Ambitieux est probablement l’un des adjectifs les plus à même de décrire le projet de la compagnie belge Karyatides, soit d’adapter le monumental – dans tous les sens du terme – roman de Victor Hugo, Les Misérables en théâtre d’objets (plusieurs bibelots à figure humaine, deux ou trois boîtes de métal et à peine quelques accessoires) et de le présenter aux enfants. Pourtant, le résultat, proposé dans le cadre du festival Coups de théâtre et qui consiste en une fresque humaine et sociale toute en sobriété, est plus que probant.
Bien qu’il possède un indéniable caractère épique, ce chef d’œuvre de la littérature romantique ne se mue pas, ici, en une cavalcade d’aventures et de poursuites hautes en couleurs. Cette voie, facile, n’est certaine pas celle empruntée par les auteures et comédiennes Marie Delhaye et Karine Birgé ou par les metteures en scène Agnès Limbos et Félicie Artaud. Le principal effet spécial de la production réside en une table qui peut pivoter sur son socle et dont le plateau, où se déroule l’action, est aimanté et peut donc se retourner face vers le bas et vice versa sans que ne tombent par terre les figurines qu’il héberge. Ces mouvements rendent possibles tant des ellipses (par exemple, avant que le plateau ne bascule, Valjean est seul et lorsqu’il revient à sa position initiale, le bagnard est suivi du policier Javert) que des changements de lieux et de décors alternés.
Simplicité et vérité
Mis à part ces quelques procédés scénographiques, le dynamisme du spectacle repose essentiellement sur le jeu des deux comédiennes. Celles-ci ne se contentent pas du rôle de manipulatrices, mais interagissent, pour faire évoluer le récit, tantôt avec les petits personnages de plâtre ou de plastique, tantôt entre elles et cela s’avère fort heureux, car les statuettes utilisées, dont plusieurs sont monochromes, ont certainement leur limite quant à l’expression potentielle d’émotions. Les deux femmes occupent donc aussi les fonctions de narratrices et d’actrices. Leur jeu subtil et juste permet à l’auditoire de prendre la pleine mesure des événements narrés, de la déchéance de Fantine à l’appel aux armes de Gavroche.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que le récit s’ouvre et se ferme sur une montée aux barricades du peuple français, dont la Révolution, plus enthousiaste que vindicative, vise fondamentalement à favoriser la justice sociale. Si l’usage des éclairages est efficace tout au long du spectacle, il se révèle particulièrement percutant vers la fin, alors que les lumières, en s’allumant dans la salle, interpellent les spectateurs, faisant ainsi écho à l’invitation au combat et à la rébellion qui est lancée de la scène au public.
Néanmoins, même cet élan n’échappe pas à la retenue caractérisant toutes les facettes de cette adaptation habilement simplifiée des Misérables. Exempte de raccourcis infantilisants, celle-ci devient pratiquement un conte réaliste portant sur l’égalité des chances, la répartition des richesses et la rédemption. Un classique tout à fait d’actualité, donc, auquel on aura eu la bonne idée d’initier les jeunes.
Texte : Marie Delhaye et Karine Birgé, d’après le roman de Victor Hugo. Mise en scène : Agnès Limbos et Félicie Artaud. Scénographie : Frédérique de Montblanc. Éclairages : Dimitri Jurkowsky. Costumes : Françoise Colpé. Son : Guillaume Istace. Avec Marie Delhaye et Karine Birgé. Une production de la Compagnie Karyatides. Au Studio du Monument-National, à l’occasion des Coups de théâtre, le 17 novembre 2016.
Ambitieux est probablement l’un des adjectifs les plus à même de décrire le projet de la compagnie belge Karyatides, soit d’adapter le monumental – dans tous les sens du terme – roman de Victor Hugo, Les Misérables en théâtre d’objets (plusieurs bibelots à figure humaine, deux ou trois boîtes de métal et à peine quelques accessoires) et de le présenter aux enfants. Pourtant, le résultat, proposé dans le cadre du festival Coups de théâtre et qui consiste en une fresque humaine et sociale toute en sobriété, est plus que probant.
Bien qu’il possède un indéniable caractère épique, ce chef d’œuvre de la littérature romantique ne se mue pas, ici, en une cavalcade d’aventures et de poursuites hautes en couleurs. Cette voie, facile, n’est certaine pas celle empruntée par les auteures et comédiennes Marie Delhaye et Karine Birgé ou par les metteures en scène Agnès Limbos et Félicie Artaud. Le principal effet spécial de la production réside en une table qui peut pivoter sur son socle et dont le plateau, où se déroule l’action, est aimanté et peut donc se retourner face vers le bas et vice versa sans que ne tombent par terre les figurines qu’il héberge. Ces mouvements rendent possibles tant des ellipses (par exemple, avant que le plateau ne bascule, Valjean est seul et lorsqu’il revient à sa position initiale, le bagnard est suivi du policier Javert) que des changements de lieux et de décors alternés.
Simplicité et vérité
Mis à part ces quelques procédés scénographiques, le dynamisme du spectacle repose essentiellement sur le jeu des deux comédiennes. Celles-ci ne se contentent pas du rôle de manipulatrices, mais interagissent, pour faire évoluer le récit, tantôt avec les petits personnages de plâtre ou de plastique, tantôt entre elles et cela s’avère fort heureux, car les statuettes utilisées, dont plusieurs sont monochromes, ont certainement leur limite quant à l’expression potentielle d’émotions. Les deux femmes occupent donc aussi les fonctions de narratrices et d’actrices. Leur jeu subtil et juste permet à l’auditoire de prendre la pleine mesure des événements narrés, de la déchéance de Fantine à l’appel aux armes de Gavroche.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que le récit s’ouvre et se ferme sur une montée aux barricades du peuple français, dont la Révolution, plus enthousiaste que vindicative, vise fondamentalement à favoriser la justice sociale. Si l’usage des éclairages est efficace tout au long du spectacle, il se révèle particulièrement percutant vers la fin, alors que les lumières, en s’allumant dans la salle, interpellent les spectateurs, faisant ainsi écho à l’invitation au combat et à la rébellion qui est lancée de la scène au public.
Néanmoins, même cet élan n’échappe pas à la retenue caractérisant toutes les facettes de cette adaptation habilement simplifiée des Misérables. Exempte de raccourcis infantilisants, celle-ci devient pratiquement un conte réaliste portant sur l’égalité des chances, la répartition des richesses et la rédemption. Un classique tout à fait d’actualité, donc, auquel on aura eu la bonne idée d’initier les jeunes.
Les Misérables
Texte : Marie Delhaye et Karine Birgé, d’après le roman de Victor Hugo. Mise en scène : Agnès Limbos et Félicie Artaud. Scénographie : Frédérique de Montblanc. Éclairages : Dimitri Jurkowsky. Costumes : Françoise Colpé. Son : Guillaume Istace. Avec Marie Delhaye et Karine Birgé. Une production de la Compagnie Karyatides. Au Studio du Monument-National, à l’occasion des Coups de théâtre, le 17 novembre 2016.