«C’est un café, ici, pas une tragédie grecque!», clame l’une des protagonistes de Starshit, avec l’indémontable conviction de celle qui croit en l’entreprise qui l’emploie – et qui l’a fallacieusement couronnée du titre vide d’«associée» – comme en un imperfectible gourou. Et pourtant, là où il y a des humains, le drame n’est jamais bien loin. Pas plus que l’ambition, la rivalité, l’envie, voire la hargne et la violence.
En témoigne le texte de Jonathan Caron et Julie Renault, portrait satirique d’une équipe de baristas s’affairant à faire fructifier, comme si la marche du monde en dépendait, une succursale québécoise d’une multinationale du café. Un univers et des préoccupations qui rappellent spontanément le travail de l’auteur et metteur en scène Simon Boudreault, qui s’avère avoir effectivement agi à titre de conseiller dramaturgique auprès des deux jeunes auteurs.
Ainsi, le Starshit de la rue De La Gauchetière, déclarée succursale étoile pour son rendement exceptionnel, se prépare à recevoir l’incommensurable honneur d’une visite du fondateur américain de la chaîne. Lors de son passage, il décernera à l’employé le plus productif un privilège des plus enviables : l’élu pourra aller s’établir à Starshit City où il aura l’insigne prérogative de vivre dans un milieu de vie entièrement starshitien où il sera pris en charge par la compagnie et où il pourra travailler pour celle-ci jusqu’à la fin de ses jours, sans plus avoir à se soucier de quoi que ce soit d’autre.
Il s’agit là du rêve ultime puisqu’on décroche un emploi chez Starshit comme on entre en religion : on récite un credo en chœur à tous les matins, on abdique son libre-arbitre, on considère la servitude au profit d’un autocrate idolâtré comme un privilège et, cela va de soi compte tenu des conditions de travail offertes, on fait vœu de pauvreté. Les employés en lice ne négligeront aucune bassesse pour être le champion pour qui s’ouvriront les portes de ce nirvana.
Comme son titre peut le laisser présager, la coproduction de l’abitibien Théâtre du Tandem et du montréalais Théâtre En Quec’Part démontre bien davantage une urgence de dénoncer qu’un souci de subtilité. Car tout s’avère plutôt caricatural dans ce plaidoyer anti-corporatiste. Du jeu des comédiens – notamment celui de l’auteur lui-même – au vocabulaire de l’employée torontoise qui quitte systématiquement la scène en lançant «Prends soin!» (traduction littérale de Take care!), sans oublier l’esprit d’entreprise inculqué aux travailleurs sous forme d’un lavage de cerveau conduisant à la névrose.
Or la caricature, lorsqu’elle est livrée adroitement, peut très bien faire mouche. Ici, les épisodes s’enchaînent à un rythme soutenu, le ton s’avère assez amusant et la folie collective emportant les personnages a l’heur de ne pas sombrer dans un maladroit chaos scénique. L’on sait gré à Luc Bourgeois, qui signe la mise en scène, d’avoir su éviter ce type d’écueils et d’avoir apporté de la mesure, en quelque sorte, à cette fresque burlesque.
Notons que les anxieux drilles imaginés par Renault et Caron évoluent dans un décor joliment dessiné (tables, chaises, comptoir avec ses viennoiseries, etc.) à la craie blanche sur fond noir. Quelques caissons de plastiques accessoirisent le tout, se prêtant à plusieurs usages en se transformant en casiers personnels pour les employés, en colonnes décoratives ou encore en boîtes de marchandise déplacées au gré des tâches de chacun.
Il convient aussi de souligner la créativité démontrée par la conceptrice d’éclairages Lyne Rioux. Que ce soit en produisant à quelques reprises un rectangle de lumière n’illuminant que le visage des quatre protagonistes alignés ou encore en donnant des allures tantôt démoniaques tantôt hollywoodiennes au mot Starshit trônant en grandes lettres blanches à la cime du décor, ses habiles jeux de lumières apportent beaucoup à cette production enthousiaste et, somme toute, enthousiasmante.
Texte : Jonathan Caron et Julie Renault. Mise en scène : Luc Bourgeois. Avec Karine Berthelot, Jonathan Caron, Julie Renault et Martine Pype-Rondeau. Conseil dramaturgique : Simon Boudreault. Scénographie, costumes et accessoires : Noémi Paquette. Éclairages : Lyne Rioux. Musique et ambiance sonore : Habib Zekri. Une coproduction du Théâtre en Quec’Part et du Théâtre du Tandem (Rouyn-Noranda). À la salle Jean-Claude Germain du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’au 23 avril 2016. À la Cour des arts (Ottawa), à l’occasion des Zones Théâtrales, les 12 et 13 septembre 2017.
