Traumatisée par le massacre de Sandy Hook, qui a fait près de trente morts – dont vingt enfants âgés de 5 à 10 ans – en 2012, et obsédée par la sécurité inadéquate de l’école où elle enseigne, madame Catherine (qui parle d’elle-même à la 3e personne) décide de préparer ses élèves à l’éventuelle venue d’un tireur fou au moyen d’un programme en six étapes.
Elle ira jusqu’à apporter un pistolet dans sa classe pour défendre sa thèse, devenant ainsi elle-même le danger contre lequel elle tente de prémunir ses élèves. Une pièce écrite il y a plusieurs mois, mais qui trouve un écho étrange dans l’actualité récente, après que Donald Trump a proposé d’armer les professeurs en réponse à la dernière tuerie survenue dans une école de Floride. Madame Catherine prépare sa classe de troisième à l’irrémédiable n’est toutefois pas un pamphlet contre le port d’armes, mais plutôt une réflexion sur la paranoïa, la peur qui nous ronge au point de nous gâcher l’existence et de nous rendre dangereux, une peur protéiforme qui peut s’incarner aussi bien dans le terrorisme, que la pollution ou les OGM, voire les trois ensemble.
Étiquetée «comédie noire», la pièce écrite par Elena Belyea et traduite par Olivier Sylvestre joue sur le décalage entre la gravité du propos et de l’état psychoémotionnel de l’enseignante, et les stratégies employées pour s’adresser à son auditoire. Pour capter l’attention de ses élèves, tous les moyens sont bons, du spectacle de marionnettes, au rap, en passant par les masques et les dessins au tableau. Il en ressort l’impression dérangeante (et légèrement irritante) que le texte s’adresse parfois à des enfants en bas âge, parfois à des adultes.
Le moins que l’on puisse dire est qu’Alice Pascual se donne à 100% pour incarner cette professeure au bord de la crise de nerfs, mais énergique, pleine d’affection pour ses élèves et vaguement embarrassée par ses propres dérapages. Dans le contexte actuel, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a une forme de responsabilité sociale à endosser un rôle comme celui-là, et à éveiller le public quant à l’importance de ne pas céder à la terreur. Le metteur en scène Jon Lachlan Stewart a pris le parti de briser le 4e mur et de transformer les spectateurs en élèves, certains munis d’étiquettes autocollantes portant le prénom d’un écolier. L’enseignante s’adresse ainsi directement à nous et nous demande même de participer: répondre à quelques questions, mimer un coyote attentif avec nos mains, faire semblant de courir et de se cacher, chanter, etc.
Malheureusement, ce choix installe un climat clownesque qui court-circuite le sentiment d’incompréhension et d’inquiétude, voire de peur, qui devrait être éprouvé en voyant une femme perdre progressivement pied et sombrer dans le délire. Les jeux de lumière conçus par Zoe Roux tentent bien de recréer ce sentiment, avec des néons qui vacillent au gré des épisodes plus ou moins psychotiques de l’enseignante, mais, au bout du compte, c’est plutôt une impression légèrement caricaturale qui se dégage de l’ensemble.
Texte: Elena Belyea. Traduction: Olivier Sylvestre. Mise en scène: Jon Lachlan Stewart. Scénographie: Cédric Lord. Éclairages et costumes: Zoe Roux. Avec Alice Pascual. Une production du Surreal SoReal Theatre. Dans la salle intime du Théâtre Prospero jusqu’au 14 avril 2018.
Traumatisée par le massacre de Sandy Hook, qui a fait près de trente morts – dont vingt enfants âgés de 5 à 10 ans – en 2012, et obsédée par la sécurité inadéquate de l’école où elle enseigne, madame Catherine (qui parle d’elle-même à la 3e personne) décide de préparer ses élèves à l’éventuelle venue d’un tireur fou au moyen d’un programme en six étapes.
Elle ira jusqu’à apporter un pistolet dans sa classe pour défendre sa thèse, devenant ainsi elle-même le danger contre lequel elle tente de prémunir ses élèves. Une pièce écrite il y a plusieurs mois, mais qui trouve un écho étrange dans l’actualité récente, après que Donald Trump a proposé d’armer les professeurs en réponse à la dernière tuerie survenue dans une école de Floride. Madame Catherine prépare sa classe de troisième à l’irrémédiable n’est toutefois pas un pamphlet contre le port d’armes, mais plutôt une réflexion sur la paranoïa, la peur qui nous ronge au point de nous gâcher l’existence et de nous rendre dangereux, une peur protéiforme qui peut s’incarner aussi bien dans le terrorisme, que la pollution ou les OGM, voire les trois ensemble.
Étiquetée «comédie noire», la pièce écrite par Elena Belyea et traduite par Olivier Sylvestre joue sur le décalage entre la gravité du propos et de l’état psychoémotionnel de l’enseignante, et les stratégies employées pour s’adresser à son auditoire. Pour capter l’attention de ses élèves, tous les moyens sont bons, du spectacle de marionnettes, au rap, en passant par les masques et les dessins au tableau. Il en ressort l’impression dérangeante (et légèrement irritante) que le texte s’adresse parfois à des enfants en bas âge, parfois à des adultes.
Le moins que l’on puisse dire est qu’Alice Pascual se donne à 100% pour incarner cette professeure au bord de la crise de nerfs, mais énergique, pleine d’affection pour ses élèves et vaguement embarrassée par ses propres dérapages. Dans le contexte actuel, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a une forme de responsabilité sociale à endosser un rôle comme celui-là, et à éveiller le public quant à l’importance de ne pas céder à la terreur. Le metteur en scène Jon Lachlan Stewart a pris le parti de briser le 4e mur et de transformer les spectateurs en élèves, certains munis d’étiquettes autocollantes portant le prénom d’un écolier. L’enseignante s’adresse ainsi directement à nous et nous demande même de participer: répondre à quelques questions, mimer un coyote attentif avec nos mains, faire semblant de courir et de se cacher, chanter, etc.
Malheureusement, ce choix installe un climat clownesque qui court-circuite le sentiment d’incompréhension et d’inquiétude, voire de peur, qui devrait être éprouvé en voyant une femme perdre progressivement pied et sombrer dans le délire. Les jeux de lumière conçus par Zoe Roux tentent bien de recréer ce sentiment, avec des néons qui vacillent au gré des épisodes plus ou moins psychotiques de l’enseignante, mais, au bout du compte, c’est plutôt une impression légèrement caricaturale qui se dégage de l’ensemble.
Madame Catherine prépare sa classe de troisième à l’irrémédiable
Texte: Elena Belyea. Traduction: Olivier Sylvestre. Mise en scène: Jon Lachlan Stewart. Scénographie: Cédric Lord. Éclairages et costumes: Zoe Roux. Avec Alice Pascual. Une production du Surreal SoReal Theatre. Dans la salle intime du Théâtre Prospero jusqu’au 14 avril 2018.