Un Domingo : Décadence en mode clownesque
Quel objet artistique insolite que cette production venue d’Argentine ! Convoquant le théâtre, la danse, le cirque, mais surtout l’art clownesque, Un Domingo a certainement le mérite, malgré quelques faiblesses, de sortir de la norme circassienne en ne proposant ni prouesses époustouflantes ni beauté onirique.
Dans une salle à manger fleurant la vieille bourgeoisie, une famille, si désœuvrée que le conflit apparaît comme un exutoire satisfaisant à l’ennui, reçoit l’amoureux – issu d’une autre classe sociale – de la fille du maître des lieux (d’ailleurs fustigé pour la domination toute patriarcale qu’il exerce sans vergogne). S’ensuit une série d’échanges bouffons, ponctués de quelques acrobaties au sol et de deux numéros de suspension capillaire.
Or, ces prestations s’inscrivent toutes harmonieusement dans la trame dramaturgique du spectacle. À commencer par le tout premier tableau, où l’hôtesse tente de servir du thé à son galant tout en s’envolant gracieusement – portée par le souffle de l’amour ? –, accrochée à une sangle par sa chevelure. On peut en dire autant du duel loufoque au fleuret entre le prétendant et le père de la jeune femme. Quelques bribes de textes, çà et là, viennent même ponctuer l’action, traduites en surtitres dans un registre vernaculaire et livrées avec conviction par les interprètes. On déplorera, par contre, les nombreuses imperfections des phrases ainsi affichées (mots manquants, etc.).
L’œuvre est aussi grevée de quelques temps morts, d’une certaine redondance dans le contenu circassien et d’une courbe narrative floue. On ne peut néanmoins que saluer l’originalité décoiffante de la proposition.
Mise en scène : Laurent Bergal. Costumes : Celina Santana. Éclairages : Ricardo Sica. Avec Juan Carlos Fernandez Alvez, Sofia Galliano, Gabriela Parigi, Tomas Sokolowicz, Florencia Valeri et Tato Villanueva. Une coproduction de Proyecto Migra et Galpón de Guevara, présentée à l’occasion de Montréal complètement cirque au Théâtre Outremont du 7 au 16 juillet 2023.
Brave Space : Sororité circassienne
Dans des tenues blanches toutes différentes, mais assorties, les six artistes de la compagnie américaine Aloft, telles des amazones contemporaines, proposent une démonstration de sororité ou plus généralement d’entraide, en s’appuyant, certes les unes sur les autres pour réaliser leurs prouesses, mais en impliquant aussi le public dans la représentation. Il sera d’emblée invité à donner forme à une tente, où auront lieu les performances, et à y pénétrer.
On saura d’ailleurs éviter de se retrouver au dernier rang, sous peine de voir éventuellement ses vertèbres cervicales compressées par la tension extrême de la toile. Les manipulations fastidieuses de cet abri et les nombreux déplacements du public pourraient certainement être considérés comme de fâcheuses diversions faisant de l’ombre aux diverses prestations.
Il reste que Brave Space comporte des images fortes, illustrant de façon éloquente la puissance de la solidarité, notamment féminine. C’est le cas du numéro où une fildefériste marche sur une poutre que ses consœurs portent sur leurs épaules et ensuite à bout de bras. Le même principe inspire une chorégraphie sur un mât chinois, qui n’a d’autre ancrage que le support des artistes de la troupe. La charge symbolique de ce numéro se trouve encore accrue lorsque des spectateurs et spectatrices sont invité·es à rejoindre, puis à remplacer les circassiennes qui tenaient la tige métallique. La communauté se renouvelle, mais ne perd pas sa faculté de soutenir ses membres. Très beau.
Si quelques démonstrations, comme la bien fade séance de jonglerie avec des anneaux, laissent davantage perplexe – pour peu qu’on puisse les voir puisque le public est, pour un temps, aggloméré, debout, autour de l’aire de jeu –, d’autres s’avèrent jolies, mais sans grande surprise. C’est le cas de certains enchaînements aériens, tandis que ceux qui les précèdent ou qui les suivent contribuent à la prégnance de cette ode à la sororité. En outre, le tout se déroule dans une ambiance paisible et intime. Dommage que les facéties formelles entravent par moments la pleine appréciation du contenu du spectacle.
Direction artistique : Shayna Swanson. Scénographie : Angela Eve. Costumes : Zoe Sheppard et Shayna Swanson. Éclairages : Alex Avery. Montage sonore : Rachel Karabenick. Avec Zoe Sheppard, Hayley Larson, Linnea Ridolfi, Rachel Nesnevich, Heather Dart et Sarah Tapper. Une production d’Aloft présentée, à l’occasion de Montréal complètement cirque, au chapiteau L’Escapade de la TOHU du 8 au 16 juillet 2023.
