Pourquoi l’eau est-elle si précieuse et rare ailleurs sur la planète alors que chez nous, une abondance d’or bleu nous entraîne à plonger sans scrupules dans d’ostentatoires excès ? Comment cultiver la notion de partage, dans un monde où des amis intercontinentaux vivent des réalités à la fois croisées et diamétralement opposées ? Pourquoi les femmes et les filles, dans certaines régions du monde, héritent-elles de certaines corvées qui briment leur accès à l’éducation ?
Voilà quelques-unes des (très) grandes questions qui traversent la pièce Parole d’eau, une jolie fable sur l’amitié et l’amour de la nature, qui prend ces jours-ci l’affiche de la Maison Théâtre. Un tout court spectacle de 50 minutes et des poussières, qui allie théâtre d’objets, marionnettes, récits africains et contes bien québécois. Le tout, bercé par une trame sonore rendue par le musicien multi-instrumentiste Salif Sanou.
Si la pièce vise un public scolaire de six à 10 ans, les enjeux sociaux, économiques et globaux sauront abreuver les discussions intergénérationnelles. La planète comporte exactement la même quantité d’eau depuis des millénaires. Et pourtant : les humains sont de plus en plus nombreux, énergivores, avides d’accumulations. Comment allons-nous parvenir à abreuver tout le monde ?
Ce sont là de vastes interrogations, sans réponse simple. Et leur complexité peut sembler incompatible avec un spectacle destiné à un public jeune et innocent, venu se divertir, rigoler et apprécier l’ingéniosité scénique qui fait la renommée de la Maison Théâtre. Pourtant, les créateur∙trices réussissent le tour de force d’éveiller et de sensibiliser le jeune public à des questions d’inégalités nord-sud, sans toutefois verser dans une moralité rabat-joie.
Terre de sable, terre de glace
En dépit de la gravité de son sujet, Parole d’eau se révèle malgré tout une ode à l’émerveillement face à la beauté et les possibilités de créativité infinie qui peuplent notre planète bleue.
Au centre de la pièce, il y a l’histoire d’amitié de deux jeunes femmes, Mamby et Hélène. La première est Sénégalaise, la seconde est Québécoise. Du côté sud de l’étang, l’eau est rare, il faut marcher parfois des kilomètres pour remplir des bassines qui se transportent sur la tête des femmes qui portent aussi un bébé dans le dos. Alors qu’au nord, l’eau est neige, glace, se ramasse à la pelle, se consomme par milliers de litres par jour.
Les marionnettes côtoient le théâtre d’objets, tout au long de ces 50 minutes pendant lesquelles ces deux complices au destin croisé se racontent des histoires d’eau, soit par le biais de contes, de chants traditionnels, de récits d’enfance ou de souvenirs. La simplicité de la pièce et la sincérité de ses artisan∙nes ouvrent l’espace à une poésie du verbe et de l’image. Des bassines de plastique – comme celles utilisées au Sénégal pour la lessive- dissimulent des cylindres en accordéon qui se transforment en robinet ou en personnages de tissu. Des marionnettes prennent la relève de Mamby et Hélène pour raconter des histoires d’enfance. Une scène de tempête de neige est recréée avec le concours de confettis qui jaillissent dans l’air. Et dans les moments les plus graves, il y a les bouteilles d’eau au prix exorbitant exhibées comme des montres Rolex aux yeux de citoyen∙nes qui n’ont pas les sous pour s’abreuver.
La prise de conscience se fait tout doucement, quoique sans lunettes roses. On nous rappelle que la vie, la nature et les humains suivent leur destinée, malgré les entraves, les sécheresses, les inégalités. Et l’amitié est là pour partager, écouter l’autre, ne pas oublier sa chance tout en gardant en tête la notion de partage, sur une planète de plus en plus interconnectée.
Pour nourrir l’âme, garder vivante la flamme de l’émerveillement, et aussi former des spectateur∙trices citoyen∙nes qui sauront embrasser la complexité plutôt que de prendre la voie de la polarisation; c’est une goutte de plus dans la rivière de sagesse qu’offre cette très jolie Parole d’eau.
Texte et mise en scène : Mamby Mawine et Hélène Ducharme. Musique : Dramane Dembélé. Musicien : Salif Sanou « Lasso. » Marionnettes et accessoires : Jean Cumming et Claude Rodrigue. Personnage terre et eau : Alessandro Fanni. Costumes : Valentina Sartori. Lumière : Jérôme Bérubé. Une production du Théâtre Motus et de Djarama, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 11 février 2024.
