La venue à la Maison Théâtre de ce spectacle de la compagnie belge Bronks promet d’être un événement. Créé en 2014, une décennie après la prise d’otages qui l’a inspiré, survenue dans une école de Beslan, en Russie, Nous/Eux raconte, à travers les yeux des enfants qui l’ont vécu, ce drame qui pourrait être des plus traumatisants. Pourtant, c’est une œuvre pleine de vie, mâtinée d’humour et d’une certaine légèreté, qu’on nous annonce.
FKPH
Jointe à Bruxelles, au retour d’une tournée en Australie et en Nouvelle-Zélande, la directrice artistique de Bronks, Veerle Kerckhoven, explique que c’est précisément le point de vue des enfants que l’équipe de création a voulu mettre de l’avant: «Les enfants ont une autre perception, ils vivent dans une réalité différente de celle des adultes, ne connaissent pas le contexte global, ne font pas les liens politiques, ils sont dans l’ici et maintenant.» Elle tient à préciser que Nous/Eux a été créé avant tous les attentats de Paris et de Bruxelles.
«L’idée est venue à l’auteure et metteuse en scène Carly Wijs, dit-elle, un jour où, avec son fils de 10 ans, elle regardait le journal télévisé: on parlait d’un enlèvement au Nigéria, les images étaient cruelles, et elle en était très affectée. Son fils lui a alors dit: « Oui, maman, c’est cruel et incroyable, mais est-ce que je peux manger mon dessert et regarder mon iPad? » En deux secondes, il était passé à autre chose. Elle a été choquée par cette réaction.»
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Quelque temps après, en voyant le documentaire Children of Beslan de Ewa Ewart et Leslie Woodhead (2005), Carly Wijs conçoit le projet de ce spectacle, en constatant que les enfants impliqués dans l’attentat ont le même type d’attitude, un peu distante, détachée, que son fils. En même temps, elle y sent bien la sagesse de ces jeunes, leur envie de vivre, leur compréhension intime d’une situation extrême qu’ils doivent affronter dans l’immédiat. Le déclic vient de se faire.
Le spectacle met en scène deux jeunes, une fille et un garçon, qui narrent à leur façon, dynamique, enjouée, tonitruante, l’aventure terrifiante qu’ils ont vécue et dont ils sont sortis indemnes, contrairement à d’autres. Le sujet est délicat, mais la lucidité des enfants et le traitement scénique permettent de transcender l’horreur. Les comédiens, Gytha Parmentier, une actrice sachant danser, et Roman Van Houtven, un danseur qui se révèle bon acteur, ont côtoyé le meilleur de l’avant-gardiste scène flamande, d’Alain Platel à Anne Teresa De Keersmaeker. Leur jeu très physique, d’une grande énergie, s’inscrit dans une scénographie qui est partie prenante de l’intrigue, faite notamment de fils comme ceux auxquels les bombes étaient attachées, à Beslan.
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Veerle Kerkhoven explique que, dès le début du processus de création, véritable travail d’équipe, la scénographie, à l’instar des éclairages, a été élaborée en même temps que le texte, écrit par Carly Wijs en partant des improvisations des comédiens. Réussite exemplaire, l’œuvre est présentée depuis quatre ans, en néerlandais, en français et en anglais, et reçoit, dit-elle, le même accueil partout, en Belgique, aux États-Unis, en France, en Afrique du Sud ou en Nouvelle-Zélande: «Les gens rigolent, car c’est plein d’humour, et pleurent en même temps.»
Ce qui l’étonne, c’est que le spectacle, en Belgique, s’adresse aux enfants dès 9 ans, alors qu’ailleurs, où on trouve le sujet trop audacieux, on l’offre aux jeunes à partir de 14, 15, 16 ans. À Montréal, on cible les 10 à 17 ans. «Les enfants d’aujourd’hui voient beaucoup plus de choses que notre génération, lance la directrice artistique. Sur YouTube, ils ont accès à des images violentes et cruelles, et les parents ne le savent pas toujours. Il ne faut pas essayer de les protéger, au contraire: il faut aborder les sujets difficiles et, après le spectacle, on peut en parler en famille.»
Texte et mise en scène: Carly Wijs. Cocréation: Thomas Vantuycom. Dramaturgie: Mieke Versyp. Scénographie: Stef Stessel. Éclairages: Thomas Clause. Son: Peter Brughmans. Avec Gytha Parmentier et Roman Van Houtven. Une production de Bronks. À la Maison Théâtre du 11 au 15 avril 2018.