Un Domingo : Décadence en mode clownesque
Quel objet artistique insolite que cette production venue d’Argentine ! Convoquant le théâtre, la danse, le cirque, mais surtout l’art clownesque, Un Domingo a certainement le mérite, malgré quelques faiblesses, de sortir de la norme circassienne en ne proposant ni prouesses époustouflantes ni beauté onirique.
Dans une salle à manger fleurant la vieille bourgeoisie, une famille, si désœuvrée que le conflit apparaît comme un exutoire satisfaisant à l’ennui, reçoit l’amoureux – issu d’une autre classe sociale – de la fille du maître des lieux (d’ailleurs fustigé pour la domination toute patriarcale qu’il exerce sans vergogne). S’ensuit une série d’échanges bouffons, ponctués de quelques acrobaties au sol et de deux numéros de suspension capillaire.
Or, ces prestations s’inscrivent toutes harmonieusement dans la trame dramaturgique du spectacle. À commencer par le tout premier tableau, où l’hôtesse tente de servir du thé à son galant tout en s’envolant gracieusement – portée par le souffle de l’amour ? –, accrochée à une sangle par sa chevelure. On peut en dire autant du duel loufoque au fleuret entre le prétendant et le père de la jeune femme. Quelques bribes de textes, çà et là, viennent même ponctuer l’action, traduites en surtitres dans un registre vernaculaire et livrées avec conviction par les interprètes. On déplorera, par contre, les nombreuses imperfections des phrases ainsi affichées (mots manquants, etc.).
L’œuvre est aussi grevée de quelques temps morts, d’une certaine redondance dans le contenu circassien et d’une courbe narrative floue. On ne peut néanmoins que saluer l’originalité décoiffante de la proposition.
Un Domingo
Mise en scène : Laurent Bergal. Costumes : Celina Santana. Éclairages : Ricardo Sica. Avec Juan Carlos Fernandez Alvez, Sofia Galliano, Gabriela Parigi, Tomas Sokolowicz, Florencia Valeri et Tato Villanueva. Une coproduction de Proyecto Migra et Galpón de Guevara, présentée à l’occasion de Montréal complètement cirque au Théâtre Outremont du 7 au 16 juillet 2023.
Brave Space : Sororité circassienne
Dans des tenues blanches toutes différentes, mais assorties, les six artistes de la compagnie américaine Aloft, telles des amazones contemporaines, proposent une démonstration de sororité ou plus généralement d’entraide, en s’appuyant, certes les unes sur les autres pour réaliser leurs prouesses, mais en impliquant aussi le public dans la représentation. Il sera d’emblée invité à donner forme à une tente, où auront lieu les performances, et à y pénétrer.
On saura d’ailleurs éviter de se retrouver au dernier rang, sous peine de voir éventuellement ses vertèbres cervicales compressées par la tension extrême de la toile. Les manipulations fastidieuses de cet abri et les nombreux déplacements du public pourraient certainement être considérés comme de fâcheuses diversions faisant de l’ombre aux diverses prestations.
Il reste que Brave Space comporte des images fortes, illustrant de façon éloquente la puissance de la solidarité, notamment féminine. C’est le cas du numéro où une fildefériste marche sur une poutre que ses consœurs portent sur leurs épaules et ensuite à bout de bras. Le même principe inspire une chorégraphie sur un mât chinois, qui n’a d’autre ancrage que le support des artistes de la troupe. La charge symbolique de ce numéro se trouve encore accrue lorsque des spectateurs et spectatrices sont invité·es à rejoindre, puis à remplacer les circassiennes qui tenaient la tige métallique. La communauté se renouvelle, mais ne perd pas sa faculté de soutenir ses membres. Très beau.
Si quelques démonstrations, comme la bien fade séance de jonglerie avec des anneaux, laissent davantage perplexe – pour peu qu’on puisse les voir puisque le public est, pour un temps, aggloméré, debout, autour de l’aire de jeu –, d’autres s’avèrent jolies, mais sans grande surprise. C’est le cas de certains enchaînements aériens, tandis que ceux qui les précèdent ou qui les suivent contribuent à la prégnance de cette ode à la sororité. En outre, le tout se déroule dans une ambiance paisible et intime. Dommage que les facéties formelles entravent par moments la pleine appréciation du contenu du spectacle.
Brave Space
Direction artistique : Shayna Swanson. Scénographie : Angela Eve. Costumes : Zoe Sheppard et Shayna Swanson. Éclairages : Alex Avery. Montage sonore : Rachel Karabenick. Avec Zoe Sheppard, Hayley Larson, Linnea Ridolfi, Rachel Nesnevich, Heather Dart et Sarah Tapper. Une production d’Aloft présentée, à l’occasion de Montréal complètement cirque, au chapiteau L’Escapade de la TOHU du 8 au 16 juillet 2023.