Ce Petit bonhomme a déjà un long parcours. Francis Monty en écrit une première version en 2003, présentée au Festival du Jamais Lu en 2005. Puis il le laisse de côté avant de le reprendre, en 2008. Il y travaille en pointillés, entre deux tournées. Après plusieurs lectures devant public jeune ou adulte, le processus se termine par une résidence au Bouffou Théâtre à la Coque, en France, avant sa création en novembre 2012, qui sera suivie d’une trentaine de représentations.
Ethienne «avec un H» est un personnage dessiné en noir sur fond blanc, ou une minuscule marionnette en couleur, qui vit dans une drôle de famille composée de 56 frères, «des molosses et des colosses». Parmi eux, Léon le nul, qui rêve d’être un train et mange des clous en cachette, dont l’histoire a été racontée dans le spectacle du même nom, coproduit par le Théâtre Bouches Décousues et le Théâtre de la Pire Espèce en 2005. Derrière un petit castelet dont même le rideau est en papier dessiné, Francis Monty raconte à un train d’enfer la quête initiatique, «l’histoire noire et salissante» d’Éthienne, qui veut comprendre pourquoi sa famille semble maudite: le père, de bovin mou, s’est vu transformé en «vache pasteurisée», et la mère est représentée par une chaussure fleurie. Et lui, comme tous les petits garçons, il rêve d’être un cow-boy…
À l’aide de feuilles de papier, de dessins et de quelques objets brillamment utilisés (les thermos de café pour symboliser à la fois l’usine et la pause des ouvriers…) Monty fabrique un univers délirant et complètement déjanté, dans une facture très bande dessinée. Ainsi il brandit des pancartes sur lesquelles sont écrites des répliques ou des indications, comme des phylactères, ou des décors peints en aplats noirs, très réussis, qui ne sont pas sans évoquer le trait de Marjane Satrapi, pour ne citer qu’elle. «Enfant de la lune à l’œil crevé», Éthienne promène son ombre, son double décalqué sur du papier carbone, entre la réalité et ce qui est inventé, transmettant l’ambivalence du petit garçon quand il réalise qu’il n’a que les parents qu’il a. Non, son père n’est pas un héros et, bien qu’il ait cherché à tuer ses parents, cela ne l’empêchera pas de «pleurer comme un veau» le jour de leur disparition.
Merveilleux conteur, Francis Monty – assisté de Mathieu Doyon, musicien et bruiteur redoutablement efficace, – se laisse au fil du spectacle littéralement emporter dans le flot de son histoire. Et le spectateur plonge, avec lui et avec délices, dans ce tourbillon abracadabrant. «Vieilli en fût de chêne» pendant dix ans, longuement mûri et particulièrement solide, le texte est truffé de jeux de mots et d’images délicieusement drôles où l’humour, la dérision et la fantaisie, avec juste ce qu’il faut de crasse un peu sale, font merveille et touchent à tout coup. Il se déguste comme une gourmandise, tellement il est savoureux dans sa grande loufoquerie.
On se régale de voir se matérialiser, grâce à quelques bouts de papier déchiré, cette histoire complètement débridée, servie par une ingéniosité et une dextérité dans la manipulation qui forcent l’admiration. Ce Petit Bonhomme en papier carbone va certainement laisser des traces partout…
Texte et mise en scène: Francis Monty. Dessins: Francis Monty et Julie Vallée-Léger. Une Production du Théâtre de la Pire Espèce. Aux Écuries jusqu’au 26 avril 2014. À la Maison de la culture Marie-Uguay le 5 avril 2018.
Ce Petit bonhomme a déjà un long parcours. Francis Monty en écrit une première version en 2003, présentée au Festival du Jamais Lu en 2005. Puis il le laisse de côté avant de le reprendre, en 2008. Il y travaille en pointillés, entre deux tournées. Après plusieurs lectures devant public jeune ou adulte, le processus se termine par une résidence au Bouffou Théâtre à la Coque, en France, avant sa création en novembre 2012, qui sera suivie d’une trentaine de représentations.
Ethienne «avec un H» est un personnage dessiné en noir sur fond blanc, ou une minuscule marionnette en couleur, qui vit dans une drôle de famille composée de 56 frères, «des molosses et des colosses». Parmi eux, Léon le nul, qui rêve d’être un train et mange des clous en cachette, dont l’histoire a été racontée dans le spectacle du même nom, coproduit par le Théâtre Bouches Décousues et le Théâtre de la Pire Espèce en 2005. Derrière un petit castelet dont même le rideau est en papier dessiné, Francis Monty raconte à un train d’enfer la quête initiatique, «l’histoire noire et salissante» d’Éthienne, qui veut comprendre pourquoi sa famille semble maudite: le père, de bovin mou, s’est vu transformé en «vache pasteurisée», et la mère est représentée par une chaussure fleurie. Et lui, comme tous les petits garçons, il rêve d’être un cow-boy…
À l’aide de feuilles de papier, de dessins et de quelques objets brillamment utilisés (les thermos de café pour symboliser à la fois l’usine et la pause des ouvriers…) Monty fabrique un univers délirant et complètement déjanté, dans une facture très bande dessinée. Ainsi il brandit des pancartes sur lesquelles sont écrites des répliques ou des indications, comme des phylactères, ou des décors peints en aplats noirs, très réussis, qui ne sont pas sans évoquer le trait de Marjane Satrapi, pour ne citer qu’elle. «Enfant de la lune à l’œil crevé», Éthienne promène son ombre, son double décalqué sur du papier carbone, entre la réalité et ce qui est inventé, transmettant l’ambivalence du petit garçon quand il réalise qu’il n’a que les parents qu’il a. Non, son père n’est pas un héros et, bien qu’il ait cherché à tuer ses parents, cela ne l’empêchera pas de «pleurer comme un veau» le jour de leur disparition.
Merveilleux conteur, Francis Monty – assisté de Mathieu Doyon, musicien et bruiteur redoutablement efficace, – se laisse au fil du spectacle littéralement emporter dans le flot de son histoire. Et le spectateur plonge, avec lui et avec délices, dans ce tourbillon abracadabrant. «Vieilli en fût de chêne» pendant dix ans, longuement mûri et particulièrement solide, le texte est truffé de jeux de mots et d’images délicieusement drôles où l’humour, la dérision et la fantaisie, avec juste ce qu’il faut de crasse un peu sale, font merveille et touchent à tout coup. Il se déguste comme une gourmandise, tellement il est savoureux dans sa grande loufoquerie.
On se régale de voir se matérialiser, grâce à quelques bouts de papier déchiré, cette histoire complètement débridée, servie par une ingéniosité et une dextérité dans la manipulation qui forcent l’admiration. Ce Petit Bonhomme en papier carbone va certainement laisser des traces partout…
Petit bonhomme en papier carbone
Texte et mise en scène: Francis Monty. Dessins: Francis Monty et Julie Vallée-Léger. Une Production du Théâtre de la Pire Espèce. Aux Écuries jusqu’au 26 avril 2014. À la Maison de la culture Marie-Uguay le 5 avril 2018.