Au début des temps, il y avait le son. Celui du vent ou d’un éclair dans le ciel. Celui provoqué par des bulles dans l’océan à l’origine des premiers organismes cellulaires. Le son est une rencontre, un entredeux. Avec son spectacle Superheart L’Opéra, Nancy Tobin célèbre ses qualités intrinsèques qui passeront, en cours de représentation, d’une simple note métallique à une chanson pop.
L’artiste fait une (trop ?) longue mise en garde au début. Il faut ajouter, toutefois, que nous sommes dans la salle presque vide de La Chapelle où ce qui suivra respecte la cadence de la communauté Slow qui nous invite à ralentir le rythme. Seul un échafaudage de construction occupe une partie du plateau. Nancy Tobin fait remettre à chaque personne dans l’assistance un godet qui contient un morceau de carotte. C’est une pilule, explique-t-elle, une dose sans danger qui, une fois avalée, permet de plonger dans un état propice au relâchement, à l’attention et à l’écoute. Ce n’est pas l’esprit qui sera sollicité dans l’heure qui suit, mais le corps et le cœur.
Lentement, donc, les protagonistes viennent accrocher des lamelles et des tubes de métal à l’échafaudage. Un musicien les cognera de manière à explorer toutes les possibilités tonales et atonales de ces « instruments » volontairement simplistes. Au sein de l’échafaudage, un adolescent et une jeune femme exécutent une pantomime qui démontre notre difficulté à se laisser aller et à s’abandonner à la connexion souhaitable entre l’esprit et le cœur, justement. Il et elle effectueront cette danse imagée à maintes reprises. Puis, l’on fera tourner l’échafaudage mobile autour de la salle, cherchant à faire résonner d’une autre façon les sons métalliques en mouvement.
Plus tard, un archet déchirera une immense toile en papier; l’alarme de sécurité d’une voiture dans la rue et un klaxon entraîneront de nouvelles rythmiques sonores dans la salle , deux femmes s’échangeront de petits cris stridents juste devant le public dans un esprit des plus ludiques. Les corps bougent, sont souvent fébriles et… souriants. Cet opéra se révèle amusant d’un bout à l’autre, comme cette invitation des interprètes lancée au public afin qu’ils et elles se mettent à transformer leur petit godet de papier en élément percussif. Savamment élaboré, un crescendo mélodique s’installe et atteint son paroxysme lors de l’interprétation finale d’une chanson en anglais qui nous rappelle qu’une très petite distance sépare les êtres humains les uns des autres, qu’il suffit de tendre le doigt, la main, le bras.
Il n’y a évidemment pas que quatre sons dans cet opéra très lo-fi (basse fidélité), mais plutôt entre 400 et 4 000. Rien ne s’approche de l’ironie, voire du sarcasme, déployée dans les textes des chansons de L’Opéra de quat’sous sur les musiques tout aussi ludiques de Kurt Weill. Le refrain brechtien d’Alabama Song « I tell you we must die » trouve ici une réponse sans équivoque chez Tobin : « Please tell me Who am I supposed to save ? ».
Dans ce théâtre devenu instrument de musique, avec l’aide d’une équipe de concepteurs et de conceptrices hors pair, Nancy Tobin encourage l’écoute dans un temps long en laissant vivre des objets de toutes formes qui s’adressent à notre capacité de partager et de vibrer, cœurs à l’unisson. L’heure ne serait plus au désespoir. Réjouissant !
Idéation et mise en scène : Nacy Tobin. Collaboration à la mise en scène : Sarah Williams. Scénographie, costumes et accessoires : Julie Vallée-Léger. Conception lumière et régie : Lucie Bazzo. Direction de production : Roxane Gallant. Conception sonore, matière enregistrée : Simon Gauthier. Poésie gestuelle : Cai Glover. Conception vidéo : lamathilde. Direction technique, collaboration à la conception sonore et vidéo, régie : Nicolas Jalbert. Conception sonore, captation : Frédéric Le Bel. Dramaturgie : Émilie Martz-Kuhn. Collaboration à la mise en jeu : Line Nault. Accompagnement et écoute : Katya Montaignac. Régie de plateau : Manon Péguillou. Disques préparés, glanage de cœurs : Martin Tétreault. Observation et écoute : Anaëlle Dreyer. Avec : Catherine Cédilot, Nathalie Claude, Théo Durieux. Stuart Jackson, Virginie Mongeau et Émilie Versailles. À La Chapelle Scènes Contemporaines du 9 au 12 octobre 2024.
