JEU des 5 questions

Cinq questions à Olivier Bertrand, directeur artistique

© Frédéric Haye-Baptiste

Le Théâtre La Chapelle Scènes Contemporaines est le lieu par excellence de toutes les diversités : artistiques, linguistiques, culturelles, d’âge, de styles et de genre. Son directeur artistique, Olivier Bertrand, nous parle de sa quête constante d’innovation en vue de la saison 2024-2025.

Depuis toujours, la diversité est une marque de commerce à La Chapelle. Comment maintient-on cet objectif à travers les programmations ?

La création dans toute sa diversité nous correspond complètement. Il y a une grande pluralité d’approches chez nous. On privilégie beaucoup les surtitres dans les projets puisqu’on on avons une programmation bilingue, dont avec des artistes anglophones, un élément qui est soutenu par la Fondation Cole. On aime aussi beaucoup l’interdisciplinarité pour bousculer les frontières et encourager des pratiques dont il est difficile de définir la forme. La saison est remplie de spectacles de ce genre.

Et ce n’est pas que le fait des jeunes créateurs et créatrices ?

Non, Nancy Tobin, par exemple, qui est une musicienne contemporaine, nous propose Superheart L’opéra, une œuvre indéfinissable dans sa forme. La compagnie a travaillé ici à plusieurs moments de l’année. Elle veut faire résonner La Chapelle et l’espace autour de la salle comme des éléments de percussion. Nancy en parle en termes de porosité. À La Chapelle, nous sommes poreux aussi dans le sens des rapprochements actuels avec les directions artistiques des autres théâtres, ce qui nous amène à préciser toujours davantage notre spécificité. Par exemple, nous nous intéressons aux artistes en arts visuels et en performance, comme Chloë Lum et Yannick Desranleau qui seront là en mars 2025. Même chose avec Gui B.B et son spectacle La sommation des acouphènes.

Les collaborations entre institutions sont, justement, de plus en plus fréquentes un peu partout, mais vous étiez également sur le coup depuis un moment, non ?

Quand on collabore, on est sur des dialogues avec les festivals, notamment. On partage. Les événements ne viennent pas que présenter à La Chapelle. On travaille systématiquement à des projets communs. Les partenariats nous permettent de mettre de l’avant, par exemple, l’écrivain Antoine Charbonneau-Demers qui viendra à la fin du mois. Aussi, nous sommes attentifs aux artistes venant de l’extérieur de Montréal, comme Geneviève Matthieu et Audrée Juteau de Rouyn, Fano Maddix de Gaspésie, ainsi que Sara Létourneau et Chantale Boulianne de Saguenay. On a évidemment des artistes qui nous proviennent du Canada, telle la chorégraphe Ashley Colours Perez.

La Chapelle a ses fidèles pourrait-on dire, mais reste aussi fidèle aux artistes ayant créé des spectacles chez vous au cours des ans ?

Oui. Louise Bédard revient cette saison parce qu’elle a une histoire forte avec nous. C’est important de favoriser les rencontres entre les artistes de différentes générations. Certain∙es sont surpris de revoir des créateurs comme Christian Lapointe ou Mani Soleymanlou, par exemple. Sauf qu’on oublie qu’ils ont, soit fait leurs débuts ici, soit ils ont présenté un premier spectacle à Montréal. Une fois établi∙es, ils et elles savent qu’ils peuvent compter sur nous pour présenter leurs projets les plus expérimentaux.

Nous posons la question à tout le monde en ce moment, comment envisagez-vous l’avenir étant donné le sous-financement des arts et de la culture au Québec ?

C’est très complexe. Dans notre écosystème, on est tous et toutes convaincu∙es qu’on a besoin les uns des autres. Tout est lié. On fonctionne différemment, on a des moyens variés. Ceci dit, la situation actuelle cause un appauvrissement généralisé. Cette crise, exacerbée par la pandémie, occulte le fait que notre secteur a toujours été sous-financé. Ça ne peut plus durer puisque les coûts ont explosé. On est placé face à un mur. Les collaborations vont devenir encore plus nécessaires. On veut se concerter et se mobiliser, mais on n’est pas encore à l’étape de trouver des solutions. Il faudra créer de nouveaux modèles. L’année prochaine s’annonce difficile.

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