Au printemps 2018, Christian Lapointe présentait un ambitieux projet : l’écriture, par une assemblée de citoyen·nes, d’une constitution pour le Québec. L’artiste voulait aussi redonner au théâtre sa fonction d’agora au cœur de la cité, de lieu de prise de parole politique et non partisane.
En collaboration avec l’Institut du Nouveau Monde (INM), et avec l’aide de la firme de sondage Léger 360, 42 Québécois·es ont été choisis de manière aléatoire, tout en respectant certains critères (parité homme-femme, origine ethnoculturelle, âge, niveau de scolarité, etc.) pour former l’Assemblée constituante. Après une formation, ils et elles se sont réunis pour déterminer les questions à poser lors des consultations publiques, réalisées en partenariat avec onze théâtres répartis dans la province. Les participant·es y étaient invités à réfléchir sur des sujets comme les valeurs et les principes qui définissent l’identité québécoise, le mode de scrutin, les droits et les devoirs citoyens, les institutions et l’administration du pouvoir, l’organisation du territoire, la reconnaissance des peuples autochtones…
On imagine le travail colossal que cela représente (réalisé par l’équipe de l’INM) pour organiser les consultations publiques et les rencontres des membres de l’Assemblée, pour colliger les données recueillies auprès des 254 personnes ayant participé aux rencontres citoyennes, des 2 163 internautes ayant répondu au questionnaire en ligne et des 41 mémoires reçus. (Pour plus d’informations, consultez l’article de Normand Baillargeon sur le site de JEU.)
En avril 2019, l’Assemblée constituante a rédigé les 80 articles composant cette constitution, qui fait émerger les grandes préoccupations de la société québécoise, soit l’environnement, l’accès à l’éducation, aux soins et à la culture, la préservation de la langue française, une réforme du mode électoral, etc. Ce texte a été remis le 29 mai 2019 à la ministre de la Justice Sonia LeBel par la députée indépendante Catherine Fournier.
C’est tout ce processus que retrace le spectacle, un contenu d’articles de constitutions, de lettres de motivation, de questionnaires et de réponses, de mémoires, de commentaires, de courriels. Un matériau brut au champ lexical plus proche de celui du juriste que du poète qui, dans les mains de Christian Lapointe, devient, pourtant, du théâtre. De la poésie.
Seul en scène (mais entouré d’un arsenal technologique), Lapointe fabrique son théâtre, avec quelques objets, des figurines en plastique, des classeurs, des caméras, des micros… Un savant bricolage brillamment orchestré entre ce qui se passe et ce qui se dit en scène, et ce qui se montre sur les surfaces multiples qu’offre l’ingénieuse scénographie d’Anick La Bissonnière. Images captées en direct et projetées, photos, vidéos, graphiques… Des noms, des visages, des regards, des paroles, des gens, toi, moi, nous.
Et puis il y a lui, Lapointe. Avec son intensité, son intelligence du texte, sa folie du jeu. Il fait spectacle de tout, il ose tout, donnant littéralement corps à son projet. Il vocifère, il murmure, il joue, il provoque, et l’on retrouve l’énergumène qui mène des projets plus grands que lui, ce fou génial qui voulait lire tout Artaud.
La deuxième partie est ludique et interactive, on rit d’un Lapointe en Gino de loterie, on répond au questionnaire en agitant des cartons de couleur, on échange avec son voisin, on s’amuse. On se permet même de rêver à une société inclusive, juste et équitable…
À la fin du spectacle, le public est invité à venir lire les articles de la constitution. Le soir de la première, dix jeunes ont pris la scène d’assaut, et cette jeunesse lisant ce qui ferait du Québec un paradis terrestre avait quelque chose de réjouissant pour l’avenir…
« Article 80. La présente Constitution entre en vigueur le [indiquer ici la date].»
Idéation, mise en scène et interprétation : Christian Lapointe. Participation spéciale : Alexandre Bacon. Dramaturgie : Marie-Claude Verdier. Scénographie : Anick La Bissonnière.Éclairages : Martin Sirois.Musique originale : Martien Bélanger. Vidéo : Lionel Arnould. Une production de Carte blanche, présentée jusqu’au 4 juin au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, à l’occasion du FTA et à partir du 12 novembre.
