Dès que l’on pénètre dans la Petite Licorne, aménagée façon cabaret, le bric-à-brac qui trône sur l’aire de jeu saute aux yeux : une console de musique d’où pendent des bâtons glacés dégelés, des caisses de lait faisant office de rangement, des livres, une collection de t-shirts sur cintres, un gros tas de quelque chose, caché sous une bâche en plastique orange, un micro, une petite scène ornée d’un vieux téléviseur, un je-ne-sais-quoi devant une caméra (cela s’avérera être un cornet de glace)… Il y a de tout, partout, une sorte de caverne d’Alibaba, à l’image du spectacle que nous offre ensuite Mathieu Gosselin.
Ce que nous propose le comédien-auteur (à qui l’on doit notamment les textes de La Fête sauvage et de Province), c’est une plongée dans son univers, de l’enfant passionné par la civilisation égyptienne à l’adulte capable de parler d’un sujet improbable comme le socialisme de la NFL pendant trois minutes; de l’étudiant du secondaire écrivant des poèmes à rimes au diplômé de l’École nationale de théâtre qui procrastine; du fils dont la mère a gardé les costumes fabriqués main au père qui s’interroge sur ce qu’il lègue à sa progéniture; du petit gars curieux et créatif au « gros gars » verbomoteur et sensible, qui a trop de temps et crie de l’intérieur.
Temps qui passe et temps perdu
Gosselin se livre pour nous à une archéologie intime, exhumant de son passé des vidéos, des compilations musicales, des livres, des poèmes, des lettres, le tout sans ordre apparent, dévoilant la richesse de sa vie intérieure, et incarnant ce qu’il revendique dans l’un de ses textes : le droit à la fantaisie.
Il ose ainsi se révéler dans sa singularité et ses imperfections, exposer sa vision du monde et ses questionnements, et nous porte à réfléchir sur ce qui nous motive, ce que nous réalisons ou que nous n’achevons jamais, ce que nous éteignons en nous au lieu de l’attiser, ce que nous exprimons et ce que nous réprimons, ce que nous aimons, bref, ce qui fait de nous ce que nous sommes, et ce que nous pouvons être en nous assumant pleinement. Si le désir de s’inscrire en dehors des cadres est manifeste et appréciable, on regrette toutefois que l’ensemble manque de cohésion et de profondeur, comme si on nous présentait un travail inabouti.
La mise en scène de Sophie Cadieux accentue l’effet de foisonnement et d’exploration sans artifices. Ainsi, Gosselin trébuche, se trompe, s’exclame, interagit avec le public, farfouille, bidouille, se moque de lui-même, est interrompu par une visite-surprise, etc. Tout donne l’impression d’un déballage un peu improvisé qui, s’il sonne parfois légèrement faux, concourt à créer avec le comédien une connivence et une proximité qui font écho à l’affection que lui porte la metteuse en scène et dont elle ne se cache pas.
Gosselin le dit lui-même au début du spectacle : « Je suis né double toutte. » C’est bien avec cette perception que l’on ressort de la salle, heureux, heureuse de constater que certaines personnes « restent fidèles à leur feu » et convaincu·es qu’en ces temps difficiles nous avons, plus que jamais, besoin de poésie.
Texte et interprétation : Mathieu Gosselin. Mise en scène : Sophie Cadieux. Décor et accessoires : Julie Vallée-Léger. Costumes : Francis-William Rhéaume. Éclairages : Leticia Hamaoui. Musique : Frédéric Auger. Interlocuteur sensible : Justin Laramée. Une production du Théâtre de la Banquette arrière, en codiffusion avec La Manufacture, présentée à La Licorne jusqu’au 14 mai 2021, et en webdiffusion du 24 avril au 8 mai 2021.
Dès que l’on pénètre dans la Petite Licorne, aménagée façon cabaret, le bric-à-brac qui trône sur l’aire de jeu saute aux yeux : une console de musique d’où pendent des bâtons glacés dégelés, des caisses de lait faisant office de rangement, des livres, une collection de t-shirts sur cintres, un gros tas de quelque chose, caché sous une bâche en plastique orange, un micro, une petite scène ornée d’un vieux téléviseur, un je-ne-sais-quoi devant une caméra (cela s’avérera être un cornet de glace)… Il y a de tout, partout, une sorte de caverne d’Alibaba, à l’image du spectacle que nous offre ensuite Mathieu Gosselin.
Ce que nous propose le comédien-auteur (à qui l’on doit notamment les textes de La Fête sauvage et de Province), c’est une plongée dans son univers, de l’enfant passionné par la civilisation égyptienne à l’adulte capable de parler d’un sujet improbable comme le socialisme de la NFL pendant trois minutes; de l’étudiant du secondaire écrivant des poèmes à rimes au diplômé de l’École nationale de théâtre qui procrastine; du fils dont la mère a gardé les costumes fabriqués main au père qui s’interroge sur ce qu’il lègue à sa progéniture; du petit gars curieux et créatif au « gros gars » verbomoteur et sensible, qui a trop de temps et crie de l’intérieur.
Temps qui passe et temps perdu
Gosselin se livre pour nous à une archéologie intime, exhumant de son passé des vidéos, des compilations musicales, des livres, des poèmes, des lettres, le tout sans ordre apparent, dévoilant la richesse de sa vie intérieure, et incarnant ce qu’il revendique dans l’un de ses textes : le droit à la fantaisie.
Il ose ainsi se révéler dans sa singularité et ses imperfections, exposer sa vision du monde et ses questionnements, et nous porte à réfléchir sur ce qui nous motive, ce que nous réalisons ou que nous n’achevons jamais, ce que nous éteignons en nous au lieu de l’attiser, ce que nous exprimons et ce que nous réprimons, ce que nous aimons, bref, ce qui fait de nous ce que nous sommes, et ce que nous pouvons être en nous assumant pleinement. Si le désir de s’inscrire en dehors des cadres est manifeste et appréciable, on regrette toutefois que l’ensemble manque de cohésion et de profondeur, comme si on nous présentait un travail inabouti.
La mise en scène de Sophie Cadieux accentue l’effet de foisonnement et d’exploration sans artifices. Ainsi, Gosselin trébuche, se trompe, s’exclame, interagit avec le public, farfouille, bidouille, se moque de lui-même, est interrompu par une visite-surprise, etc. Tout donne l’impression d’un déballage un peu improvisé qui, s’il sonne parfois légèrement faux, concourt à créer avec le comédien une connivence et une proximité qui font écho à l’affection que lui porte la metteuse en scène et dont elle ne se cache pas.
Gosselin le dit lui-même au début du spectacle : « Je suis né double toutte. » C’est bien avec cette perception que l’on ressort de la salle, heureux, heureuse de constater que certaines personnes « restent fidèles à leur feu » et convaincu·es qu’en ces temps difficiles nous avons, plus que jamais, besoin de poésie.
Gros gars, prise de parole poétique et analogique
Texte et interprétation : Mathieu Gosselin. Mise en scène : Sophie Cadieux. Décor et accessoires : Julie Vallée-Léger. Costumes : Francis-William Rhéaume. Éclairages : Leticia Hamaoui. Musique : Frédéric Auger. Interlocuteur sensible : Justin Laramée. Une production du Théâtre de la Banquette arrière, en codiffusion avec La Manufacture, présentée à La Licorne jusqu’au 14 mai 2021, et en webdiffusion du 24 avril au 8 mai 2021.