Véronika Makdissi-Warren poursuit son exploration des univers clownesques et propose, avec le Théâtre Niveau Parking, une chronique douce, à peine amère, du quotidien d’un centre d’hébergements pour personnes âgées. Le titre du spectacle, CHSLD, est en fait à comprendre comme: Centre d’Humble Survivants Légèrement Détraqués!
Les «humbles survivants» sont en fait des acteurs relativement jeunes et plutôt en forme, interprétant, avec force acrobaties, 5 personnes âgées qui laissent passer le temps et s’enfuir leurs souvenirs, mais qui s’allument de manière fantaisiste dans des situations cocasses: la distribution de pilules devient un moment de musique, l’urgence d’aller aux toilettes met tout le monde KO, pour manger sa soupe une pensionnaire à la main tremblante va avoir besoin de l’aide et des pailles de tous pour se former une longue paille biscornue, etc. Les corps deviennent soudain souples et agiles, jouant de manière comique avec la chute possible, la maladresse.
C’est surtout un jeu choral, réglé au cordeau, de la part des 5 interprètes qui signent collectivement le texte et qui se lancent dans ces joutes avec une énergie communicative. Ils sont tour à tour solidaires et jaloux, tendres et hargneux, faisant sans cesse appel à leur préposé Martin, qui est aux petits soins pour eux, mais qui va parfois être débordé ou excédé par leur malice. Tout peut être évoqué dans l’univers du clown et l’on peut basculer en une seconde dans un autre registre.
Le spectacle, gentil, aurait sûrement gagné en force à oser plonger dans des ruptures plus sombres ou troubles de la vieillesse. Il y a tout de même quelques ruptures, comme ce moment où Madame Blanchette, coincée dans son fauteuil roulant, se fait pipi dessus, avant d’être pudiquement changée sur scène au milieu du silence de tous. Ou ces moments de bascule dans l’univers mental d’un pensionnaire: retour en enfance de Mme Blanchette qui soudain quitte son fauteuil roulant, perte d’audition pour M. Ladouceur dont l’appareil auditif se détraque, retour sur les champs de bataille pour l’ancien militaire M. Garant, etc. Tous les acteurs sont alors au service de l’action scénique, joyeux chaos décrivant la plongée d’un des pensionnaires dans un moment de confusion.
Le dispositif est judicieux en ce qu’il permet de nombreuses entrées et sorties (du préposé), avec des portes battantes de chaque côté et un couloir d’accès en fond de scène. Il retranscrit parfaitement la fausse intimité, la perte de repère de ces personnes «recasées»: le salon que l’on voit ici évoqué avec quelques chaises est aussi, et avant tout, un lieu de circulation, vaguement réchauffé par deux plantes vertes et un grand tapis, et plus tard un sapin de Noël illuminé. Dans ce salon un peu vide, donnant sûrement sur de grandes fenêtres, à travers lesquelles tous s’abîment en silence dans la contemplation du «beau soleil», il y a une manière très juste d’évoquer le temps qui passe. On ne sait pas alors si les comédiens nous regardent, regardent le paysage ou leur vie, ou rien! Mais la suspension est douce et l’on se laisse gentiment séduire.
Texte: Véronika Makdissi-Warren et les comédiens. Mise en scène: Véronika Makdissi-Warren. Scénographie et accessoires: Christian Fontaine. Costumes et accessoires: Julie Morel. Éclairages: Mathieu C. Bernard. Maquillages: Geneviève Tremblay. Avec Marie-Pier Lagacé, Patrick Ouellet, Jocelyn Paré, Raphaël Posadas, Réjean Vallée et Karina Werneck Assis. Une coproduction du Théâtre la Bordée et du Théâtre Niveau Parking. À la Bordée jusqu’au 18 novembre 2017.
Véronika Makdissi-Warren poursuit son exploration des univers clownesques et propose, avec le Théâtre Niveau Parking, une chronique douce, à peine amère, du quotidien d’un centre d’hébergements pour personnes âgées. Le titre du spectacle, CHSLD, est en fait à comprendre comme: Centre d’Humble Survivants Légèrement Détraqués!
Les «humbles survivants» sont en fait des acteurs relativement jeunes et plutôt en forme, interprétant, avec force acrobaties, 5 personnes âgées qui laissent passer le temps et s’enfuir leurs souvenirs, mais qui s’allument de manière fantaisiste dans des situations cocasses: la distribution de pilules devient un moment de musique, l’urgence d’aller aux toilettes met tout le monde KO, pour manger sa soupe une pensionnaire à la main tremblante va avoir besoin de l’aide et des pailles de tous pour se former une longue paille biscornue, etc. Les corps deviennent soudain souples et agiles, jouant de manière comique avec la chute possible, la maladresse.
C’est surtout un jeu choral, réglé au cordeau, de la part des 5 interprètes qui signent collectivement le texte et qui se lancent dans ces joutes avec une énergie communicative. Ils sont tour à tour solidaires et jaloux, tendres et hargneux, faisant sans cesse appel à leur préposé Martin, qui est aux petits soins pour eux, mais qui va parfois être débordé ou excédé par leur malice. Tout peut être évoqué dans l’univers du clown et l’on peut basculer en une seconde dans un autre registre.
Le spectacle, gentil, aurait sûrement gagné en force à oser plonger dans des ruptures plus sombres ou troubles de la vieillesse. Il y a tout de même quelques ruptures, comme ce moment où Madame Blanchette, coincée dans son fauteuil roulant, se fait pipi dessus, avant d’être pudiquement changée sur scène au milieu du silence de tous. Ou ces moments de bascule dans l’univers mental d’un pensionnaire: retour en enfance de Mme Blanchette qui soudain quitte son fauteuil roulant, perte d’audition pour M. Ladouceur dont l’appareil auditif se détraque, retour sur les champs de bataille pour l’ancien militaire M. Garant, etc. Tous les acteurs sont alors au service de l’action scénique, joyeux chaos décrivant la plongée d’un des pensionnaires dans un moment de confusion.
Le dispositif est judicieux en ce qu’il permet de nombreuses entrées et sorties (du préposé), avec des portes battantes de chaque côté et un couloir d’accès en fond de scène. Il retranscrit parfaitement la fausse intimité, la perte de repère de ces personnes «recasées»: le salon que l’on voit ici évoqué avec quelques chaises est aussi, et avant tout, un lieu de circulation, vaguement réchauffé par deux plantes vertes et un grand tapis, et plus tard un sapin de Noël illuminé. Dans ce salon un peu vide, donnant sûrement sur de grandes fenêtres, à travers lesquelles tous s’abîment en silence dans la contemplation du «beau soleil», il y a une manière très juste d’évoquer le temps qui passe. On ne sait pas alors si les comédiens nous regardent, regardent le paysage ou leur vie, ou rien! Mais la suspension est douce et l’on se laisse gentiment séduire.
CHSLD
Texte: Véronika Makdissi-Warren et les comédiens. Mise en scène: Véronika Makdissi-Warren. Scénographie et accessoires: Christian Fontaine. Costumes et accessoires: Julie Morel. Éclairages: Mathieu C. Bernard. Maquillages: Geneviève Tremblay. Avec Marie-Pier Lagacé, Patrick Ouellet, Jocelyn Paré, Raphaël Posadas, Réjean Vallée et Karina Werneck Assis. Une coproduction du Théâtre la Bordée et du Théâtre Niveau Parking. À la Bordée jusqu’au 18 novembre 2017.