Après le magnifique concert cinématographique de La fille qui fixait, présenté les 19 et 20 novembre derniers, la compagnie gantoise Zonzo récidive en nous plongeant cette fois dans l’univers musical et performatif de l’artiste d’avant-garde américain John Cage.
Peut-on entendre le silence ? Quelle est l’essence de la musique ? Le son a-t-il une matérialité ?
C’est à une investigation ludique de ces questions aporétiques que Cage a consacré la majeure partie de son œuvre musicale. Il a donc exploré la vaste étendue de l’écologie sonore avec des compositions sollicitant le hasard, les ruptures et les objets quotidiens tels que les jouets ou les appareils domestiques.
La pièce la plus célèbre de Cage, 4’33 (1952), est une performance d’une durée de 4 minutes et 33 secondes. Devant un pianiste immobile et muet, le public était invité à écouter la densité sonore du « silence » qui régnait dans l’espace : le bruit des corps qui toussent, remuent et respirent, les chaises qui craquent… en d’autres termes, tous les sons habituellement ignorés et qui ne peuvent s’inscrire sur une partition musicale. L’œuvre radicale de Cage traitait avec humour de l’incapacité humaine à entendre le silence pur. En revanche, il nous invitait à découvrir les joies de l’écoute active et minimaliste.
Écoute le silence puise à même ces thématiques et cette matière sonore extrêmement fertile : piano préparé, martèlement irrégulier d’une rangée de métronomes réglés à des tempi différents, ronde aléatoire pour radios à batteries et composition mixte pour malaxeur, eau, papier et bouteilles de plastique constituent quelques exemples des courtes performances musicales qui jalonnent le spectacle.
Le dispositif scénique est rafraîchissant et asymétrique. Les spectateurs sont assis de part et d’autre d’un écran de projection et n’ont donc pas accès à la même vision d’ensemble. D’un côté se trouve la pièce occupée par le pianiste et de l’autre, celle attribuée au performeur. Par moments, et c’est là une heureuse trouvaille de la part du metteur en scène Wouter Van Looy, une petite porte permet la rencontre de ces deux dimensions insécables de l’œuvre de Cage : la musique et la performance.
La jauge de la salle est toute petite, ce qui colle parfaitement avec l’esprit de l’art performatif. La contiguïté des corps génère une atmosphère d’intimité perceptuelle partagée et accrue. Les enfants (et les adultes aussi) sont réellement investis, voire absorbés dans le spectacle. Nos rires et nos gestes s’intègrent à la composition de l’œuvre qui nous est offerte.
C’est donc par le détour d’une performance interactive rythmée, joviale et poétique que nous sommes amenés à nous écouter et à nous regarder vivre les uns à côté des autres, dans un (non) silence polyphonique signifiant. Pas étonnant qu’Écoute le silence ait remporté le prix YAMA pour la performance musicale jeune public la plus créative et innovante en 2012.
Mise en scène de Wouter Van Looy. Une production de Zonzo Compagnie. Présenté dans le cadre du festival Les Coups de Théâtre au Conservatoire de musique et d’art dramatique jusqu’au 23 novembre 2014.
Après le magnifique concert cinématographique de La fille qui fixait, présenté les 19 et 20 novembre derniers, la compagnie gantoise Zonzo récidive en nous plongeant cette fois dans l’univers musical et performatif de l’artiste d’avant-garde américain John Cage.
Peut-on entendre le silence ? Quelle est l’essence de la musique ? Le son a-t-il une matérialité ?
C’est à une investigation ludique de ces questions aporétiques que Cage a consacré la majeure partie de son œuvre musicale. Il a donc exploré la vaste étendue de l’écologie sonore avec des compositions sollicitant le hasard, les ruptures et les objets quotidiens tels que les jouets ou les appareils domestiques.
La pièce la plus célèbre de Cage, 4’33 (1952), est une performance d’une durée de 4 minutes et 33 secondes. Devant un pianiste immobile et muet, le public était invité à écouter la densité sonore du « silence » qui régnait dans l’espace : le bruit des corps qui toussent, remuent et respirent, les chaises qui craquent… en d’autres termes, tous les sons habituellement ignorés et qui ne peuvent s’inscrire sur une partition musicale. L’œuvre radicale de Cage traitait avec humour de l’incapacité humaine à entendre le silence pur. En revanche, il nous invitait à découvrir les joies de l’écoute active et minimaliste.
Écoute le silence puise à même ces thématiques et cette matière sonore extrêmement fertile : piano préparé, martèlement irrégulier d’une rangée de métronomes réglés à des tempi différents, ronde aléatoire pour radios à batteries et composition mixte pour malaxeur, eau, papier et bouteilles de plastique constituent quelques exemples des courtes performances musicales qui jalonnent le spectacle.
Le dispositif scénique est rafraîchissant et asymétrique. Les spectateurs sont assis de part et d’autre d’un écran de projection et n’ont donc pas accès à la même vision d’ensemble. D’un côté se trouve la pièce occupée par le pianiste et de l’autre, celle attribuée au performeur. Par moments, et c’est là une heureuse trouvaille de la part du metteur en scène Wouter Van Looy, une petite porte permet la rencontre de ces deux dimensions insécables de l’œuvre de Cage : la musique et la performance.
La jauge de la salle est toute petite, ce qui colle parfaitement avec l’esprit de l’art performatif. La contiguïté des corps génère une atmosphère d’intimité perceptuelle partagée et accrue. Les enfants (et les adultes aussi) sont réellement investis, voire absorbés dans le spectacle. Nos rires et nos gestes s’intègrent à la composition de l’œuvre qui nous est offerte.
C’est donc par le détour d’une performance interactive rythmée, joviale et poétique que nous sommes amenés à nous écouter et à nous regarder vivre les uns à côté des autres, dans un (non) silence polyphonique signifiant. Pas étonnant qu’Écoute le silence ait remporté le prix YAMA pour la performance musicale jeune public la plus créative et innovante en 2012.
Écoute le silence, un voyage avec John Cage
Mise en scène de Wouter Van Looy. Une production de Zonzo Compagnie. Présenté dans le cadre du festival Les Coups de Théâtre au Conservatoire de musique et d’art dramatique jusqu’au 23 novembre 2014.