Fondées en 1985, les Productions Ondinnok peuvent se prévaloir du statut de première compagnie de théâtre autochtone francophone. Depuis ses débuts, elle s’est notamment donné pour mission d’explorer les mythologies de plusieurs cultures autochtones de l’Amérique du Nord, et ses créations s’inscrivent dans un théâtre contemporain qui vise à rayonner dans les communautés et jusqu’à l’étranger. Elle travaille en collaboration avec le Théâtre de la Vieille 17, compagnie ancrée dans l’Ontario français, pour offrir à des enfants de 4 à 8 ans un spectacle qui sollicite les sens, l’imagination et l’intelligence.
Le rideau se lève au son du cri des outardes qui partent vers le Sud. Ce conte d’automne, nimbé d’ors et de cuivres grâce aux éclairages d’Emilio Sebastiao, déploie un volet des légendes autochtones pour aborder, à hauteur de jeune public, les thèmes du deuil, de la transmission et des identités.
Le texte, du directeur artistique d’Ondinook, Dave Jenniss, a ceci de particulier qu’il mêle sans complexe français et wolastoqey, et ce, sans que la compréhension en soit diminuée. Dans une structure assez classique, il met en scène une fillette, Delphine (Marie-Pier Chamberland), qui part en quête du tambour de son grand-père, son muhsums, récemment décédé dans un monde onirique où elle rencontre des animaux amis et se voit obligée de confronter ses peurs. Elle y gagnera en sagesse et en puissance.
L’originalité de l’œuvre réside dans sa combinaison d’éléments culturels et linguistiques autochtones avec un contexte familier pour un jeune public allochtone, depuis les tas de feuilles mortes jusqu’à la balançoire invitante en passant par les exhortations répétées du père (Christian Pilon) à venir souper : « Delphine, à table! ».
Voix et chants des créatures
La mise en scène de Milena Buziak, d’une grande efficacité, permet des changements de décor et de costumes tout en souplesse et optimise l’utilisation de l’espace scénique par les personnages. D’une élégante simplicité, l’installation des musiciennes dans le cocon semi-circulaire qui figure également l’habitation du grand-père de Delphine met en valeur la performance musicale tout en l’intégrant parfaitement à l’action.
C’est justement le jeu des musiciennes qui, avec les costumes, cristallise la poésie de la pièce. On notera la performance musicale et la présence scénique inspirées d’Emily Marie Séguin en chouette-cantatrice exaltée. Que la diva de la forêt chante sa fierté dans un ramage de contralto, qu’elle conte sa peur dans un glapissement suraigu, qu’elle frissonne, transie, derrière son masque de plumes, on voit réellement un oiseau affairé apparaître sur scène. Et quand le maléfique Kiwahq (Geneviève d’Ortun), toutes griffes dehors, envoie son souffle de glace pour geler la volonté et le cœur de Delphine, c’est le public tout entier qui tremble d’effroi sous les assauts polaires de son saxophone blond.
La façon de souligner et de soutenir par la musique les personnages et leurs caractéristiques narratives n’est pas sans rappeler Pierre et le Loup de Sergueï Prokofiev. Tout comme dans ce dernier, Toqaq montre aussi une enfant qui triomphe de la Bête avec l’aide de tout un bestiaire après s’être émancipée de l’autorité parentale. Par contraste, toutefois, ce sont bien des mots qui sont prononcés ici par toutes les créatures de la forêt, aussi bien le vent et l’arbre que le porc-épic et la chouette.
Ces mots, qui ne peuvent exister sans le tambour qui bat, ce sont eux que la fillette cherche à sauver. La force de Delphine est façonnée par l’esprit du caribou qui l’habite et le souvenir de son grand-père qui l’inspire et la protège. Mais en se battant contre le Kiwahq – la Mort qui fige les histoires et efface les souvenirs – la fillette se bat pour la transmission et la survivance de la langue, de l’identité et des récits. Sa victoire sera celle de tou·tes les enfants confronté·es un jour ou l’autre à la nécessité de grandir, avec humour, poésie et une touche de magie.
Texte : Dave Jenniss. Mise en scène : Milena Buziak. Scénographie et éclairage : Emilio Sebastiao. Environnement sonore : Marie-Hélène Massy Émond. Composition musicale : Marie-Hélène Massy Émond, Geneviève D’Ortun et Emily Marie Séguin. Interprétation musicale : Emily Marie Séguin et Geneviève D’Ortun. Costumes : Samantha McCue. Régie : Alexie Madore Charron. Direction de production : Pascale Lemay et Jean Blanchet. Direction artistique : Dave Jenniss et Geneviève Pineault. Illustration : Catherine Boivin. Avec Marie-Pier Chamberland, Geneviève D’Ortun, Christian Pilon et Emily Marie Séguin. Une coproduction du Théâtre de la Vieille 17 et des Productions Ondinnok, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 9 avril.