La venue à la Maison Théâtre de ce spectacle de la compagnie belge Bronks promet d’être un événement. Créé en 2014, une décennie après la prise d’otages qui l’a inspiré, survenue dans une école de Beslan, en Russie, Nous/Eux raconte, à travers les yeux des enfants qui l’ont vécu, ce drame qui pourrait être des plus traumatisants. Pourtant, c’est une œuvre pleine de vie, mâtinée d’humour et d’une certaine légèreté, qu’on nous annonce.
Jointe à Bruxelles, au retour d’une tournée en Australie et en Nouvelle-Zélande, la directrice artistique de Bronks, Veerle Kerckhoven, explique que c’est précisément le point de vue des enfants que l’équipe de création a voulu mettre de l’avant: «Les enfants ont une autre perception, ils vivent dans une réalité différente de celle des adultes, ne connaissent pas le contexte global, ne font pas les liens politiques, ils sont dans l’ici et maintenant.» Elle tient à préciser que Nous/Eux a été créé avant tous les attentats de Paris et de Bruxelles.
«L’idée est venue à l’auteure et metteuse en scène Carly Wijs, dit-elle, un jour où, avec son fils de 10 ans, elle regardait le journal télévisé: on parlait d’un enlèvement au Nigéria, les images étaient cruelles, et elle en était très affectée. Son fils lui a alors dit: « Oui, maman, c’est cruel et incroyable, mais est-ce que je peux manger mon dessert et regarder mon iPad? » En deux secondes, il était passé à autre chose. Elle a été choquée par cette réaction.»
Quelque temps après, en voyant le documentaire Children of Beslan de Ewa Ewart et Leslie Woodhead (2005), Carly Wijs conçoit le projet de ce spectacle, en constatant que les enfants impliqués dans l’attentat ont le même type d’attitude, un peu distante, détachée, que son fils. En même temps, elle y sent bien la sagesse de ces jeunes, leur envie de vivre, leur compréhension intime d’une situation extrême qu’ils doivent affronter dans l’immédiat. Le déclic vient de se faire.
Le spectacle met en scène deux jeunes, une fille et un garçon, qui narrent à leur façon, dynamique, enjouée, tonitruante, l’aventure terrifiante qu’ils ont vécue et dont ils sont sortis indemnes, contrairement à d’autres. Le sujet est délicat, mais la lucidité des enfants et le traitement scénique permettent de transcender l’horreur. Les comédiens, Gytha Parmentier, une actrice sachant danser, et Roman Van Houtven, un danseur qui se révèle bon acteur, ont côtoyé le meilleur de l’avant-gardiste scène flamande, d’Alain Platel à Anne Teresa De Keersmaeker. Leur jeu très physique, d’une grande énergie, s’inscrit dans une scénographie qui est partie prenante de l’intrigue, faite notamment de fils comme ceux auxquels les bombes étaient attachées, à Beslan.
Veerle Kerkhoven explique que, dès le début du processus de création, véritable travail d’équipe, la scénographie, à l’instar des éclairages, a été élaborée en même temps que le texte, écrit par Carly Wijs en partant des improvisations des comédiens. Réussite exemplaire, l’œuvre est présentée depuis quatre ans, en néerlandais, en français et en anglais, et reçoit, dit-elle, le même accueil partout, en Belgique, aux États-Unis, en France, en Afrique du Sud ou en Nouvelle-Zélande: «Les gens rigolent, car c’est plein d’humour, et pleurent en même temps.»
Ce qui l’étonne, c’est que le spectacle, en Belgique, s’adresse aux enfants dès 9 ans, alors qu’ailleurs, où on trouve le sujet trop audacieux, on l’offre aux jeunes à partir de 14, 15, 16 ans. À Montréal, on cible les 10 à 17 ans. «Les enfants d’aujourd’hui voient beaucoup plus de choses que notre génération, lance la directrice artistique. Sur YouTube, ils ont accès à des images violentes et cruelles, et les parents ne le savent pas toujours. Il ne faut pas essayer de les protéger, au contraire: il faut aborder les sujets difficiles et, après le spectacle, on peut en parler en famille.»
Nous/Eux
Texte et mise en scène: Carly Wijs. Cocréation: Thomas Vantuycom. Dramaturgie: Mieke Versyp. Scénographie: Stef Stessel. Éclairages: Thomas Clause. Son: Peter Brughmans. Avec Gytha Parmentier et Roman Van Houtven. Une production de Bronks. À la Maison Théâtre du 11 au 15 avril 2018.