Le quatrième roman de l’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, La Plus Secrète Mémoire des hommes, a remporté le prix Goncourt l’an dernier. Ce récit rédigé dans une langue remarquable possède un souffle profond aux accents poétiques. Issu de cultures où l’oralité et la pratique du conte sont des modes de transmission millénaires, il ne dépérit pas lors de son passage à la scène.
Le livre et la pièce décrivent l’enquête fictive menée par un jeune écrivain, Deegane Latyr Faye, au sujet d’un roman paru en 1938, Le Labyrinthe de l’inhumain, seul livre de l’auteur T.C. Elimane. Sa quête le conduira dans plusieurs pays afin de retrouver les traces laissées par le romancier maudit avant de disparaître.
Ce périple démontre surtout les effets à long terme du colonialisme français en Afrique. Il explore l’ambiguïté des relations entretenues par les écrivain·es africain·es avec Paris, capitale littéraire s’il en est, qui agit en véritable aimant sur les cerveaux créatifs de tous les pays. Rappelons-nous, à cet effet, l’attrait irrésistible que représentait la ville sur les artistes québécois à une époque pas si lointaine.
Il est donc ici beaucoup question de création littéraire et d’exil, d’identité et de solitude. Ce n’est pas en le cherchant ailleurs que notre pays nous quitte vraiment, dira-t-on en ces mots : « ayez une terre à vous, car il n’y a que là que vous existerez pour vous, mais aussi pour les autres ». On parle, en outre, de livres et d’auteurs et d’autrices à la recherche de leur âme perdue. « Écrire ou ne pas écrire », voilà la hantise de ceux et celles qui prennent la plume et/ou qui lisent.
Lecture théâtrale
Cette lecture théâtrale – c’est-à-dire beaucoup plus élaborée qu’une simple mise en lecture – qu’en font les interprètes originaires du Burkina Faso Aristide Tarnagada et Odile Sankara conserve toute la saveur et la beauté du texte original. Les dialogues, intercalés avec de longs monologues, donnent d’ailleurs lieu à des scènes alliant de fortes émotions à une gestuelle au diapason.
Sur un plateau nu, éclairé de belle façon par Claire Seyller, le comédien et la comédienne jouent tous les personnages, modifiant leur voix ici, arborant un couvre-chef différent là, et utilisant quelques accessoires. Le musicien québécois Antoine Berthiaume complète le trio en interprétant ses propres compositions atmosphériques et en y allant de la lecture de certaines répliques.
Bien que l’adaptation qu’Aristide Tarnagada a réalisée du roman cherche l’essentiel, il nous est apparu que certains éclaircissements au sujet du sort de T.C. Elimane, présents dans le livre, manquaient ici à notre compréhension. D’autant plus que certains personnages secondaires auraient pu être escamotés, à notre humble avis.
N’empêche que le texte reste magnifique. Le spectacle est un appel convaincant à la diversité culturelle, à la pluralité des voix et à leur ancrage au plus profond de l’essence des êtres qui les porte.
Texte : Mohamed Mbougar Sarr (Éditions Philippe Rey, 2021). Adaptation et mise en lecture : Aristide Tarnagda. Composition et interprétation musicale : Antoine Berthiaume. Éclairages : Claire Seyller. Régie : Elaine Normandeau. Avec Aristide Tarnagda et Odile Sankara. Une production de l’Association Récréâtrales, en coproduction avec le Festival TransAmériques et le Théâtre Acclamations, présentée à l’occasion du Festival TransAmériques au Monument-National jusqu’au 28 mai 2022.
Le quatrième roman de l’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, La Plus Secrète Mémoire des hommes, a remporté le prix Goncourt l’an dernier. Ce récit rédigé dans une langue remarquable possède un souffle profond aux accents poétiques. Issu de cultures où l’oralité et la pratique du conte sont des modes de transmission millénaires, il ne dépérit pas lors de son passage à la scène.
Le livre et la pièce décrivent l’enquête fictive menée par un jeune écrivain, Deegane Latyr Faye, au sujet d’un roman paru en 1938, Le Labyrinthe de l’inhumain, seul livre de l’auteur T.C. Elimane. Sa quête le conduira dans plusieurs pays afin de retrouver les traces laissées par le romancier maudit avant de disparaître.
Ce périple démontre surtout les effets à long terme du colonialisme français en Afrique. Il explore l’ambiguïté des relations entretenues par les écrivain·es africain·es avec Paris, capitale littéraire s’il en est, qui agit en véritable aimant sur les cerveaux créatifs de tous les pays. Rappelons-nous, à cet effet, l’attrait irrésistible que représentait la ville sur les artistes québécois à une époque pas si lointaine.
Il est donc ici beaucoup question de création littéraire et d’exil, d’identité et de solitude. Ce n’est pas en le cherchant ailleurs que notre pays nous quitte vraiment, dira-t-on en ces mots : « ayez une terre à vous, car il n’y a que là que vous existerez pour vous, mais aussi pour les autres ». On parle, en outre, de livres et d’auteurs et d’autrices à la recherche de leur âme perdue. « Écrire ou ne pas écrire », voilà la hantise de ceux et celles qui prennent la plume et/ou qui lisent.
Lecture théâtrale
Cette lecture théâtrale – c’est-à-dire beaucoup plus élaborée qu’une simple mise en lecture – qu’en font les interprètes originaires du Burkina Faso Aristide Tarnagada et Odile Sankara conserve toute la saveur et la beauté du texte original. Les dialogues, intercalés avec de longs monologues, donnent d’ailleurs lieu à des scènes alliant de fortes émotions à une gestuelle au diapason.
Sur un plateau nu, éclairé de belle façon par Claire Seyller, le comédien et la comédienne jouent tous les personnages, modifiant leur voix ici, arborant un couvre-chef différent là, et utilisant quelques accessoires. Le musicien québécois Antoine Berthiaume complète le trio en interprétant ses propres compositions atmosphériques et en y allant de la lecture de certaines répliques.
Bien que l’adaptation qu’Aristide Tarnagada a réalisée du roman cherche l’essentiel, il nous est apparu que certains éclaircissements au sujet du sort de T.C. Elimane, présents dans le livre, manquaient ici à notre compréhension. D’autant plus que certains personnages secondaires auraient pu être escamotés, à notre humble avis.
N’empêche que le texte reste magnifique. Le spectacle est un appel convaincant à la diversité culturelle, à la pluralité des voix et à leur ancrage au plus profond de l’essence des êtres qui les porte.
La Plus Secrète Mémoire des hommes
Texte : Mohamed Mbougar Sarr (Éditions Philippe Rey, 2021). Adaptation et mise en lecture : Aristide Tarnagda. Composition et interprétation musicale : Antoine Berthiaume. Éclairages : Claire Seyller. Régie : Elaine Normandeau. Avec Aristide Tarnagda et Odile Sankara. Une production de l’Association Récréâtrales, en coproduction avec le Festival TransAmériques et le Théâtre Acclamations, présentée à l’occasion du Festival TransAmériques au Monument-National jusqu’au 28 mai 2022.