Ça ne peut venir que d’un profond besoin. « Ça », cette introspection à laquelle se soumet Emmanuel Schwartz. Ce spectacle saisissant émerge d’un besoin de comprendre le monde singulier dans lequel il baigne, un besoin de comprendre ceux qui l’entourent, l’engagent, le côtoient, l’aiment ou non; surtout, un besoin de se comprendre dans ce qui a tout d’un dangereux labyrinthe. Et comme l’acteur ne peut venir qu’avec son pendant, le spectateur, Emmanuel Schwartz , a intitulé cet « exercice » : Le Partage.
C’est d’ailleurs au public que sont dédiées les premières phrases qui dévoilent rapidement le cœur de la réflexion qui va suivre : que connaît-on d’un acteur ? Lui qui multiplie les rôles, qui s’efface constamment pour renaître autre, dans un autre corps, un autre lieu, un autre temps. On pense le connaître parce qu’on l’entrevoit ici et là, à la télé, au cinéma, au théâtre. Ce ne sont que des bribes imaginaires, imaginées. Et l’acteur lui-même, lui qui doit se reconstruire après chaque personnage, comment se retrouve-t-il dans ce mille-feuilles que constitue sa vie ?
Ces questions traversent le spectacle, mais attention, il ne s’agit pas d’un monologue méditatif. Que non ! Emmanuel Schwartz nous entraîne dans une aventure multicouche où il incarne tout à la fois un acteur qui vient de recevoir un prix pour son interprétation dans un film de vampires (qu’il avoue ne pas aimer), le réalisateur de ce film (un petit « prodige »), le personnage dans le film que ce réalisateur prétend inspiré de l’acteur en question (ce que l’acteur n’admet pas), et plus encore. De mise en abyme en mise en abyme, on suit l’acteur dans sa reconquête de soi. Car le soir même de cette remise de prix, voici qu’il a recommencé à consommer. Pourquoi cet auto-sabotage ?
Dans un décor glauque, à la fois référence au film et à certains quartiers du centre-ville que l’acteur arpente, et où sont projetées des images d’avatars, Emmanuel Schwartz se dévoile dans une sorte d’exorcisme où il enchaîne et entrecroise des scènes de la soirée de réception du prix, de la production du film, de souvenirs de collaborations passées, au théâtre cette fois. Et il fait tout cela en faisant ce qu’il sait si bien faire : jouer ! Il est incandescent, sautant de l’acteur tourmenté au réalisateur « poudré », en passant par le metteur en scène hautain. On en est soufflé.
La mise en scène, qu’il signe tout autant que le texte, est nerveuse, parfaitement rythmée, efficace. Il y a de la démesure, parfois même de la caricature (certains s’amuseront à décrypter des portraits), mais surtout une mise à nu courageuse de la part d’un acteur vedette qui ne craint pas de dénoncer certains travers du milieu du spectacle, ni de laisser voir ses angoisses. Et qui cherche avec authenticité sa voix et sa voie.
Le paraître et l’être
On osera l’adjectif ontologique pour décrire la démarche. N’est-on pas, en effet, ici, devant une quête « en rapport avec l’être par opposition au paraître » ? Cette autofiction est devenue essentielle pour celui qui a choisi un métier où ces deux notions sont toujours sur la corde raide.
L’acteur advient devant l’autre, le public lui est essentiel, car il n’existe que dans son regard, mais il est aussi celui qui retourne ce regard, qui interpelle le public, l’entraîne avec sensibilité dans une conquête de sens par le biais de la création.
En cela, Le Partage n‘est pas que le récit d’une destruction, avec ce que cela comporte de perte de repères, et d’une reconstruction dans l’espoir de trouver un certain ordre dans le chaos, c’est aussi une réaffirmation dans le pouvoir du théâtre, comme lieu de rencontre.
Texte, interprétation et mise en scène : Emmanuel Schwartz. Collaboration à la mise en scène et dramaturgie : Alice Ronfard. Conseiller à l’écriture : Daniel Canty. Scénographie : Camille Berrantès. Costumes : Marie-Audrey Jacques. Éclairages : Étienne Boucher. Création vidéo : Transversal. Espace vidéo et mapping : VYV Studio et Emmanuel Schwartz. Compositeur : Cédric Dind-Lavoie. Assistance et régie : Émile Lafortune. Direction de production : Margarita Herrera Dominguez. Direction technique : Émile Lafortune et Jurjen Barel. Traduction et création des surtitres : Élaine Normandeau. Créé en résidence chez VYV Studio et à La Chapelle Scènes Contemporaines. Une production de La Clairière, compagnie de création, La Chapelle Scènes Contemporaines et le Centre national des arts, avec le soutien du Conseil des arts du Canada, du Conseil des arts et des lettres du Québec et du Conseil des arts de Montréal, présentée à La Chapelle Scènes Contemporaines du 1er au 9 mai 2023.
