JEU des 5 questions

Cinq questions à Stéphanie Labbé

© Guillaume Boucher

Diplômée du Conservatoire d’art dramatique en jeu, de l’Université de Montréal en communication, ainsi que de l’INIS et l’École nationale de l’humour en scénarisation, Stéphanie Labbé a écrit plusieurs pièces de théâtre. Sa plus récente, Après t’avoir bordé tendrement, je meurs, est son deuxième spectacle créé à quelques semaines d’intervalle.

JEU : Les aléas de production font en sorte qu’on programme des autrices ou des auteurs plusieurs fois durant la même saison ; mais à quelques semaines d’intervalle, c’est plus rare. Comment cela est-il arrivé ?

Stéphanie Labbé : C’est un heureux hasard qui a fait que deux de mes textes soient produits cet automne, trois si on ajoute ma participation au texte desVeillées festives 2025 du Petit théâtre du Nord à Boisbriand. La faune locale, je l’ai écrite avant la pandémie, mais je n’avais pas encore trouvé de théâtre pour accueillir ma proposition avant de la soumettre à Jean-Simon Traversy et David Laurin chez Duceppe. J’ai écrit Après t’avoir bordé tendrement, je meurs plus récemment, c’est ce qui explique peut-être que les deux pièces soient montées cet automne. Il y a beaucoup de très bons dramaturges au Québec et c’est parfois un parcours du combattant pour trouver un refuge pour une pièce. Les saisons sont décidées des années en avance et il faut souvent envoyer des textes non terminés en essayant de convaincre les directeurs que ce que nous allons créer dans deux ans sera fantastique, alors qu’au fond on est encore à une étape de doutes et de questionnements.

Avec ce nouveau spectacle, on reste dans l’intime, le sensible, voire le dérangeant. En commençant l’écriture, vous donnez-vous la mission de traiter de sujets sociaux très présents dans l’actualité ?

Quand je commence un nouveau texte, j’ai souvent une thématique en tête, mais elle évolue à mesure que j’écris mon histoire. Elle se précise avec mes personnages et ce qu’ils et elles vivront. J’aime me laisser surprendre. Je suis très influencée par mon environnement, les gens qui m’entourent et les enjeux sociétaux. J’ai envie que mon propos trouve écho chez les personnes qui viendront voir le spectacle. C’est important pour moi que le public se sente à la fois invité, concerné et touché.

Entre l’écriture et le jeu, comment travaillez-vous avec la personne à la mise en scène ?

J’ai toujours travaillé avec des metteuses en scène inspirantes et passionnées. Pour Après t’avoir bordé tendrement je meurs, c’est la première fois que je ne jouerai pas dans une de mes pièces. Au début, c’était un grand processus de lâcher prise, mais j’adore ça. Je suis dans la salle, je regarde mes personnages vivre sur scène et je me trouve très chanceuse. Louise Cardinal et Félix Antoine Bénard, qui interprètent Fanny et Léo, sont incroyables. C’est la deuxième fois que je travaille avec Gabrielle Lessard. C’est elle qui avait monté Et puis par la fenêtre, nous pourrons voir les champs. Je voulais absolument retravailler avec Gab, car j’aime son engagement total et sa grande intelligence. C’est une brillante lectrice et elle sait comment faire ressortir les couches de sens d’un texte sans ajouter de lourdeur. C’est la même chose avec la metteuse en scène Véronique Côté, qui a monté La faune locale. On n’est jamais dans l’ego, mais toujours dans la recherche, la création et le travail.

Vous possédez une formation très diversifiée (théâtre, ciné-télé, humour). Avez-vous une préférence, allez-vous écrire une comédie pour la scène ?

J’ai écrit une comédie franche qui s’appelle Une fête normale. Je suis en attente d’un théâtre pour produire la pièce. Je n’ai pas de préférence de genre. Même dans les drames que j’écris, il y a de l’humour. Je pense que c’est souvent dans ces moments un peu décalés ou absurdes que se cache l’humanité de mes personnages. Et puis honnêtement, comme beaucoup d’auteurs et d’autrices, j’adore m’amuser avec les ruptures de ton. C’est un bonheur immense pour une autrice que de voir le public éclater de rire tout en essuyant la larme qui venait tout juste de couler quelques secondes auparavant.

De toute évidence, vous travaillez beaucoup. Donc, sans rien dévoiler, sur quels projets vous penchez-vous en ce moment ?

Un des projets qui m’habite ces jours-ci est l’écriture d’une tragi-comédie sur le désengagement. La pièce se déroule dans une école en ruine et j’y raconte l’histoire d’un couple qui se désagrège sur fond de drame syndical. J’en suis presque à une version prête pour une production et ça me rend à la fois fébrile et joyeuse.

© Valérie Remise

Après t’avoir bordé tendrement, je meurs est présentée à la Salle Jean-Claude Germain du CTDA du 25 novembre au 13 décembre 2025.