Artiste au parcours atypique, Johann Le Guillerm a travaillé avec le cirque Archaos et la volière Dromesko, deux compagnies marquantes du nouveau cirque français, avant de fonder sa propre compagnie, Cirque ici. Il réalise dans sa trajectoire pluridisciplinaire des œuvres absolument originales résultant de sa « pratique de l’espace des points de vue ». Lors de sa première visite au Carrefour International de théâtre de Québec en 2008, il avait présenté Secret, un spectacle circassien évolutif sous chapiteau, devenu aujourd’hui Terces. Le Carrefour a eu l’excellente idée de le programmer à nouveau avec Le Pas Grand Chose, présenté dans le programme de l’événement comme une « conférence ‘pataphysique ludique ».
Pas de prouesses physiques dans ce spectacle, mais plutôt une jonglerie de l’esprit à partir de signes et de concepts. L’artiste entre en scène en poussant un chariot à tiroirs équipé d’une caméra, dont le dessus sert de tableau pour dessiner à la craie. Il y déposera les divers objets de ses démonstrations, dont des rondelles métalliques, des volumes géométriques, des fruits, des pâtes alimentaires. La mise en scène minimale utilise des équipements de projection et d’éclairage pour donner à voir des dessins et schémas, des manipulations aux gestes précis. Ce dépouillement fait ressortir la livraison d’un texte où l’artiste s’adresse directement au public.
D’entrée de jeu, Le Guillerm mentionne l’autisme qu’on lui a diagnostiqué à l’adolescence. Ce trait de personnalité contribue peut-être à en faire un « artiste dont la quête ontologique est de réussir sa folie ». À la recherche du chemin qui ne le mène pas à Rome, il propose de faire le point sur le point, désirant mettre un peu d’ordre dans le chaos des ressentis et des questionnements qui l’assaillent. Il ausculte d’abord la calligraphie des chiffres, et les conclusions parfois drolatiques de ses réflexions et les circonvolutions de sa logique nous amusent et nous épatent.
Pince-sans-rire, il choisit soigneusement ses mots pour partager avec les spectateurs et spectatrices les trouvailles de ses recherches, effectuées sur divers chantiers : les amas, les mentines, les entrelas, les élastiques, les graphes… Ainsi, le poétique chantier des mentines s’intéresse à une surface de sphère – la pelure d’une clémentine – qu’il découpe selon différents tracés pour obtenir des figures animales ou humaines, en les mettant ensuite à plat. Avec l’archimouvant, mélange d’architecture et de mouvement, il fait s’animer des objets, organiques ou mélangeant l’organique et l’industriel, qu’il vaporise avec le liquide d’un petit tube sorti de sa poche. Presque magique !
Se jouant des conventions cartésiennes, l’artiste réalise des poèmes graphiques inspirés de formes aux logiques invisibles, invente des termes pleins de fantaisie et de sens. Son questionnement sur la perception et le point de vue, dans l’esprit d’une spatiophilographie, considère à la fois le fait d’observer et celui d’être la chose observée. Le Guillerm ne réinvente pas la roue, mais presque. Pour sa sortie de scène, il utilise une demi-roue de sa conception sur sa carriole où il fixe un banc avec siège pivotant. Il s’y assoit ensuite, tournoie lentement, créant un balancement. Alors que ce véhicule inusité le transporte vers la coulisse, la lumière s’éteint.
En présentant cette conférence fort originale et instructive, indéniablement teintée d’humour, non seulement le Carrefour fait preuve d’audace, mais il met le public en contact avec un artiste qui questionne sa pratique avec une tournure d’esprit réjouissante et jubilatoire. Parallèlement à cette œuvre pour la scène qu’est Le Pas Grand Chose, plusieurs des « Monstrations » de Johann Le Guillerm, comme La Transumante, Les Droliques, L’Aplanatarium ou Encatation sont présentées dans diverses villes en France : à surveiller et à voir lors de votre prochain voyage au pays de Molière.
Une création de Johann Le Guillerm. Performée par Johann Le Guillerm. Création lumière : Anne Dutoya. Régie lumière : Flora Hecquet. Régie vidéo : Jacques Hoepffner. Création sonore : Alexandre Piques. Vidéographie : Christophe Rannou. Costumes : Anaïs Abel. Fabrication et construction : Sylvain Ohl. Décors : Alexandra Boucan. Une production de Cirque ici, en coproduction avec 2 Pôles Cirque en Normandie – La Brèche à Cherbourg – Cirque-Théâtre d’Elbeuf?, Agora – Pôle national des arts du cirque de Boulazac, Archaos – Pôle National des Arts du Cirque Méditerranée, Le Grand T – Théâtre de Loire Atlantique, Le Monfort Paris, Tandem scène nationale, Théâtre de l’Agora – scène nationale d’Evry et de l’Essonne, Les Treize Arches – scène conventionnée de Brive, Le Volcan – Scène nationale du Havre, CREAC – La cité Cirque de Bègles. Présentée au Théâtre La Bordée à l’occasion du Carrefour international de Québec du 28 au 30 mai 2019.