Pourquoi l’eau est-elle si précieuse et rare ailleurs sur la planète alors que chez nous, une abondance d’or bleu nous entraîne à plonger sans scrupules dans d’ostentatoires excès ? Comment cultiver la notion de partage, dans un monde où des amis intercontinentaux vivent des réalités à la fois croisées et diamétralement opposées ? Pourquoi les femmes et les filles, dans certaines régions du monde, héritent-elles de certaines corvées qui briment leur accès à l’éducation ?
Voilà quelques-unes des (très) grandes questions qui traversent la pièce Parole d’eau, une jolie fable sur l’amitié et l’amour de la nature, qui prend ces jours-ci l’affiche de la Maison Théâtre. Un tout court spectacle de 50 minutes et des poussières, qui allie théâtre d’objets, marionnettes, récits africains et contes bien québécois. Le tout, bercé par une trame sonore rendue par le musicien multi-instrumentiste Salif Sanou.
Si la pièce vise un public scolaire de six à 10 ans, les enjeux sociaux, économiques et globaux sauront abreuver les discussions intergénérationnelles. La planète comporte exactement la même quantité d’eau depuis des millénaires. Et pourtant : les humains sont de plus en plus nombreux, énergivores, avides d’accumulations. Comment allons-nous parvenir à abreuver tout le monde ?
Ce sont là de vastes interrogations, sans réponse simple. Et leur complexité peut sembler incompatible avec un spectacle destiné à un public jeune et innocent, venu se divertir, rigoler et apprécier l’ingéniosité scénique qui fait la renommée de la Maison Théâtre. Pourtant, les créateur∙trices réussissent le tour de force d’éveiller et de sensibiliser le jeune public à des questions d’inégalités nord-sud, sans toutefois verser dans une moralité rabat-joie.
Terre de sable, terre de glace
En dépit de la gravité de son sujet, Parole d’eau se révèle malgré tout une ode à l’émerveillement face à la beauté et les possibilités de créativité infinie qui peuplent notre planète bleue.
Au centre de la pièce, il y a l’histoire d’amitié de deux jeunes femmes, Mamby et Hélène. La première est Sénégalaise, la seconde est Québécoise. Du côté sud de l’étang, l’eau est rare, il faut marcher parfois des kilomètres pour remplir des bassines qui se transportent sur la tête des femmes qui portent aussi un bébé dans le dos. Alors qu’au nord, l’eau est neige, glace, se ramasse à la pelle, se consomme par milliers de litres par jour.
Les marionnettes côtoient le théâtre d’objets, tout au long de ces 50 minutes pendant lesquelles ces deux complices au destin croisé se racontent des histoires d’eau, soit par le biais de contes, de chants traditionnels, de récits d’enfance ou de souvenirs. La simplicité de la pièce et la sincérité de ses artisan∙nes ouvrent l’espace à une poésie du verbe et de l’image. Des bassines de plastique – comme celles utilisées au Sénégal pour la lessive- dissimulent des cylindres en accordéon qui se transforment en robinet ou en personnages de tissu. Des marionnettes prennent la relève de Mamby et Hélène pour raconter des histoires d’enfance. Une scène de tempête de neige est recréée avec le concours de confettis qui jaillissent dans l’air. Et dans les moments les plus graves, il y a les bouteilles d’eau au prix exorbitant exhibées comme des montres Rolex aux yeux de citoyen∙nes qui n’ont pas les sous pour s’abreuver.
La prise de conscience se fait tout doucement, quoique sans lunettes roses. On nous rappelle que la vie, la nature et les humains suivent leur destinée, malgré les entraves, les sécheresses, les inégalités. Et l’amitié est là pour partager, écouter l’autre, ne pas oublier sa chance tout en gardant en tête la notion de partage, sur une planète de plus en plus interconnectée.
Pour nourrir l’âme, garder vivante la flamme de l’émerveillement, et aussi former des spectateur∙trices citoyen∙nes qui sauront embrasser la complexité plutôt que de prendre la voie de la polarisation; c’est une goutte de plus dans la rivière de sagesse qu’offre cette très jolie Parole d’eau.
Parole d’eau
Texte et mise en scène : Mamby Mawine et Hélène Ducharme. Musique : Dramane Dembélé. Musicien : Salif Sanou « Lasso. » Marionnettes et accessoires : Jean Cumming et Claude Rodrigue. Personnage terre et eau : Alessandro Fanni. Costumes : Valentina Sartori. Lumière : Jérôme Bérubé. Une production du Théâtre Motus et de Djarama, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 11 février 2024.