Des Muses orphelines, je n’ai pas vu les mises en scène d’André Brassard et de René-Richard Cyr dans les années 1980 et au début des années 1990: on me pardonnera d’avoir été occupé à autre chose pendant mon enfance et de ma pré-adolescence. Je me suis rattrapé plus tard par un apprivoisement de l’œuvre écrite et de l’excellent film de Robert Favreau. Je n’en suis pas moins décontenancé par la mise en scène actuelle de Martine Beaulne, chez Duceppe, qui aborde cette grande œuvre sans grande imagination.
Parfois strictement destinées à explorer la psyché humaine, parfois porteuses d’un discours social, les tensions à l’intérieur de la cellule familiale caractérisent une grande partie de la dramaturgie québécoise des années quatre-vingts. La pièce de Michel-Marc Bouchard se situe à la rencontre de ces deux tendances et offre donc de nombreuses possibilités de lectures. On peut y voir au premier chef une fable sur les blessures liées à l’absence de la mère, une observation des rôles castrants dans lesquels nous emprisonnent le carcan familial, une fable sur l’émancipation par le savoir et l’apprentissage ou, de manière plus sociologique, le parcours d’une société sclérosée qui se libère progressivement de ses chaînes et même une pièce sur l’incommunicabilité. Mais pour arriver à mettre en lumière l’une ou l’autre de ces facettes, encore faut-il qu’un metteur en scène arrive à faire des choix et à approfondir une piste ou l’autre. Même si elle est servie par une rigoureuse direction d’acteurs, la mise en scène de Martine Beaulne est d’une sobriété mortifère. Son travail ne dénature en rien l’œuvre de Bouchard, mais elle ne la transcende jamais, se contentant de la représenter au premier degré.
Rien n’est oublié, certes, de la représentation de la marginalité des Tanguay jusqu’à la quête de vengeance et d’épanouissement d’«Isabelle la mongole», en passant par le poids du mensonge et du regard de l’autre dans les vies meurtries de ces frères et sœurs rarement réunis. Les relations destructrices qu’ils entretiennent entre eux et avec leur mère disparue se déploient finement dans le jeu des comédiens Maxime Denommée (Luc), Macha Limonchik (Catherine), Nathalie Mallette (Martine) et Léane Labrèche-Dor (Isabelle). Mais le spectacle n’arrive jamais à se distancier d’eux pour esquisser un portrait général, selon un angle ou un autre. Résultat: on ne voit rien.
Il y a bien ce décor imposant, fait d’un grand mur aux planches déstructurées, dont les lignes obliques s’écrasent sur une porte bien trop petite pour accueillir la vastitude du monde extérieur. L’image est forte, évocatrice de la dysfonction familiale et de l’impossibilité d’accéder à l’ailleurs. Mais c’est tout de même bien mince.
Des Muses orphelines, je n’ai pas vu les mises en scène d’André Brassard et de René-Richard Cyr dans les années 1980 et au début des années 1990: on me pardonnera d’avoir été occupé à autre chose pendant mon enfance et de ma pré-adolescence. Je me suis rattrapé plus tard par un apprivoisement de l’œuvre écrite et de l’excellent film de Robert Favreau. Je n’en suis pas moins décontenancé par la mise en scène actuelle de Martine Beaulne, chez Duceppe, qui aborde cette grande œuvre sans grande imagination.
Parfois strictement destinées à explorer la psyché humaine, parfois porteuses d’un discours social, les tensions à l’intérieur de la cellule familiale caractérisent une grande partie de la dramaturgie québécoise des années quatre-vingts. La pièce de Michel-Marc Bouchard se situe à la rencontre de ces deux tendances et offre donc de nombreuses possibilités de lectures. On peut y voir au premier chef une fable sur les blessures liées à l’absence de la mère, une observation des rôles castrants dans lesquels nous emprisonnent le carcan familial, une fable sur l’émancipation par le savoir et l’apprentissage ou, de manière plus sociologique, le parcours d’une société sclérosée qui se libère progressivement de ses chaînes et même une pièce sur l’incommunicabilité. Mais pour arriver à mettre en lumière l’une ou l’autre de ces facettes, encore faut-il qu’un metteur en scène arrive à faire des choix et à approfondir une piste ou l’autre. Même si elle est servie par une rigoureuse direction d’acteurs, la mise en scène de Martine Beaulne est d’une sobriété mortifère. Son travail ne dénature en rien l’œuvre de Bouchard, mais elle ne la transcende jamais, se contentant de la représenter au premier degré.
Rien n’est oublié, certes, de la représentation de la marginalité des Tanguay jusqu’à la quête de vengeance et d’épanouissement d’«Isabelle la mongole», en passant par le poids du mensonge et du regard de l’autre dans les vies meurtries de ces frères et sœurs rarement réunis. Les relations destructrices qu’ils entretiennent entre eux et avec leur mère disparue se déploient finement dans le jeu des comédiens Maxime Denommée (Luc), Macha Limonchik (Catherine), Nathalie Mallette (Martine) et Léane Labrèche-Dor (Isabelle). Mais le spectacle n’arrive jamais à se distancier d’eux pour esquisser un portrait général, selon un angle ou un autre. Résultat: on ne voit rien.
Il y a bien ce décor imposant, fait d’un grand mur aux planches déstructurées, dont les lignes obliques s’écrasent sur une porte bien trop petite pour accueillir la vastitude du monde extérieur. L’image est forte, évocatrice de la dysfonction familiale et de l’impossibilité d’accéder à l’ailleurs. Mais c’est tout de même bien mince.
Les muses orphelines
De Michel-Marc Bouchard
Mise en scène Martine Beaulne
Au Théâtre Jean-Duceppe jusqu’au 30 mars