Vêtus de longs manteaux en peau de castor, après avoir bien ri à la lecture du programme de la soirée, les deux comparses retirent leurs innombrables vêtements superposés. Derrière chaque nouvelle pelure retirée apparaît un autre caractère, une autre époque, comme autant d’habits qui font et défont le moine. Au fil de ce lent striptease surgissent dans notre cinéma intérieur les images issues de l’inconscient collectif : années 1950, univers rock, boogaloos, hippies, bref, la déferlante des soixante dernières années.
Mise en situation indispensable pour la suite. Dans ce montage librement adapté à partir de quatre textes de Jean-Paul Dubois (Tous les matins je me lève, Vous aurez de mes nouvelles, Parfois je ris tout seul et La Succession), les deux comédiens deviennent des caméléons qui se teintent des couleurs de chaque petit moment de vie. Costumes et accessoires évoquent en traits parfois subtils, parfois grossiers les situations qui n’ont en commun que le ton de l’auteur : anecdote absurde, interrogation sur la vie des mouches et leur perception du monde, questionnement sur le sens de la vie, présence de la mort, évocation récurrente du père, poussée jusqu’au leitmotiv, autant d’histoires et d’anecdotes qui n’ont de lien entre elles que leur genèse dans le discours intérieur de Dubois.
Une déroutante nostalgie
Le spectacle repose sur la grande complicité des deux comédiens et la puissante présence de Marcel Pomerlo, avec son crâne nu comme une bille, sa moustache rasée qui lui « grossit le nez », son corps de danseur, sa polyvalence. Passant du piano à la danse – avec entre autres ce touchant cha-cha-cha popularisé par Dalida et repris ici en espagnol (Histoire d’un amour), où l’élégant Michel-Maxime Legault, dans sa robe noire cintrée, juché sur des talons très hauts, nous fait oublier sa pilosité faciale –, ouvrant des portes secrètes, modulant progressivement l’espace de vêtements oubliés, de lampes hétéroclites, entonnant des chansons mélancoliques, Parfois, la nuit, je ris tout seul, avec ses choix musicaux et ses vieilleries, baigne dans une nostalgie plutôt déroutante. Comme s’il y avait une distorsion entre l’esprit des textes de Dubois et leur illustration sur scène.
Les comédiens et metteurs en scène ne parviennent pas à créer cet ébranlement qui devrait dérouter le rationnel. Bien sûr, il y a des moments troubles, un lien intime avec le public, des images évocatrices et séductrices, de belles métamorphoses en direct, mais l’écart entre le familier et l’étrange ne convainc pas. Au-delà des imprécisions normales un soir de première, de certains relâchements, il manque encore cette adéquation entre l’interprétation des textes et leur transposition sur la scène. Ce n’est pas le talent des comédiens-danseurs-chanteurs qui est en cause, mais la texture même de la mise en scène. Ou alors il faudrait changer le texte du programme qui laisse planer de plus grandes étrangetés, de plus fortes distorsions.
Texte : Jean-Paul Dubois. Choix des textes, dramaturgie, mise en scène et interprétation : Michel-Maxime Legault et Marcel Pomerlo. Décor, costumes et accessoires : Elen Ewing. Lumière : David-Alexandre Chabot. Son : Laurier Rajotte. Une production du Théâtre de la Marée haute. À Premier Acte jusqu’au 19 novembre 2106, puis au Théâtre de Quat’Sous du 24 avril au 5 mai 2017.
Vêtus de longs manteaux en peau de castor, après avoir bien ri à la lecture du programme de la soirée, les deux comparses retirent leurs innombrables vêtements superposés. Derrière chaque nouvelle pelure retirée apparaît un autre caractère, une autre époque, comme autant d’habits qui font et défont le moine. Au fil de ce lent striptease surgissent dans notre cinéma intérieur les images issues de l’inconscient collectif : années 1950, univers rock, boogaloos, hippies, bref, la déferlante des soixante dernières années.
Mise en situation indispensable pour la suite. Dans ce montage librement adapté à partir de quatre textes de Jean-Paul Dubois (Tous les matins je me lève, Vous aurez de mes nouvelles, Parfois je ris tout seul et La Succession), les deux comédiens deviennent des caméléons qui se teintent des couleurs de chaque petit moment de vie. Costumes et accessoires évoquent en traits parfois subtils, parfois grossiers les situations qui n’ont en commun que le ton de l’auteur : anecdote absurde, interrogation sur la vie des mouches et leur perception du monde, questionnement sur le sens de la vie, présence de la mort, évocation récurrente du père, poussée jusqu’au leitmotiv, autant d’histoires et d’anecdotes qui n’ont de lien entre elles que leur genèse dans le discours intérieur de Dubois.
Une déroutante nostalgie
Le spectacle repose sur la grande complicité des deux comédiens et la puissante présence de Marcel Pomerlo, avec son crâne nu comme une bille, sa moustache rasée qui lui « grossit le nez », son corps de danseur, sa polyvalence. Passant du piano à la danse – avec entre autres ce touchant cha-cha-cha popularisé par Dalida et repris ici en espagnol (Histoire d’un amour), où l’élégant Michel-Maxime Legault, dans sa robe noire cintrée, juché sur des talons très hauts, nous fait oublier sa pilosité faciale –, ouvrant des portes secrètes, modulant progressivement l’espace de vêtements oubliés, de lampes hétéroclites, entonnant des chansons mélancoliques, Parfois, la nuit, je ris tout seul, avec ses choix musicaux et ses vieilleries, baigne dans une nostalgie plutôt déroutante. Comme s’il y avait une distorsion entre l’esprit des textes de Dubois et leur illustration sur scène.
Les comédiens et metteurs en scène ne parviennent pas à créer cet ébranlement qui devrait dérouter le rationnel. Bien sûr, il y a des moments troubles, un lien intime avec le public, des images évocatrices et séductrices, de belles métamorphoses en direct, mais l’écart entre le familier et l’étrange ne convainc pas. Au-delà des imprécisions normales un soir de première, de certains relâchements, il manque encore cette adéquation entre l’interprétation des textes et leur transposition sur la scène. Ce n’est pas le talent des comédiens-danseurs-chanteurs qui est en cause, mais la texture même de la mise en scène. Ou alors il faudrait changer le texte du programme qui laisse planer de plus grandes étrangetés, de plus fortes distorsions.
Parfois, la nuit, je ris tout seul
Texte : Jean-Paul Dubois. Choix des textes, dramaturgie, mise en scène et interprétation : Michel-Maxime Legault et Marcel Pomerlo. Décor, costumes et accessoires : Elen Ewing. Lumière : David-Alexandre Chabot. Son : Laurier Rajotte. Une production du Théâtre de la Marée haute. À Premier Acte jusqu’au 19 novembre 2106, puis au Théâtre de Quat’Sous du 24 avril au 5 mai 2017.