Critiques

Perles : Un pays à nommer, à chanter et à danser

© Elodie Renaux

Pierre-Paul Savoie n’est plus ; mais PPS Danse, sa compagnie, demeure. Le nouveau directeur artistique, le danseur David Rancourt, y signe Perles, un généreux spectacle de plus d’une heure trente, sans entracte, imaginé avec Savoie. Sept chorégraphes, six interprètes de danse, quatre chanteurs et chanteuses, quatre musiciens et musiciennes et une metteure en scène ont conçu et réalisé ce marathon musical et dansant de 21 pièces.

Les artistes, joliment disposé·es et éclairé·es, baignent dans des ombres fondues en brumes et en teintes douces. La belle équipe s’y dépense sans compter, dévidant un répertoire impressionnant et vivifiant de chansons québécoises. Cette ode au pays, qui s’ouvre sur « La Scène » de Claude Léveillée, chorégraphiée par Emmanuel Jouthe, permet de réapprécier des chefs-d’œuvre.

Roxane Filion prête sa voix assurée à ce répertoire, dominant par ses qualités d’interprétation. D’autres reprennent de merveilleux classiques, « Le Tour de l’île » de Félix Leclerc, « Mommy » chanté par Pauline Julien, « Señorita » de Richard Desjardins, « Proserpina » originalement interprété par Martha Wainwright, relayés notamment par les « Sang d’encre » de Jean Leloup, « Câlisse-moi là » de Lisa LeBlanc, « Ton vieux nom » d’Elisapie, « Fleuve No 1 » de Flore Laurentienne et « Tmrw » de Milk & Bone.

© Elodie Renaux

Cabaret

S’inscrivant dans une énergique histoire chantée du pays, ces choix musicaux et leur mise en scène dansante ont occupé l’espace du souvenir pour une seule soirée à la Place des Arts, avant de partir en tournée à travers le Québec. Il y a eu des ratés, micros muets ou criards, effets indésirables, lors de la première. Les chorégraphies aussi, dans leur joliesse, sont inégales et parfois fades, manquant d’innovation. Mais qu’on ne s’y attarde pas ; mieux vaut plutôt baigner dans la diversité des compositions et des tableaux, car on y compte de joyeuses pépites pittoresques.

Ces voix touchantes festonnent le spectacle. Qu’on se délecte ici du poème de Saint-Denys Garneau, « Portrait », avec son bel accompagnement de contrebasse et le solo de David Rancourt, chorégraphié par Lina Cruz, qui redouble l’émotion par sa reptation au sol. La chanson de Daniel Lavoie, « Ils s’aiment », attire, quant à elle, les suffrages du public.

Remarquable s’avère l’interprétation libre d’un amour inconditionnel, sur « Les Pommiers envahis » de Philémon Cimon, avec ses percussions singulières et un duo de claquettes à peine frappées : ce divertissement sensible fait honneur à la chanson et aux deux danseurs, David Rancourt et Alexandre Carlos.

Du passé au présent, les jours s’égrènent comme les mouvements, grenailles, grains de beauté et grumeaux. L’ensemble a quelque chose d’atmosphérique, quelque chose d’une tempête d’hiver. Plus de programmes imprimés, dommage. L’anonymat relatif force un peu l’ambiance inattendue de cabaret. Au bouquet final, les guirlandes de fleurs déposées, puis arborées en collier par les artistes réuni·es dans le chant, résument l’intention du spectacle sur la chanson de Luc Plamondon, que Diane Dufresne, avec sa démesure scénique, a si bien portée : ne pas sacrifier la beauté du monde.

© Elodie Renaux

Perles

Idéation : Pierre-Paul Savoie et David Rancourt. Direction artistique : David Rancourt.  Chorégraphes invité·es : Myriam Allard, Lina Cruz, Milan Gervais, Sara Harton, Emmanuel Jouthe, Alan Lake et Hoor Malas. Scénographie, costumes et accessoires : Marilène Bastien. Éclairages : Chantal Labonté. Direction musicale : Alexis Dumais. Assistance à la direction artistique et répétitions : Annie Gagnon. Avec (danse) Alexandre Carlos, Marilyne Cyr, Roxane Duchesne-Roy, Sara Harton, David Rancourt et Marcio Vinicius Paulino Silveira; (chant) Bïa, Roxane Filion, Sébastien Lacombe et JP Loignon; (musique) Alexis Dumais, Sheila Hannigan, Vanessa Marcoux et Madeleine Messier. Une production de PPS Danse, présentée à la salle Maisonneuve de la Place des Arts le 24 novembre 2022, puis en tournée.