Au printemps 2018, Christian Lapointe présentait un ambitieux projet : l’écriture, par une assemblée de citoyen·nes, d’une constitution pour le Québec. L’artiste voulait aussi redonner au théâtre sa fonction d’agora au cœur de la cité, de lieu de prise de parole politique et non partisane.
En collaboration avec l’Institut du Nouveau Monde (INM), et avec l’aide de la firme de sondage Léger 360, 42 Québécois·es ont été choisis de manière aléatoire, tout en respectant certains critères (parité homme-femme, origine ethnoculturelle, âge, niveau de scolarité, etc.) pour former l’Assemblée constituante. Après une formation, ils et elles se sont réunis pour déterminer les questions à poser lors des consultations publiques, réalisées en partenariat avec onze théâtres répartis dans la province. Les participant·es y étaient invités à réfléchir sur des sujets comme les valeurs et les principes qui définissent l’identité québécoise, le mode de scrutin, les droits et les devoirs citoyens, les institutions et l’administration du pouvoir, l’organisation du territoire, la reconnaissance des peuples autochtones…
On imagine le travail colossal que cela représente (réalisé par l’équipe de l’INM) pour organiser les consultations publiques et les rencontres des membres de l’Assemblée, pour colliger les données recueillies auprès des 254 personnes ayant participé aux rencontres citoyennes, des 2 163 internautes ayant répondu au questionnaire en ligne et des 41 mémoires reçus. (Pour plus d’informations, consultez l’article de Normand Baillargeon sur le site de JEU.)
En avril 2019, l’Assemblée constituante a rédigé les 80 articles composant cette constitution, qui fait émerger les grandes préoccupations de la société québécoise, soit l’environnement, l’accès à l’éducation, aux soins et à la culture, la préservation de la langue française, une réforme du mode électoral, etc. Ce texte a été remis le 29 mai 2019 à la ministre de la Justice Sonia LeBel par la députée indépendante Catherine Fournier.
C’est tout ce processus que retrace le spectacle, un contenu d’articles de constitutions, de lettres de motivation, de questionnaires et de réponses, de mémoires, de commentaires, de courriels. Un matériau brut au champ lexical plus proche de celui du juriste que du poète qui, dans les mains de Christian Lapointe, devient, pourtant, du théâtre. De la poésie.
Seul en scène (mais entouré d’un arsenal technologique), Lapointe fabrique son théâtre, avec quelques objets, des figurines en plastique, des classeurs, des caméras, des micros… Un savant bricolage brillamment orchestré entre ce qui se passe et ce qui se dit en scène, et ce qui se montre sur les surfaces multiples qu’offre l’ingénieuse scénographie d’Anick La Bissonnière. Images captées en direct et projetées, photos, vidéos, graphiques… Des noms, des visages, des regards, des paroles, des gens, toi, moi, nous.
Et puis il y a lui, Lapointe. Avec son intensité, son intelligence du texte, sa folie du jeu. Il fait spectacle de tout, il ose tout, donnant littéralement corps à son projet. Il vocifère, il murmure, il joue, il provoque, et l’on retrouve l’énergumène qui mène des projets plus grands que lui, ce fou génial qui voulait lire tout Artaud.
La deuxième partie est ludique et interactive, on rit d’un Lapointe en Gino de loterie, on répond au questionnaire en agitant des cartons de couleur, on échange avec son voisin, on s’amuse. On se permet même de rêver à une société inclusive, juste et équitable…
À la fin du spectacle, le public est invité à venir lire les articles de la constitution. Le soir de la première, dix jeunes ont pris la scène d’assaut, et cette jeunesse lisant ce qui ferait du Québec un paradis terrestre avait quelque chose de réjouissant pour l’avenir…
« Article 80. La présente Constitution entre en vigueur le [indiquer ici la date].»
Constituons !
Idéation, mise en scène et interprétation : Christian Lapointe. Participation spéciale : Alexandre Bacon. Dramaturgie : Marie-Claude Verdier. Scénographie : Anick La Bissonnière.Éclairages : Martin Sirois.Musique originale : Martien Bélanger. Vidéo : Lionel Arnould. Une production de Carte blanche, présentée jusqu’au 4 juin au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, à l’occasion du FTA et à partir du 12 novembre.