C’est avec une énergie contagieuse que les membres du Cirque Alfonse entrent sur scène comme s’il s’agissait de la passerelle du défilé d’un enfant terrible de la mode. Mélodie endiablée, danses allègres et tenues délicieusement kitsch donnent le ton au spectacle. Car c’est à une grande fête dans une ferme unique en son genre que sont convié·es les spectateurs et spectatrices d’Animal. Si les numéros qui se succéderont s’avéreront d’un intérêt inégal, l’ambiance, elle, nourrie par la musique traditionnelle revampée et interprétée en direct sur le plateau, restera sympathique du début à la fin.
L’iconographie agricole mise de l’avant se manifeste entre autres dans les accessoires choisis : des œufs sont utilisés dans un numéro de jonglerie sur planche coréenne, des brouettes servent à un enchaînement de main à main, alors qu’une chorégraphie entière est élaborée autour de fourches et de seaux de grains et que quelques acrobaties se déroulent sur un pneu de tracteur en mouvement. Les bidons à lait jouent aussi un rôle prépondérant puisqu’ils servent de piédestaux sur lesquels les artistes circassien·nes se livreront tantôt à un duo féminin mariant le main à main à l’équilibre, tantôt à des lancés-attrapés dont le projectile est une cloche à vache surdimensionnée.
Certaines références au bestiaire fermier s’avèrent toutefois moins percutantes, comme la prestation dansée d’une vache (une circassienne ayant revêtu un costume gonflable) et la marche sur échasses d’Alain Carabinier devant un mur de tôle d’où émergent des poulets en plastique sur l’air revisité de la Danse des canards. On saluera, par ailleurs, le retour sur scène du patriarche de la famille Carabinier-Lépine. Il est émouvant de voir le septuagénaire perché au haut d’un mât arrimé à l’épaule de son fils, tel un Anchise glorieux porté par un fier Énée.
De hauts en bas
Un autre mât donnera des frissons au public. Celui-ci, également soutenu par le porteur de la troupe, mais formant un angle d’environ 90 degrés (épousant ainsi la forme du chiffre sept), et dont la partie horizontale est munie de sangles, permet à Justine Méthé-Crozat de se livrer à un exercice aérien périlleux et fort original. Au registre des innovations, mentionnons en outre une planche flanquée à ses extrémités de balançoires (sur lesquelles sont assises les acrobates féminines de la troupe) que fait tournoyer Jean-Philippe Cuerrier, couché dans une brouette, avec ses jambes.
Le soir de la première médiatique, il y a bien eu quelques ratés (dont une chute), mais ces déconvenues ne font que rendre plus tangibles les difficultés techniques qu’affrontent les artistes de Saint-Alfonse-Rodriguez. Ce qui mine davantage la production, et plus précisément son rythme, sont les numéros de transition (à l’exception d’une rafraîchissante chorégraphie de gigue regroupant toute l’équipe, jusqu’aux musicien·nes), qui peinent par moments à captiver le public.
Ceux et celles qui déploreront l’omniprésence du main à main (sur des bidons de lait, dans des brouettes, sur une planche posée sur un tube qui roule au sol, etc.), au détriment des autres disciplines circassiennes, se consoleront du fait que le spectacle se conclut par un numéro construit autour d’un taureau mécanique, dont le moment phare est sans doute le maniement du lasso par Antoine Carabinier-Lépine, debout sur sa monture de fer. Une finale qui permet de clore Animal comme celui-ci a été entamé, soit sous le signe du ludisme.
Mise en scène : Alain Francoeur. Direction artistique : Julie et Antoine Carabinier-Lépine. Musique : David Simard. Éclairages : Nicolas Descôteaux, assisté de Jean-François Piché. Costumes : Geneviève Beauchamp. Matériel acrobatique : Sylvain Lafrenière. Avec (musique), Josianne Laporte, David Simard, Guillaume Turcotte; (acrobaties) Antoine Carabinier-Lépine, Julie Carabinier-Lépine, Alain Carabinier, Jonathan Casaubon, Jean-Philippe Cuerrier et Justine Méthé-Crozat. Une production de Cirque Alfonse, présenté à la Tohu, à l’occasion de Montréal Complètement Cirque, jusqu’au 11 juillet 2021.