Artiste au parcours atypique, Johann Le Guillerm a travaillé avec le cirque Archaos et la volière Dromesko, deux compagnies marquantes du nouveau cirque français, avant de fonder sa propre compagnie, Cirque ici. Il réalise dans sa trajectoire pluridisciplinaire des œuvres absolument originales résultant de sa « pratique de l’espace des points de vue ». Lors de sa première visite au Carrefour International de théâtre de Québec en 2008, il avait présenté Secret, un spectacle circassien évolutif sous chapiteau, devenu aujourd’hui Terces. Le Carrefour a eu l’excellente idée de le programmer à nouveau avec Le Pas Grand Chose, présenté dans le programme de l’événement comme une « conférence ‘pataphysique ludique ».
Pas de prouesses physiques dans ce spectacle, mais plutôt une jonglerie de l’esprit à partir de signes et de concepts. L’artiste entre en scène en poussant un chariot à tiroirs équipé d’une caméra, dont le dessus sert de tableau pour dessiner à la craie. Il y déposera les divers objets de ses démonstrations, dont des rondelles métalliques, des volumes géométriques, des fruits, des pâtes alimentaires. La mise en scène minimale utilise des équipements de projection et d’éclairage pour donner à voir des dessins et schémas, des manipulations aux gestes précis. Ce dépouillement fait ressortir la livraison d’un texte où l’artiste s’adresse directement au public.
D’entrée de jeu, Le Guillerm mentionne l’autisme qu’on lui a diagnostiqué à l’adolescence. Ce trait de personnalité contribue peut-être à en faire un « artiste dont la quête ontologique est de réussir sa folie ». À la recherche du chemin qui ne le mène pas à Rome, il propose de faire le point sur le point, désirant mettre un peu d’ordre dans le chaos des ressentis et des questionnements qui l’assaillent. Il ausculte d’abord la calligraphie des chiffres, et les conclusions parfois drolatiques de ses réflexions et les circonvolutions de sa logique nous amusent et nous épatent.
Pince-sans-rire, il choisit soigneusement ses mots pour partager avec les spectateurs et spectatrices les trouvailles de ses recherches, effectuées sur divers chantiers : les amas, les mentines, les entrelas, les élastiques, les graphes… Ainsi, le poétique chantier des mentines s’intéresse à une surface de sphère – la pelure d’une clémentine – qu’il découpe selon différents tracés pour obtenir des figures animales ou humaines, en les mettant ensuite à plat. Avec l’archimouvant, mélange d’architecture et de mouvement, il fait s’animer des objets, organiques ou mélangeant l’organique et l’industriel, qu’il vaporise avec le liquide d’un petit tube sorti de sa poche. Presque magique !
Se jouant des conventions cartésiennes, l’artiste réalise des poèmes graphiques inspirés de formes aux logiques invisibles, invente des termes pleins de fantaisie et de sens. Son questionnement sur la perception et le point de vue, dans l’esprit d’une spatiophilographie, considère à la fois le fait d’observer et celui d’être la chose observée. Le Guillerm ne réinvente pas la roue, mais presque. Pour sa sortie de scène, il utilise une demi-roue de sa conception sur sa carriole où il fixe un banc avec siège pivotant. Il s’y assoit ensuite, tournoie lentement, créant un balancement. Alors que ce véhicule inusité le transporte vers la coulisse, la lumière s’éteint.
En présentant cette conférence fort originale et instructive, indéniablement teintée d’humour, non seulement le Carrefour fait preuve d’audace, mais il met le public en contact avec un artiste qui questionne sa pratique avec une tournure d’esprit réjouissante et jubilatoire. Parallèlement à cette œuvre pour la scène qu’est Le Pas Grand Chose, plusieurs des « Monstrations » de Johann Le Guillerm, comme La Transumante, Les Droliques, L’Aplanatarium ou Encatation sont présentées dans diverses villes en France : à surveiller et à voir lors de votre prochain voyage au pays de Molière.
Le Pas Grand Chose
Une création de Johann Le Guillerm. Performée par Johann Le Guillerm. Création lumière : Anne Dutoya. Régie lumière : Flora Hecquet. Régie vidéo : Jacques Hoepffner. Création sonore : Alexandre Piques. Vidéographie : Christophe Rannou. Costumes : Anaïs Abel. Fabrication et construction : Sylvain Ohl. Décors : Alexandra Boucan. Une production de Cirque ici, en coproduction avec 2 Pôles Cirque en Normandie – La Brèche à Cherbourg – Cirque-Théâtre d’Elbeuf?, Agora – Pôle national des arts du cirque de Boulazac, Archaos – Pôle National des Arts du Cirque Méditerranée, Le Grand T – Théâtre de Loire Atlantique, Le Monfort Paris, Tandem scène nationale, Théâtre de l’Agora – scène nationale d’Evry et de l’Essonne, Les Treize Arches – scène conventionnée de Brive, Le Volcan – Scène nationale du Havre, CREAC – La cité Cirque de Bègles. Présentée au Théâtre La Bordée à l’occasion du Carrefour international de Québec du 28 au 30 mai 2019.