point-là. J’adore analyser les lignes de force d’un plateau, voir comment un corps en scène peut exprimer quelque chose en se tenant à un endroit précis. J’ai l’impression que le plateau parle de lui-même et qu’il faut se mettre en position d’écoute et d’ouverture lorsqu’on fait de la mise en scène. Cette sensibilité influence directement l’acteur que je suis. J’aurai la chance prochainement de mettre en scène mon premier opéra avec la Faculté de musique de l’Université de Montréal, La flûte enchantée de Mozart, avec un orchestre dirigé par Jean-François Rivest. L’inconnu me stimule beaucoup. Comme comédien, je prendrai part à la création de la compagnie Les précieuses fissures, menée de main de maître par Claire Renaud.
Corps et confettis est présenté à La Chapelle Scènes Contemporaines du 16 au 23 septembre 2023.
Comment fonctionnez-vous à la Fratrie, de la conception à la production et, en particulier, avec ce cabaret intitulé Corps et confettis ?
La Fratrie, c’est Erika Mathieu, Alex Trahan, moi-même et nos collaborateurs∙trices depuis des années. C’est la « chosen family ». L’horizontalité définit notre processus de création, nous sommes toujours avides des idées et des opinions des gens avec qui on travaille. On aime créer un « safe space » qui donne envie aux artistes de porter la production. Ce n’est pas de la création collective, car il y a toujours un meneur à la base de chaque projet. Erika, Alex et moi débordons d’idées et d’envies scéniques, mais notre plus grande force réside dans notre capacité de s’entourer d’artistes qui matérialisent notre vision. Avec Corps et confettis, c’est d’autant plus vrai parce que j’avais cette vision d’un cabaret qui pourrait célébrer les gens de la communauté LGBTQ2IA+. J’avais besoin d’artistes qui voulaient se révéler. Mon idée était de partir des fantasmes et on verra sur scène le fruit de discussions intimes avec les interprètes et les concepteurs∙trices qui ont accepté de nourrir la création de leurs propres expériences. Mon rôle a été d’orchestrer et d’orienter les réflexions afin d’en dessiner un portrait signifiant.
L’idée d’un cabaret a-t-elle à voir avec ton expérience multidisciplinaire ?
Je suis quelqu’un de très curieux, ce qui m’amène à travailler avec des artistes de différentes disciplines et à sortir des sentiers battus. J’aime comprendre ce qui se passe dans la tête des autres, de voir comment iels approchent la scène, le travail du corps, du texte. Ma démarche artistique s’est construite à travers toutes ces rencontres. L’idée du cabaret a commencé à faire son bout de chemin durant la pandémie. J’avais besoin de quelque chose de festif, de rassembleur pour le retour en salle. J’avais envie de réunir des créateurs∙trices et de faire un énorme happening, de braquer la lumière sur des artistes dont j’admirais la démarche artistique. Notre équipe est majoritairement composée de personnes queer, ce qui était très important pour moi. Avec le dérapage chez nos voisins du sud et tout ce qui se passe dans le monde contre la communauté, j’avais envie de célébrer notre différence. Loin de moi l’idée de faire un spectacle pamphlétaire, mais je voulais mettre ces humains de l’avant, d’entendre leurs pensées, leurs réflexions sur les enjeux qu’iels vivent au quotidien.
Corps et confettis © Julie Artacho
Corps et confettis renvoie à l’idée d’une célébration dans un esprit de légèreté. Mais la Fratrie ne se concentre jamais uniquement sur le « beau » dans l’humain.
C’est vrai. Nous revendiquons le droit à la beauté, à la légèreté, aux fantasmes. Mais je pense que pour que ce soit intéressant sur scène, il faut les mettre en contraste. L’idée de partir des fantasmes scéniques de chaque interprète ouvre la porte à une vulnérabilité qui peut être à la fois enivrante et lumineuse, mais aussi sombre et difficile. Le cabaret célèbre cette quête d’authenticité, ce désir d’embrasser les ténèbres en nous. Certain.es artistes avaient des fantasmes qui leur permettaient d’extérioriser certaines craintes ou angoisses ou encore de prendre la parole sur des expériences vécues. J’ai laissé la porte ouverte pour créer un tout à l’image de la Fratrie. Le corps peut aussi renvoyer à la perception de l’autre, à notre angoisse d’être vu, perçu, et, en contrepartie, notre désir de l’être à tout prix. Notre désir d’être sexualisé à certains moments, mais de ne pas l’être à d’autres. Cette contradiction est intéressante.
Que peut-on dire des artistes de la distribution ?
Je respecte et admire énormément le travail des artistes avec qui je collabore. Iels ont toustes en commun d’avoir une fougue hallucinante. Stacey Désilier a une présence scénique inhabituelle. Elle vibre de partout et commande aux spectateurs de la suivre. Jossua Dufour Collin est un danseur extraordinaire, d’une rare sensibilité. Alex Trahan peut tout faire sur scène. Il ne craint pas d’essayer, de se tromper, de sortir de sa zone de confort. Il est d’une rigueur absolue. Yann Villeneuve, qui signe aussi la conception sonore du cabaret, a une intelligence, une compréhension de la scène hors du commun. Natacha Filiatrault est indescriptible. Quand elle entre sur scène, impossible de rester indifférent. En plus d’être une comédienne de haut calibre, elle est une danseuse hors norme. Finalement, Antoniya c’est l’intensité en beauté. Sa voix est unique. J’aimerais aussi attirer l’attention sur le travail des conceptrices : Anne-Sara Gendron, Joëlle LeBlanc et Claudie Gagnon. Leur travail est tout aussi important pour moi que celui des interprètes. Leurs réflexions sur le métier, leur talent et leur dévouement sont excessivement précieux. Finalement, Erika Mathieu, scénariste et co-fondatrice de la Fratrie, signe certains textes du spectacle. Elle possède ce don de traiter d’enjeux profonds au cœur de scènes hilarantes.
La mise en scène t’attire, mais voyant ton parcours, ça ne veut pas dire que tu abandonnes le jeu pour autant, non ?
Absolument pas. J’ai l’impression qu’un aspect nourrit l’autre. J’adore faire de la mise en scène, parce que ça m’apporte une liberté complètement différente que lorsque je suis interprète pour d’autres. Je ne pensais pas aimer ça à ce point-là. J’adore analyser les lignes de force d’un plateau, voir comment un corps en scène peut exprimer quelque chose en se tenant à un endroit précis. J’ai l’impression que le plateau parle de lui-même et qu’il faut se mettre en position d’écoute et d’ouverture lorsqu’on fait de la mise en scène. Cette sensibilité influence directement l’acteur que je suis. J’aurai la chance prochainement de mettre en scène mon premier opéra avec la Faculté de musique de l’Université de Montréal, La flûte enchantée de Mozart, avec un orchestre dirigé par Jean-François Rivest. L’inconnu me stimule beaucoup. Comme comédien, je prendrai part à la création de la compagnie Les précieuses fissures, menée de main de maître par Claire Renaud.
Corps et confettis est présenté à La Chapelle Scènes Contemporaines du 16 au 23 septembre 2023.