«C’est un café, ici, pas une tragédie grecque!», clame l’une des protagonistes de Starshit, avec l’indémontable conviction de celle qui croit en l’entreprise qui l’emploie – et qui l’a fallacieusement couronnée du titre vide d’«associée» – comme en un imperfectible gourou. Et pourtant, là où il y a des humains, le drame n’est jamais bien loin. Pas plus que l’ambition, la rivalité, l’envie, voire la hargne et la violence.
En témoigne le texte de Jonathan Caron et Julie Renault, portrait satirique d’une équipe de baristas s’affairant à faire fructifier, comme si la marche du monde en dépendait, une succursale québécoise d’une multinationale du café. Un univers et des préoccupations qui rappellent spontanément le travail de l’auteur et metteur en scène Simon Boudreault, qui s’avère avoir effectivement agi à titre de conseiller dramaturgique auprès des deux jeunes auteurs.
Ainsi, le Starshit de la rue De La Gauchetière, déclarée succursale étoile pour son rendement exceptionnel, se prépare à recevoir l’incommensurable honneur d’une visite du fondateur américain de la chaîne. Lors de son passage, il décernera à l’employé le plus productif un privilège des plus enviables : l’élu pourra aller s’établir à Starshit City où il aura l’insigne prérogative de vivre dans un milieu de vie entièrement starshitien où il sera pris en charge par la compagnie et où il pourra travailler pour celle-ci jusqu’à la fin de ses jours, sans plus avoir à se soucier de quoi que ce soit d’autre.
Il s’agit là du rêve ultime puisqu’on décroche un emploi chez Starshit comme on entre en religion : on récite un credo en chœur à tous les matins, on abdique son libre-arbitre, on considère la servitude au profit d’un autocrate idolâtré comme un privilège et, cela va de soi compte tenu des conditions de travail offertes, on fait vœu de pauvreté. Les employés en lice ne négligeront aucune bassesse pour être le champion pour qui s’ouvriront les portes de ce nirvana.
Comme son titre peut le laisser présager, la coproduction de l’abitibien Théâtre du Tandem et du montréalais Théâtre En Quec’Part démontre bien davantage une urgence de dénoncer qu’un souci de subtilité. Car tout s’avère plutôt caricatural dans ce plaidoyer anti-corporatiste. Du jeu des comédiens – notamment celui de l’auteur lui-même – au vocabulaire de l’employée torontoise qui quitte systématiquement la scène en lançant «Prends soin!» (traduction littérale de Take care!), sans oublier l’esprit d’entreprise inculqué aux travailleurs sous forme d’un lavage de cerveau conduisant à la névrose.
Or la caricature, lorsqu’elle est livrée adroitement, peut très bien faire mouche. Ici, les épisodes s’enchaînent à un rythme soutenu, le ton s’avère assez amusant et la folie collective emportant les personnages a l’heur de ne pas sombrer dans un maladroit chaos scénique. L’on sait gré à Luc Bourgeois, qui signe la mise en scène, d’avoir su éviter ce type d’écueils et d’avoir apporté de la mesure, en quelque sorte, à cette fresque burlesque.
Notons que les anxieux drilles imaginés par Renault et Caron évoluent dans un décor joliment dessiné (tables, chaises, comptoir avec ses viennoiseries, etc.) à la craie blanche sur fond noir. Quelques caissons de plastiques accessoirisent le tout, se prêtant à plusieurs usages en se transformant en casiers personnels pour les employés, en colonnes décoratives ou encore en boîtes de marchandise déplacées au gré des tâches de chacun.
Il convient aussi de souligner la créativité démontrée par la conceptrice d’éclairages Lyne Rioux. Que ce soit en produisant à quelques reprises un rectangle de lumière n’illuminant que le visage des quatre protagonistes alignés ou encore en donnant des allures tantôt démoniaques tantôt hollywoodiennes au mot Starshit trônant en grandes lettres blanches à la cime du décor, ses habiles jeux de lumières apportent beaucoup à cette production enthousiaste et, somme toute, enthousiasmante.
Starshit
Texte : Jonathan Caron et Julie Renault. Mise en scène : Luc Bourgeois. Avec Karine Berthelot, Jonathan Caron, Julie Renault et Martine Pype-Rondeau. Conseil dramaturgique : Simon Boudreault. Scénographie, costumes et accessoires : Noémi Paquette. Éclairages : Lyne Rioux. Musique et ambiance sonore : Habib Zekri. Une coproduction du Théâtre en Quec’Part et du Théâtre du Tandem (Rouyn-Noranda). À la salle Jean-Claude Germain du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’au 23 avril 2016. À la Cour des arts (Ottawa), à l’occasion des Zones Théâtrales, les 12 et 13 septembre 2017.