Pénélope Deraîche-Dallaire se décrit elle-même, vers la fin de Cher journal; une mutation, en faisant l’énumération de quelques qualificatifs, dont « insaisissable ». Son spectacle ratisse, en effet, très large. Entre naïveté et cynisme, douceurs et ironie, l’autrice-metteuse en scène et comédienne met de l’avant des paradoxes et des contradictions qu’elle assume pleinement. Sa mise à nu, au propre comme au figuré, permet cependant d’adhérer à sa proposition hors norme, au propos parfois échevelé, mais stimulante à plus d’un titre.
Dès son entrée en salle, le public fait le tour de la scène où sont étendues les trois protagonistes et où des stalactites en tissus, évoquant une forme charnelle organique, pour ne pas dire champignonnesque, pendent du plafond. Nous sommes en forêt comme l’indique le chant des oiseaux sur la bande-son. Un grondement de basse fréquence se fait entendre tout au long de la pièce, suggérant que nous pourrions aussi bien nous trouver sous terre, entourés de racines d’arbres. À gauche, sur le devant de la scène, on peut voir une petite lagune laiteuse. Un personnage au costume difforme s’y baigne, tandis qu’une autre artiste s’exécute à la barre verticale sur le côté droit.
Pénélope Deraîche-Dallaire occupe le centre du plateau où elle livre des extraits de son journal intime portant sur sa vie de mère solitaire, débordante de doutes, de fantasmes, de peurs, d’espoirs aussi. Même si un récit s’élabore peu à peu, le texte se compose surtout de fragments. Difficile d’y voir une ligne claire puisque ce sont ses éclats qui frappent le plus fort, notamment au sujet des féminicides et des désirs ambigus.
De puissants éclairages orientés vers l’assistance découpent d’ailleurs le spectacle en courtes scènes, ce qui permet aux comédiennes de changer de position dans l’obscurité. De forts contrastes secouent toute la représentation entre ce qui est dit et ce qui est montré, entre ce qui est vaguement évoqué et ce qui est énoncé maladroitement. Au-delà de ces nombreux chocs narratifs et visuels qui peuvent provoquer un certain déséquilibre dans la compréhension, la vulnérabilité des femmes et la fragilité de la vie restent, toutefois, éloquentes.
La scénographie luxuriante et les costumes de peaux superposées – chapeau à Marie-Audrey Jacques – nous rappellent que nous sommes dans un univers volontairement équivoque, qui échappe à ce qui serait uniquement humain. La matière existe, vibre et nous parle. C’est un langage que nous n’avons pas à comprendre parfaitement, mais qui suscite des sensations et invite à l’introspection, comme celle qu’effectue Pénélope Deraîche-Dallaire elle-même, sans fausse pudeur, avec sensibilité et courage. La vie et la mort revêtent leurs habits dans un même décor qui fait penser à certaines sculptures de David Altmejd au sein desquelles, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
Texte et mise en scène : Pénélope Deraîche-Dallaire. Conseil artistique, costumes et accessoires : Marie-Audrey Jacques. Doublure de répétitions : Jessica Léveillée-Lemay. Éclairages : Catherine FP. Scénographie : Karine Galarneau. Son : Marie-Frédérique Gravel. Conseil dramaturgique : Myriam Stéphanie Perraton-Lambert et Sasha Dion. Direction technique : Romane Bocquet. Direction de production : Roxanne Gallant. Avec Catherine Beauchemin, Catherine Cédilot et Pénélope Deraîche-Dallaire. Présenté à Espace Libre du 17 au 28 septembre 2024 et à la salle Réjean-Ducharme au TNM du 22 avril au 3 mai 2025.
Pénélope Deraîche-Dallaire se décrit elle-même, vers la fin de Cher journal; une mutation, en faisant l’énumération de quelques qualificatifs, dont « insaisissable ». Son spectacle ratisse, en effet, très large. Entre naïveté et cynisme, douceurs et ironie, l’autrice-metteuse en scène et comédienne met de l’avant des paradoxes et des contradictions qu’elle assume pleinement. Sa mise à nu, au propre comme au figuré, permet cependant d’adhérer à sa proposition hors norme, au propos parfois échevelé, mais stimulante à plus d’un titre.
Dès son entrée en salle, le public fait le tour de la scène où sont étendues les trois protagonistes et où des stalactites en tissus, évoquant une forme charnelle organique, pour ne pas dire champignonnesque, pendent du plafond. Nous sommes en forêt comme l’indique le chant des oiseaux sur la bande-son. Un grondement de basse fréquence se fait entendre tout au long de la pièce, suggérant que nous pourrions aussi bien nous trouver sous terre, entourés de racines d’arbres. À gauche, sur le devant de la scène, on peut voir une petite lagune laiteuse. Un personnage au costume difforme s’y baigne, tandis qu’une autre artiste s’exécute à la barre verticale sur le côté droit.
Pénélope Deraîche-Dallaire occupe le centre du plateau où elle livre des extraits de son journal intime portant sur sa vie de mère solitaire, débordante de doutes, de fantasmes, de peurs, d’espoirs aussi. Même si un récit s’élabore peu à peu, le texte se compose surtout de fragments. Difficile d’y voir une ligne claire puisque ce sont ses éclats qui frappent le plus fort, notamment au sujet des féminicides et des désirs ambigus.
De puissants éclairages orientés vers l’assistance découpent d’ailleurs le spectacle en courtes scènes, ce qui permet aux comédiennes de changer de position dans l’obscurité. De forts contrastes secouent toute la représentation entre ce qui est dit et ce qui est montré, entre ce qui est vaguement évoqué et ce qui est énoncé maladroitement. Au-delà de ces nombreux chocs narratifs et visuels qui peuvent provoquer un certain déséquilibre dans la compréhension, la vulnérabilité des femmes et la fragilité de la vie restent, toutefois, éloquentes.
La scénographie luxuriante et les costumes de peaux superposées – chapeau à Marie-Audrey Jacques – nous rappellent que nous sommes dans un univers volontairement équivoque, qui échappe à ce qui serait uniquement humain. La matière existe, vibre et nous parle. C’est un langage que nous n’avons pas à comprendre parfaitement, mais qui suscite des sensations et invite à l’introspection, comme celle qu’effectue Pénélope Deraîche-Dallaire elle-même, sans fausse pudeur, avec sensibilité et courage. La vie et la mort revêtent leurs habits dans un même décor qui fait penser à certaines sculptures de David Altmejd au sein desquelles, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
Cher journal; une mutation
Texte et mise en scène : Pénélope Deraîche-Dallaire. Conseil artistique, costumes et accessoires : Marie-Audrey Jacques. Doublure de répétitions : Jessica Léveillée-Lemay. Éclairages : Catherine FP. Scénographie : Karine Galarneau. Son : Marie-Frédérique Gravel. Conseil dramaturgique : Myriam Stéphanie Perraton-Lambert et Sasha Dion. Direction technique : Romane Bocquet. Direction de production : Roxanne Gallant. Avec Catherine Beauchemin, Catherine Cédilot et Pénélope Deraîche-Dallaire. Présenté à Espace Libre du 17 au 28 septembre 2024 et à la salle Réjean-Ducharme au TNM du 22 avril au 3 mai 2025.