Au début des temps, il y avait le son. Celui du vent ou d’un éclair dans le ciel. Celui provoqué par des bulles dans l’océan à l’origine des premiers organismes cellulaires. Le son est une rencontre, un entredeux. Avec son spectacle Superheart L’Opéra, Nancy Tobin célèbre ses qualités intrinsèques qui passeront, en cours de représentation, d’une simple note métallique à une chanson pop.
L’artiste fait une (trop ?) longue mise en garde au début. Il faut ajouter, toutefois, que nous sommes dans la salle presque vide de La Chapelle où ce qui suivra respecte la cadence de la communauté Slow qui nous invite à ralentir le rythme. Seul un échafaudage de construction occupe une partie du plateau. Nancy Tobin fait remettre à chaque personne dans l’assistance un godet qui contient un morceau de carotte. C’est une pilule, explique-t-elle, une dose sans danger qui, une fois avalée, permet de plonger dans un état propice au relâchement, à l’attention et à l’écoute. Ce n’est pas l’esprit qui sera sollicité dans l’heure qui suit, mais le corps et le cœur.
Lentement, donc, les protagonistes viennent accrocher des lamelles et des tubes de métal à l’échafaudage. Un musicien les cognera de manière à explorer toutes les possibilités tonales et atonales de ces « instruments » volontairement simplistes. Au sein de l’échafaudage, un adolescent et une jeune femme exécutent une pantomime qui démontre notre difficulté à se laisser aller et à s’abandonner à la connexion souhaitable entre l’esprit et le cœur, justement. Il et elle effectueront cette danse imagée à maintes reprises. Puis, l’on fera tourner l’échafaudage mobile autour de la salle, cherchant à faire résonner d’une autre façon les sons métalliques en mouvement.
Plus tard, un archet déchirera une immense toile en papier; l’alarme de sécurité d’une voiture dans la rue et un klaxon entraîneront de nouvelles rythmiques sonores dans la salle , deux femmes s’échangeront de petits cris stridents juste devant le public dans un esprit des plus ludiques. Les corps bougent, sont souvent fébriles et… souriants. Cet opéra se révèle amusant d’un bout à l’autre, comme cette invitation des interprètes lancée au public afin qu’ils et elles se mettent à transformer leur petit godet de papier en élément percussif. Savamment élaboré, un crescendo mélodique s’installe et atteint son paroxysme lors de l’interprétation finale d’une chanson en anglais qui nous rappelle qu’une très petite distance sépare les êtres humains les uns des autres, qu’il suffit de tendre le doigt, la main, le bras.
Il n’y a évidemment pas que quatre sons dans cet opéra très lo-fi (basse fidélité), mais plutôt entre 400 et 4 000. Rien ne s’approche de l’ironie, voire du sarcasme, déployée dans les textes des chansons de L’Opéra de quat’sous sur les musiques tout aussi ludiques de Kurt Weill. Le refrain brechtien d’Alabama Song « I tell you we must die » trouve ici une réponse sans équivoque chez Tobin : « Please tell me Who am I supposed to save ? ».
Dans ce théâtre devenu instrument de musique, avec l’aide d’une équipe de concepteurs et de conceptrices hors pair, Nancy Tobin encourage l’écoute dans un temps long en laissant vivre des objets de toutes formes qui s’adressent à notre capacité de partager et de vibrer, cœurs à l’unisson. L’heure ne serait plus au désespoir. Réjouissant !
Superheart L’Opéra
Idéation et mise en scène : Nacy Tobin. Collaboration à la mise en scène : Sarah Williams. Scénographie, costumes et accessoires : Julie Vallée-Léger. Conception lumière et régie : Lucie Bazzo. Direction de production : Roxane Gallant. Conception sonore, matière enregistrée : Simon Gauthier. Poésie gestuelle : Cai Glover. Conception vidéo : lamathilde. Direction technique, collaboration à la conception sonore et vidéo, régie : Nicolas Jalbert. Conception sonore, captation : Frédéric Le Bel. Dramaturgie : Émilie Martz-Kuhn. Collaboration à la mise en jeu : Line Nault. Accompagnement et écoute : Katya Montaignac. Régie de plateau : Manon Péguillou. Disques préparés, glanage de cœurs : Martin Tétreault. Observation et écoute : Anaëlle Dreyer. Avec : Catherine Cédilot, Nathalie Claude, Théo Durieux. Stuart Jackson, Virginie Mongeau et Émilie Versailles. À La Chapelle Scènes Contemporaines du 9 au 12 octobre 2024.