L’expérience est troublante: on place cinq lapins dans une cage, avec une carotte perchée en haut d’un escabeau. Le premier lapin à attraper la carotte est peint en rouge tandis que les autres sont aspergés d’eau glacée. Après quelques jours, les lapins blancs se mettent à attaquer le lapin rouge. On stoppe la punition, les lapins blancs continuent d’attaquer le rouge. On retire la carotte, idem. Et même quand on change les lapins blancs, les attaques continuent.
Quelle conclusion pouvons-nous en tirer? Que la rancoeur et l’envie peuvent conduire à la violence? Que la violence et la haine peuvent devenir ataviques? Qu’il vaut mieux éviter à tout prix de se distinguer et rester plutôt dans la masse, car le prix à payer sera toujours moins élevé?
Dans ce monologue participatif (les spectateurs sont appelés à intervenir à plusieurs reprises), c’est au moyen d’allégories et d’images que l’auteur iranien Nassim Soleimanpour nous interpelle et nous invite à réfléchir sur un certain nombre de questions relatives au contexte dans lequel il vit: possédons-nous un profond désir de conformité? Notre perception de la vérité est-elle le fruit d’un leurre produit par notre propre cerveau? Sommes-nous capables d’assister à un suicide sans intervenir? Qui peut résister à l’endoctrinement? Progressivement, le cocasse du début (une histoire de lapin obligé de cacher ses oreilles pour aller au cirque et de guépard imitant une autruche) se dissout: la réalité et la fiction se mêlent, la vie de l’auteur se confond avec celle des lapins, le passé fait des clins d’oeil au futur, et l’auteur absent devient le personnage principal.
Le texte est livré chaque soir par un acteur différent, professionnel ou non, qui découvre le texte devant nos yeux. Le soir de la première, c’est le député de Québec solidaire Amir Khadir qui s’y est collé, nous invitant, avant de commencer, à faire preuve d’indulgence. Ainsi, l’expérience humaine prend le pas sur la représentation, de même que la réalité de l’auteur, qui fait voyager ses mots à défaut de voyager lui-même, prend le pas sur les images plus ou moins adroites et la structure plutôt bancale du texte.
Il est vertigineux d’observer un acteur donner ainsi vie, sans préparation, aux mots d’un autre artiste entravé dans sa création et dans sa possibilité de toucher un public, et de le voir confronté à une question de taille: serait-il capable de pousser son rôle jusqu’à mettre sa vie en danger, comme l’auteur le fait lui-même? Une bonne occasion de se rappeler que la liberté de mouvement et d’expression dont nous jouissons n’est pas la même pour tous, de se demander ce que nous faisons de notre liberté, et de réaliser qu’avec nos droits vient une responsabilité: celle de nous battre pour que tous aient les mêmes que nous.
L’expérience est troublante: on place cinq lapins dans une cage, avec une carotte perchée en haut d’un escabeau. Le premier lapin à attraper la carotte est peint en rouge tandis que les autres sont aspergés d’eau glacée. Après quelques jours, les lapins blancs se mettent à attaquer le lapin rouge. On stoppe la punition, les lapins blancs continuent d’attaquer le rouge. On retire la carotte, idem. Et même quand on change les lapins blancs, les attaques continuent.
Quelle conclusion pouvons-nous en tirer? Que la rancoeur et l’envie peuvent conduire à la violence? Que la violence et la haine peuvent devenir ataviques? Qu’il vaut mieux éviter à tout prix de se distinguer et rester plutôt dans la masse, car le prix à payer sera toujours moins élevé?
Dans ce monologue participatif (les spectateurs sont appelés à intervenir à plusieurs reprises), c’est au moyen d’allégories et d’images que l’auteur iranien Nassim Soleimanpour nous interpelle et nous invite à réfléchir sur un certain nombre de questions relatives au contexte dans lequel il vit: possédons-nous un profond désir de conformité? Notre perception de la vérité est-elle le fruit d’un leurre produit par notre propre cerveau? Sommes-nous capables d’assister à un suicide sans intervenir? Qui peut résister à l’endoctrinement? Progressivement, le cocasse du début (une histoire de lapin obligé de cacher ses oreilles pour aller au cirque et de guépard imitant une autruche) se dissout: la réalité et la fiction se mêlent, la vie de l’auteur se confond avec celle des lapins, le passé fait des clins d’oeil au futur, et l’auteur absent devient le personnage principal.
Le texte est livré chaque soir par un acteur différent, professionnel ou non, qui découvre le texte devant nos yeux. Le soir de la première, c’est le député de Québec solidaire Amir Khadir qui s’y est collé, nous invitant, avant de commencer, à faire preuve d’indulgence. Ainsi, l’expérience humaine prend le pas sur la représentation, de même que la réalité de l’auteur, qui fait voyager ses mots à défaut de voyager lui-même, prend le pas sur les images plus ou moins adroites et la structure plutôt bancale du texte.
Il est vertigineux d’observer un acteur donner ainsi vie, sans préparation, aux mots d’un autre artiste entravé dans sa création et dans sa possibilité de toucher un public, et de le voir confronté à une question de taille: serait-il capable de pousser son rôle jusqu’à mettre sa vie en danger, comme l’auteur le fait lui-même? Une bonne occasion de se rappeler que la liberté de mouvement et d’expression dont nous jouissons n’est pas la même pour tous, de se demander ce que nous faisons de notre liberté, et de réaliser qu’avec nos droits vient une responsabilité: celle de nous battre pour que tous aient les mêmes que nous.
Lapin blanc, lapin rouge
De Nassim Soleimanpour
Mise en scène de Philippe Ducros et Mani Soleymanlou
Une coproduction Orange Noyée et Hôtel-Motel, présentée à l’Espace Libre jusqu’au 15 décembre 2012