C’est avec une énergie contagieuse que les membres du Cirque Alfonse entrent sur scène comme s’il s’agissait de la passerelle du défilé d’un enfant terrible de la mode. Mélodie endiablée, danses allègres et tenues délicieusement kitsch donnent le ton au spectacle. Car c’est à une grande fête dans une ferme unique en son genre que sont convié·es les spectateurs et spectatrices d’Animal. Si les numéros qui se succéderont s’avéreront d’un intérêt inégal, l’ambiance, elle, nourrie par la musique traditionnelle revampée et interprétée en direct sur le plateau, restera sympathique du début à la fin.
L’iconographie agricole mise de l’avant se manifeste entre autres dans les accessoires choisis : des œufs sont utilisés dans un numéro de jonglerie sur planche coréenne, des brouettes servent à un enchaînement de main à main, alors qu’une chorégraphie entière est élaborée autour de fourches et de seaux de grains et que quelques acrobaties se déroulent sur un pneu de tracteur en mouvement. Les bidons à lait jouent aussi un rôle prépondérant puisqu’ils servent de piédestaux sur lesquels les artistes circassien·nes se livreront tantôt à un duo féminin mariant le main à main à l’équilibre, tantôt à des lancés-attrapés dont le projectile est une cloche à vache surdimensionnée.
Certaines références au bestiaire fermier s’avèrent toutefois moins percutantes, comme la prestation dansée d’une vache (une circassienne ayant revêtu un costume gonflable) et la marche sur échasses d’Alain Carabinier devant un mur de tôle d’où émergent des poulets en plastique sur l’air revisité de la Danse des canards. On saluera, par ailleurs, le retour sur scène du patriarche de la famille Carabinier-Lépine. Il est émouvant de voir le septuagénaire perché au haut d’un mât arrimé à l’épaule de son fils, tel un Anchise glorieux porté par un fier Énée.
De hauts en bas
Un autre mât donnera des frissons au public. Celui-ci, également soutenu par le porteur de la troupe, mais formant un angle d’environ 90 degrés (épousant ainsi la forme du chiffre sept), et dont la partie horizontale est munie de sangles, permet à Justine Méthé-Crozat de se livrer à un exercice aérien périlleux et fort original. Au registre des innovations, mentionnons en outre une planche flanquée à ses extrémités de balançoires (sur lesquelles sont assises les acrobates féminines de la troupe) que fait tournoyer Jean-Philippe Cuerrier, couché dans une brouette, avec ses jambes.
Le soir de la première médiatique, il y a bien eu quelques ratés (dont une chute), mais ces déconvenues ne font que rendre plus tangibles les difficultés techniques qu’affrontent les artistes de Saint-Alfonse-Rodriguez. Ce qui mine davantage la production, et plus précisément son rythme, sont les numéros de transition (à l’exception d’une rafraîchissante chorégraphie de gigue regroupant toute l’équipe, jusqu’aux musicien·nes), qui peinent par moments à captiver le public.
Ceux et celles qui déploreront l’omniprésence du main à main (sur des bidons de lait, dans des brouettes, sur une planche posée sur un tube qui roule au sol, etc.), au détriment des autres disciplines circassiennes, se consoleront du fait que le spectacle se conclut par un numéro construit autour d’un taureau mécanique, dont le moment phare est sans doute le maniement du lasso par Antoine Carabinier-Lépine, debout sur sa monture de fer. Une finale qui permet de clore Animal comme celui-ci a été entamé, soit sous le signe du ludisme.
Animal
Mise en scène : Alain Francoeur. Direction artistique : Julie et Antoine Carabinier-Lépine. Musique : David Simard. Éclairages : Nicolas Descôteaux, assisté de Jean-François Piché. Costumes : Geneviève Beauchamp. Matériel acrobatique : Sylvain Lafrenière. Avec (musique), Josianne Laporte, David Simard, Guillaume Turcotte; (acrobaties) Antoine Carabinier-Lépine, Julie Carabinier-Lépine, Alain Carabinier, Jonathan Casaubon, Jean-Philippe Cuerrier et Justine Méthé-Crozat. Une production de Cirque Alfonse, présenté à la Tohu, à l’occasion de Montréal Complètement Cirque, jusqu’au 11 juillet 2021.