Fondées en 1985, les Productions Ondinnok peuvent se prévaloir du statut de première compagnie de théâtre autochtone francophone. Depuis ses débuts, elle s’est notamment donné pour mission d’explorer les mythologies de plusieurs cultures autochtones de l’Amérique du Nord, et ses créations s’inscrivent dans un théâtre contemporain qui vise à rayonner dans les communautés et jusqu’à l’étranger. Elle travaille en collaboration avec le Théâtre de la Vieille 17, compagnie ancrée dans l’Ontario français, pour offrir à des enfants de 4 à 8 ans un spectacle qui sollicite les sens, l’imagination et l’intelligence.
Le rideau se lève au son du cri des outardes qui partent vers le Sud. Ce conte d’automne, nimbé d’ors et de cuivres grâce aux éclairages d’Emilio Sebastiao, déploie un volet des légendes autochtones pour aborder, à hauteur de jeune public, les thèmes du deuil, de la transmission et des identités.
Le texte, du directeur artistique d’Ondinook, Dave Jenniss, a ceci de particulier qu’il mêle sans complexe français et wolastoqey, et ce, sans que la compréhension en soit diminuée. Dans une structure assez classique, il met en scène une fillette, Delphine (Marie-Pier Chamberland), qui part en quête du tambour de son grand-père, son muhsums, récemment décédé dans un monde onirique où elle rencontre des animaux amis et se voit obligée de confronter ses peurs. Elle y gagnera en sagesse et en puissance.
L’originalité de l’œuvre réside dans sa combinaison d’éléments culturels et linguistiques autochtones avec un contexte familier pour un jeune public allochtone, depuis les tas de feuilles mortes jusqu’à la balançoire invitante en passant par les exhortations répétées du père (Christian Pilon) à venir souper : « Delphine, à table! ».
Voix et chants des créatures
La mise en scène de Milena Buziak, d’une grande efficacité, permet des changements de décor et de costumes tout en souplesse et optimise l’utilisation de l’espace scénique par les personnages. D’une élégante simplicité, l’installation des musiciennes dans le cocon semi-circulaire qui figure également l’habitation du grand-père de Delphine met en valeur la performance musicale tout en l’intégrant parfaitement à l’action.
C’est justement le jeu des musiciennes qui, avec les costumes, cristallise la poésie de la pièce. On notera la performance musicale et la présence scénique inspirées d’Emily Marie Séguin en chouette-cantatrice exaltée. Que la diva de la forêt chante sa fierté dans un ramage de contralto, qu’elle conte sa peur dans un glapissement suraigu, qu’elle frissonne, transie, derrière son masque de plumes, on voit réellement un oiseau affairé apparaître sur scène. Et quand le maléfique Kiwahq (Geneviève d’Ortun), toutes griffes dehors, envoie son souffle de glace pour geler la volonté et le cœur de Delphine, c’est le public tout entier qui tremble d’effroi sous les assauts polaires de son saxophone blond.
La façon de souligner et de soutenir par la musique les personnages et leurs caractéristiques narratives n’est pas sans rappeler Pierre et le Loup de Sergueï Prokofiev. Tout comme dans ce dernier, Toqaq montre aussi une enfant qui triomphe de la Bête avec l’aide de tout un bestiaire après s’être émancipée de l’autorité parentale. Par contraste, toutefois, ce sont bien des mots qui sont prononcés ici par toutes les créatures de la forêt, aussi bien le vent et l’arbre que le porc-épic et la chouette.
Ces mots, qui ne peuvent exister sans le tambour qui bat, ce sont eux que la fillette cherche à sauver. La force de Delphine est façonnée par l’esprit du caribou qui l’habite et le souvenir de son grand-père qui l’inspire et la protège. Mais en se battant contre le Kiwahq – la Mort qui fige les histoires et efface les souvenirs – la fillette se bat pour la transmission et la survivance de la langue, de l’identité et des récits. Sa victoire sera celle de tou·tes les enfants confronté·es un jour ou l’autre à la nécessité de grandir, avec humour, poésie et une touche de magie.
Toqaq Mecimi Puwiht / Delphine rêve toujours
Texte : Dave Jenniss. Mise en scène : Milena Buziak. Scénographie et éclairage : Emilio Sebastiao. Environnement sonore : Marie-Hélène Massy Émond. Composition musicale : Marie-Hélène Massy Émond, Geneviève D’Ortun et Emily Marie Séguin. Interprétation musicale : Emily Marie Séguin et Geneviève D’Ortun. Costumes : Samantha McCue. Régie : Alexie Madore Charron. Direction de production : Pascale Lemay et Jean Blanchet. Direction artistique : Dave Jenniss et Geneviève Pineault. Illustration : Catherine Boivin. Avec Marie-Pier Chamberland, Geneviève D’Ortun, Christian Pilon et Emily Marie Séguin. Une coproduction du Théâtre de la Vieille 17 et des Productions Ondinnok, présentée à la Maison Théâtre jusqu’au 9 avril.