La mise en scène de Marie-Josée Bastien nous présente un Macbeth froid et atemporel, qui n’est pas sans rappeler son Hamlet monté en 2013. C’est un univers d’épées et de châteaux, mais aussi de katanas, de masques à gaz et de mitraillettes. Le décor, modulable et reconfiguré pour diversifier les espaces de jeu, est tout de métal et d’inox aseptisé, chirurgical. L’ambiance est oppressante, les lames sont omniprésentes et on avance de tableau en tableau au rythme d’une musique chargée, industrielle.
Jean-Sébastien Ouellet incarne un Macbeth à hauteur d’homme, héros un peu incrédule devant les augures de gloire que lui annoncent les sorcières, devant la couronne à sa portée. C’est un guerrier aux rares faits d’armes, dont on sent néanmoins les vacillements, le grain humain ; grâce à cette profondeur, on peut entrer tranquillement dans le cœur noirci d’un homme. Il est épaulé par Érika Gagnon en Lady Macbeth parfaitement perfide, à deux ils joueront les serviteurs bienveillants, cependant que leur plan malsain s’ébauche et que le mal s’enracine en eux, irrésistible, jusqu’au meurtre du bon Duncan.
Tout, par la suite, ne sera plus qu’un jeu. Le duo s’enfonce dans sa déchéance, on le voit descendre dans le seul calcul, s’y installer à demeure. Et la cassure est visible. Le nouveau roi règne au milieu de ses convives dubitatifs, à ses côtés sans y être tout à fait, un lien s’est définitivement rompu. Quand le souverain voit le fantôme d’un de ses rivaux écartés lui revenir au milieu d’un festin, la scène a beau présenter quelque chose de grotesque, on y croit néanmoins, on vit le malaise. Parce qu’à ce moment, Macbeth fait encore partie des humains, quelque chose le raccroche toujours à nous.
La pièce expose, dans sa deuxième partie, un Macbeth résolument basculé dans la folie. Mais voilà, cette folie, trop vite, n’a plus rien d’humain. Un décalage s’insère entre le spectateur et le rôle-titre. Quand sa complice meurt, on peine à sentir où se trouve le personnage, à se rattacher à lui. Le monstre est un monstre. Tous les éléments sont en place, les évènements se succèdent de façon logique vers une fin annoncée, mais sans enjeu.
Devant soi, on a un personnage résolument malveillant, unilatéralement malveillant. C’était une façon de donner de la place aux autres personnages et à leur complexité, peut-être. Les visées de ceux-ci, Macduff, Malcolm et comparses, deviennent toutefois si nettes que les dilemmes du cœur humain ne sont plus à chercher : l’affaire est entendue, tuons le traitre. Les adversaires de Macbeth se liguent, habités de la colère des justes. Et s’ils vivent des sentiments forts, on peine néanmoins à trouver en eux des hésitations qu’on pourrait habiter avec eux. La suite, de toute façon, est écrite : il ne s’agit plus que de trouver comment unir les forces et reprendre le château.
Texte de William Shakespeare. Traduction de Paul Lefebvre. Mise en scène de Marie-Josée Bastien Une production du Théâtre du Trident. Au Théâtre du Trident jusqu’au 16 mai 2015.
La mise en scène de Marie-Josée Bastien nous présente un Macbeth froid et atemporel, qui n’est pas sans rappeler son Hamlet monté en 2013. C’est un univers d’épées et de châteaux, mais aussi de katanas, de masques à gaz et de mitraillettes. Le décor, modulable et reconfiguré pour diversifier les espaces de jeu, est tout de métal et d’inox aseptisé, chirurgical. L’ambiance est oppressante, les lames sont omniprésentes et on avance de tableau en tableau au rythme d’une musique chargée, industrielle.
Jean-Sébastien Ouellet incarne un Macbeth à hauteur d’homme, héros un peu incrédule devant les augures de gloire que lui annoncent les sorcières, devant la couronne à sa portée. C’est un guerrier aux rares faits d’armes, dont on sent néanmoins les vacillements, le grain humain ; grâce à cette profondeur, on peut entrer tranquillement dans le cœur noirci d’un homme. Il est épaulé par Érika Gagnon en Lady Macbeth parfaitement perfide, à deux ils joueront les serviteurs bienveillants, cependant que leur plan malsain s’ébauche et que le mal s’enracine en eux, irrésistible, jusqu’au meurtre du bon Duncan.
Tout, par la suite, ne sera plus qu’un jeu. Le duo s’enfonce dans sa déchéance, on le voit descendre dans le seul calcul, s’y installer à demeure. Et la cassure est visible. Le nouveau roi règne au milieu de ses convives dubitatifs, à ses côtés sans y être tout à fait, un lien s’est définitivement rompu. Quand le souverain voit le fantôme d’un de ses rivaux écartés lui revenir au milieu d’un festin, la scène a beau présenter quelque chose de grotesque, on y croit néanmoins, on vit le malaise. Parce qu’à ce moment, Macbeth fait encore partie des humains, quelque chose le raccroche toujours à nous.
La pièce expose, dans sa deuxième partie, un Macbeth résolument basculé dans la folie. Mais voilà, cette folie, trop vite, n’a plus rien d’humain. Un décalage s’insère entre le spectateur et le rôle-titre. Quand sa complice meurt, on peine à sentir où se trouve le personnage, à se rattacher à lui. Le monstre est un monstre. Tous les éléments sont en place, les évènements se succèdent de façon logique vers une fin annoncée, mais sans enjeu.
Devant soi, on a un personnage résolument malveillant, unilatéralement malveillant. C’était une façon de donner de la place aux autres personnages et à leur complexité, peut-être. Les visées de ceux-ci, Macduff, Malcolm et comparses, deviennent toutefois si nettes que les dilemmes du cœur humain ne sont plus à chercher : l’affaire est entendue, tuons le traitre. Les adversaires de Macbeth se liguent, habités de la colère des justes. Et s’ils vivent des sentiments forts, on peine néanmoins à trouver en eux des hésitations qu’on pourrait habiter avec eux. La suite, de toute façon, est écrite : il ne s’agit plus que de trouver comment unir les forces et reprendre le château.
Macbeth
Texte de William Shakespeare. Traduction de Paul Lefebvre. Mise en scène de Marie-Josée Bastien Une production du Théâtre du Trident. Au Théâtre du Trident jusqu’au 16 mai 2015.