Critiques

Footloose : Danse traditionnelle

Laurence Labat

La comédie musicale Footloose entend faire revivre le film iconique des années 1980 portant le même titre et mettant en vedette un jeune Kevin Bacon frondeur à souhait, dont le personnage, Ren, compte réintégrer la danse au quotidien d’une petite ville l’ayant interdite à la suite d’un accident où quelques jeunes gens ont perdu la vie. Si le spectacle n’a pas toute la subtilité et le mordant du long métrage, il procure certes quelques moments de pure joie.

Laurence Labat

Ceux-ci consistent essentiellement en quelques tableaux dansés reprenant les grands succès musicaux qui ponctuaient la trame sonore originale du film, tels Let’s Hear It for the Boys, Footloose et Holding Out for a Hero. Cette dernière chanson donne lieu à un numéro particulièrement enlevant, qui apporte une bouffée de fraîcheur à cette comédie musicale plutôt traditionnelle et convenue. Les airs créés pour le spectacle, qu’il s’agisse de complaintes – celle du révérend, celle des femmes que l’on tente systématiquement de faire taire – ou de duos amoureux entre le révérend et son épouse, apparaissent ringards, mièvres et fades, empêchant l’ensemble de la production d’avancer au rythme de la rage contenue de ces jeunes privés des exutoires que sont la musique et la danse.

La comédie musicale est ainsi privée du souffle juvénile, du sentiment d’urgence dont était empreint le film original réalisé par Herbert Ross et dont jouissait aussi la reprise nuancée qu’en a proposée Craig Brewer en 2011. Sur scène, on sent peu le désœuvrement des adolescents de Bomont et l’accent est davantage mis sur l’opposition entre le héros révolutionnaire venu de la grande ville et les résidents rétrogrades qui l’accueillent dans leur bled à grands coups de persécution bornée. En résulte un récit plutôt manichéen et sans surprises.

Laurence Labat

Autre aspect de la production qui laisse perplexe: l’usage du franglais par les villageois. Pourquoi, puisque le texte est adapté en français québécois, les personnages lancent-ils certaines répliques en anglais çà et là? La logique ayant dicté ce choix nous échappe. Puisque l’action se déroule dans une petite bourgade située au cœur des États-Unis, n’y a-t-il pas justement fort à parier que ses habitants sont unilingues?

À l’opposé, la scénographie du spectacle fonctionne à merveille. Projections et pièces de décor amovibles se complètent pour suggérer tantôt un pont, tantôt une église. Des casiers d’école aux usages multiples se transforment en salon ou encore suggèrent une voiture. Ingénieux. L’interprétation de la jeune Éléonore Lagacé dans le rôle d’Ariel, fille rebelle du révérend et petite amie de Ren, apporte aussi beaucoup à la production. Sa voix enchanteresse, de même que son jeu juste et expressif arrivent à faire oublier d’autres performances légèrement moins convaincantes.

Footloose

Musique: Tom Snow. Paroles: Dean Pitchford. Livret: Dean Pitchford et Walter Bobbie. Mise en scène, traduction et adaptation: Serge Postigo. Chorégraphies: Steve Bolton. Direction musicale: Guillaume St-Laurent. Scénographie: Pierre-Étienne Locas. Éclairages et vidéo: Lüz Studio (Matthieu Larivée). Costumes: Denis Lavoie. Accessoires: Alain Jenkins. Avec Éléonore Lagacé, Philippe Touzel, Dominique Côté, Émilie Josset, Tommy Joubert, Hélène Major, Sylvain Scott, Annie Éthier, Geneviève Bournival, Tanya Brideau, Laurie M. Leblanc, David Corriveau, Martin Rouette, Simon Labelle-Ouimet, Dominic Lorange, Marie-Ève Pelletier, Danièle Lorain, Joseph Bellerose et Tim Brink. Une production de Juste pour rire. Au Théâtre Saint-Denis jusqu’au 5 août 2017. À la Salle Albert-Rousseau du 30 juin au 28 juillet 2018.