Ça ne peut venir que d’un profond besoin. « Ça », cette introspection à laquelle se soumet Emmanuel Schwartz. Ce spectacle saisissant émerge d’un besoin de comprendre le monde singulier dans lequel il baigne, un besoin de comprendre ceux qui l’entourent, l’engagent, le côtoient, l’aiment ou non; surtout, un besoin de se comprendre dans ce qui a tout d’un dangereux labyrinthe. Et comme l’acteur ne peut venir qu’avec son pendant, le spectateur, Emmanuel Schwartz , a intitulé cet « exercice » : Le Partage.
C’est d’ailleurs au public que sont dédiées les premières phrases qui dévoilent rapidement le cœur de la réflexion qui va suivre : que connaît-on d’un acteur ? Lui qui multiplie les rôles, qui s’efface constamment pour renaître autre, dans un autre corps, un autre lieu, un autre temps. On pense le connaître parce qu’on l’entrevoit ici et là, à la télé, au cinéma, au théâtre. Ce ne sont que des bribes imaginaires, imaginées. Et l’acteur lui-même, lui qui doit se reconstruire après chaque personnage, comment se retrouve-t-il dans ce mille-feuilles que constitue sa vie ?
Ces questions traversent le spectacle, mais attention, il ne s’agit pas d’un monologue méditatif. Que non ! Emmanuel Schwartz nous entraîne dans une aventure multicouche où il incarne tout à la fois un acteur qui vient de recevoir un prix pour son interprétation dans un film de vampires (qu’il avoue ne pas aimer), le réalisateur de ce film (un petit « prodige »), le personnage dans le film que ce réalisateur prétend inspiré de l’acteur en question (ce que l’acteur n’admet pas), et plus encore. De mise en abyme en mise en abyme, on suit l’acteur dans sa reconquête de soi. Car le soir même de cette remise de prix, voici qu’il a recommencé à consommer. Pourquoi cet auto-sabotage ?
Dans un décor glauque, à la fois référence au film et à certains quartiers du centre-ville que l’acteur arpente, et où sont projetées des images d’avatars, Emmanuel Schwartz se dévoile dans une sorte d’exorcisme où il enchaîne et entrecroise des scènes de la soirée de réception du prix, de la production du film, de souvenirs de collaborations passées, au théâtre cette fois. Et il fait tout cela en faisant ce qu’il sait si bien faire : jouer ! Il est incandescent, sautant de l’acteur tourmenté au réalisateur « poudré », en passant par le metteur en scène hautain. On en est soufflé.
La mise en scène, qu’il signe tout autant que le texte, est nerveuse, parfaitement rythmée, efficace. Il y a de la démesure, parfois même de la caricature (certains s’amuseront à décrypter des portraits), mais surtout une mise à nu courageuse de la part d’un acteur vedette qui ne craint pas de dénoncer certains travers du milieu du spectacle, ni de laisser voir ses angoisses. Et qui cherche avec authenticité sa voix et sa voie.
Le paraître et l’être
On osera l’adjectif ontologique pour décrire la démarche. N’est-on pas, en effet, ici, devant une quête « en rapport avec l’être par opposition au paraître » ? Cette autofiction est devenue essentielle pour celui qui a choisi un métier où ces deux notions sont toujours sur la corde raide.
L’acteur advient devant l’autre, le public lui est essentiel, car il n’existe que dans son regard, mais il est aussi celui qui retourne ce regard, qui interpelle le public, l’entraîne avec sensibilité dans une conquête de sens par le biais de la création.
En cela, Le Partage n‘est pas que le récit d’une destruction, avec ce que cela comporte de perte de repères, et d’une reconstruction dans l’espoir de trouver un certain ordre dans le chaos, c’est aussi une réaffirmation dans le pouvoir du théâtre, comme lieu de rencontre.
Le Partage
Texte, interprétation et mise en scène : Emmanuel Schwartz. Collaboration à la mise en scène et dramaturgie : Alice Ronfard. Conseiller à l’écriture : Daniel Canty. Scénographie : Camille Berrantès. Costumes : Marie-Audrey Jacques. Éclairages : Étienne Boucher. Création vidéo : Transversal. Espace vidéo et mapping : VYV Studio et Emmanuel Schwartz. Compositeur : Cédric Dind-Lavoie. Assistance et régie : Émile Lafortune. Direction de production : Margarita Herrera Dominguez. Direction technique : Émile Lafortune et Jurjen Barel. Traduction et création des surtitres : Élaine Normandeau. Créé en résidence chez VYV Studio et à La Chapelle Scènes Contemporaines. Une production de La Clairière, compagnie de création, La Chapelle Scènes Contemporaines et le Centre national des arts, avec le soutien du Conseil des arts du Canada, du Conseil des arts et des lettres du Québec et du Conseil des arts de Montréal, présentée à La Chapelle Scènes Contemporaines du 1er au 9 mai 2023.