Après Dimanche napalm et Les Hauts-parleurs, Sébastien David a écrit une fable pour les temps présents, Une fille en or. Lui et sa complice, l’époustouflante comédienne Amélie Dallaire, créent un univers qui se suffit à lui-même et où aucune logique naturaliste n’a d’emprise. Prière de laisser les envies de théâtre conventionnel à l’entrée.
La structure est simple, le récit, beaucoup moins. Le narrateur, Sébastien David, entre par la même porte par laquelle le public est passé quelques instants auparavant. Il s’adresse à lui en demandant d’éteindre les cellulaires. Puis, il prend place et commence à parler de la fille en or, qui sera suivie de trois autres personnages similaires, la fille en terre, la fille en double et la fille en pixels. À moins qu’il ne s’agisse de la même personne… Peut-être.
Ce conditionnel revient souvent dans la bouche du narrateur, ainsi que les mots « doute », « métaphore » et « structure » dans celle des personnages féminins. Rien n’est certain, tout est mystérieux. Ces filles sont en train de mourir et/ou de disparaître. L’une devient zombie et vedette des réseaux sociaux, une autre doit faire face à son double, très critique à son égard, et la quatrième se perd dans le web, pixelisée.
Quant à la fille en or, tel le roi Midas de la légende, tout ce qu’elle touche, les gens et les choses, se transforme en métal précieux. Mais comme elle le dit si bien, est-ce que c’est la mort qui les frappe en devenant statue ou ne serait-ce pas plutôt le mal-être de la vie quotidienne qui est annihilé ainsi ?
Un texte touffu
C’est ce genre de réflexions que suscite le texte touffu, aux accents poétiques, de l’auteur des Morb(y)des. Et plus encore : « On peut se dénaturer à toujours vouloir plaire », dira l’une des filles avec lucidité. Avec la trame sonore mystérieuse de Julien Éclancher et le décor tout en terre de Marie-Audrey Jacques, toute la matière à penser grouille et s’étale jusqu’à l’esprit du public. Voici un objet théâtral non identifié à la fois organique et éthéré, à la mise en scène inventive, usant de voix manipulées technologiquement, de costumes et d’accessoires incongrus.
La solitude, la précarité de l’existence, la célébrité et l’éternité sont d’autres questions importantes abordées à travers les différentes transformations physiques, tantôt inquiétantes tantôt comiques, que subissent ces quatre filles insécures et fragiles.
Le théâtre documentaire a maintenant ses lettres de noblesse au Québec, de même que les drames personnels incarnés par des dramaturges-interprètes. Une fille en or s’inscrit dans le retour fort bienvenu d’un genre qu’on pourrait qualifier de philosophico-fantastique. La dure réalité pandémique des dernières années nous a fait oublier la possibilité de créer des spectacles aussi éclatés. Enfin, peut-être…
C’est une pièce intelligente, porteuse de magie et d’une originalité de tous les instants, nous laissant souvent perplexes, mais tout autant songeurs et songeuses devant les questions qu’elle pose sur la condition humaine.
Texte et mise en scène : Sébastien David. Assistance à la mise en scène : Aurélie Marcoux et Andrée-Anne Pellerin. Scénographie : Marie-Audrey Jacques. Costumes et relais artistique au décor : Wendy Kim Pires. Lumières : Andréanne Deschênes. Composition musicale : Julien Éclancher. Vidéo : William V. Saumur. Conseils artistiques : André Gélineau. Direction artistique : Hubert Lemire. Avec Amélie Dallaire et Sébastien David. Une production du Théâtre du Double signe, présentée au Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 24 septembre 2022.
Après Dimanche napalm et Les Hauts-parleurs, Sébastien David a écrit une fable pour les temps présents, Une fille en or. Lui et sa complice, l’époustouflante comédienne Amélie Dallaire, créent un univers qui se suffit à lui-même et où aucune logique naturaliste n’a d’emprise. Prière de laisser les envies de théâtre conventionnel à l’entrée.
La structure est simple, le récit, beaucoup moins. Le narrateur, Sébastien David, entre par la même porte par laquelle le public est passé quelques instants auparavant. Il s’adresse à lui en demandant d’éteindre les cellulaires. Puis, il prend place et commence à parler de la fille en or, qui sera suivie de trois autres personnages similaires, la fille en terre, la fille en double et la fille en pixels. À moins qu’il ne s’agisse de la même personne… Peut-être.
Ce conditionnel revient souvent dans la bouche du narrateur, ainsi que les mots « doute », « métaphore » et « structure » dans celle des personnages féminins. Rien n’est certain, tout est mystérieux. Ces filles sont en train de mourir et/ou de disparaître. L’une devient zombie et vedette des réseaux sociaux, une autre doit faire face à son double, très critique à son égard, et la quatrième se perd dans le web, pixelisée.
Quant à la fille en or, tel le roi Midas de la légende, tout ce qu’elle touche, les gens et les choses, se transforme en métal précieux. Mais comme elle le dit si bien, est-ce que c’est la mort qui les frappe en devenant statue ou ne serait-ce pas plutôt le mal-être de la vie quotidienne qui est annihilé ainsi ?
Un texte touffu
C’est ce genre de réflexions que suscite le texte touffu, aux accents poétiques, de l’auteur des Morb(y)des. Et plus encore : « On peut se dénaturer à toujours vouloir plaire », dira l’une des filles avec lucidité. Avec la trame sonore mystérieuse de Julien Éclancher et le décor tout en terre de Marie-Audrey Jacques, toute la matière à penser grouille et s’étale jusqu’à l’esprit du public. Voici un objet théâtral non identifié à la fois organique et éthéré, à la mise en scène inventive, usant de voix manipulées technologiquement, de costumes et d’accessoires incongrus.
La solitude, la précarité de l’existence, la célébrité et l’éternité sont d’autres questions importantes abordées à travers les différentes transformations physiques, tantôt inquiétantes tantôt comiques, que subissent ces quatre filles insécures et fragiles.
Le théâtre documentaire a maintenant ses lettres de noblesse au Québec, de même que les drames personnels incarnés par des dramaturges-interprètes. Une fille en or s’inscrit dans le retour fort bienvenu d’un genre qu’on pourrait qualifier de philosophico-fantastique. La dure réalité pandémique des dernières années nous a fait oublier la possibilité de créer des spectacles aussi éclatés. Enfin, peut-être…
C’est une pièce intelligente, porteuse de magie et d’une originalité de tous les instants, nous laissant souvent perplexes, mais tout autant songeurs et songeuses devant les questions qu’elle pose sur la condition humaine.
Une fille en or
Texte et mise en scène : Sébastien David. Assistance à la mise en scène : Aurélie Marcoux et Andrée-Anne Pellerin. Scénographie : Marie-Audrey Jacques. Costumes et relais artistique au décor : Wendy Kim Pires. Lumières : Andréanne Deschênes. Composition musicale : Julien Éclancher. Vidéo : William V. Saumur. Conseils artistiques : André Gélineau. Direction artistique : Hubert Lemire. Avec Amélie Dallaire et Sébastien David. Une production du Théâtre du Double signe, présentée au Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 24 septembre 2022.