La cuvée 2013 des Contes urbains ne risque pas d’être banale! En effet, cette année, six jeunes auteurs ont pris possession de la tribune. Gageons que Martin Bellemare, Sébastien David, Rébecca Déraspe, Annick Lefebvre, Julie-Anne Ranger-Beauregard et Olivier Sylvestre sauront insuffler une énergie toute nouvelle à cette tradition du temps des Fêtes.
Les auteurs des Contes urbains 2013 ont accepté de répondre à mes questions. Consacré à Annick Lefebvre, ce billet est le quatrième d’une série de 6.
Annick Lefebvre
Diplômée de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM en 2003, on lui doit Artères parallèles, une pièce mise en scène en 2010, dans la salle intime du Théâtre Prospero, par Maude Gareau, et Ce samedi il pleuvait, un texte qui a reçu une mention spéciale du jury du Prix Gratien-Gélinas et que Marc Beaupré a mis en scène en 2013 Aux Écuries. En 2012, Annick Lefebvre a fondé Le Crachoir, une plateforme de production «qui interroge le rôle de l’auteur au sein du processus de création et de représentation d’une œuvre». Ce samedi il pleuvait est publié chez Dramaturges.
Quel est votre plus beau souvenir du temps des Fêtes?
Mon plus beau souvenir c’est un souvenir de maintenant. Avec mon petit frère, qui a 26 ans, on menace toujours nos parents, quand on a bu beaucoup trop d’alcool, le 24 décembre au soir, d’aller sauter dans leur lit à 6h le lendemain matin. De les réveiller pour déballer nos cadeaux de bonne heure. Et le 25, aux aurores, même complètement scrap et en lendemain de brosse, ben on le fait! On leur saute dessus pour les réveiller, on met de la musique de Noël super forte, on exige que mon père fasse un feu de foyer dans le sous-sol, on allume toutes les décorations de la maison, on se garroche en pyjama en dessous du sapin, on shake les boîtes pis nos cœurs palpitent comme quand on avait 8 ans!
Quel est votre pire souvenir du temps des Fêtes?
Quand une famille s’entre-déchire toute l’année pis qu’elle fake de s’aimer à Noël… Mal de cœur (et banlieue).
Est-ce que votre texte respecte ou bafoue la tradition du conte urbain?
Mon texte respecte le conte urbain en ce sens qu’il se déroule à Montréal, le 31 décembre 2013. Il y a un décompte du Nouvel An et une narratrice qui nous décrit le réveillon. Mais mon texte bafoue surtout et volontairement le conte urbain en ce sens que je suis une «petite crisse» qui, comme auteure, se plaît à détourner l’ordre des choses. Sinon, l’exercice m’emmerde. Plus encore, je le trouve vain.
Est-ce que les gens qui connaissent bien votre écriture seront surpris de la direction que prend votre conte?
Je ne pense pas surprendre le public qui me connaît. C’est un texte assez fidèle à mon style. Un monologue avec des phrases longues, bourrées d’incises. Un texte qui verse dans le sociopolitique, avec quelques crochets de droite à la face du public. Une partition complexe, de l’émotion qui surgit inopinément… et Marie-Ève Milot sur la scène… Bref, du Annick Lefebvre!
Est-ce que votre conte a quelque chose de typiquement québécois?
J’ose croire que 90% des références de ce conte sont québécoises. J’ose espérer que ce conte s’adresse directement au «nous» collectif québécois de 2013. Mais aussi au «nous» intime de chacun. Je veux que l’âme, que le souffle, et que l’esprit de ce texte soit tatoué «Québec 2013».
Avez-vous été influencé par une quelconque actualité?
Un conte urbain, c’est l’occasion d’être radicalement collé sur l’actualité. Je n’allais pas me priver de cette opportunité. Après, va savoir ce qui, de l’actualité, a bien pu m’inspirer des phrases de dix lignes, hein! Un indice: je trouve qu’il y a des trous de culs qui sont bien trop trous de culs pour qu’on les nomme dans une œuvre artistique. Fais que je ne parlerai pas de Coderre, calvaire!
De quoi fallait-il absolument (ou absolument pas) que vous parliez dans ce conte?
Il ne fallait pas parler du maire de Toronto. Il ne fallait pas parler des successions des compagnies à créateurs. Et il ne fallait pas parler de Saint-Bruno-de-Montarville, parce que je l’ai déjà fait!
Qui est le personnage qui s’adresse à nous dans votre conte?
Je ne te le dis pas… mais je te dis que mon personnage «regarde sa génération dans le cœur pis pas d’ins yeux».
Que six jeunes auteurs dramatiques d’une même génération investissent les Contes urbains, quel sens ça a pour vous?
Quand j’ai approché Yvan Bienvenue pour qu’on prenne possession des Contes, je lui ai dit: «On est 6 et tu dois nous prendre les 6! On arrive en gang et c’est très important que ça se fasse comme ça. Tu ne peux pas me dire que tu vas me prendre ou prendre 2 ou 5 d’entre nous, je n’accepterai pas.» C’est certain que je pourrais aussi te dire que j’aime le symbole que ça renvoie: «une gang de jeunes qui prend d’assaut un événement qui existe depuis 20 ans». En ce sens, comme prochaine mission, je pourrais me donner comme défi: «une gang de jeunes prennent d’assaut la direction artistique d’une institution montréalaise qui a la même directrice depuis 20 ans»…
Contes urbains 2013
Textes: Martin Bellemare, Sébastien David, Rébecca Déraspe, Annick Lefebvre, Julie-Anne Ranger-Beauregard et Olivier Sylvestre. Mise en contes: Stéphane Jacques. Musique: Viviane Audet et Robin-Joël Cool. Scénographie: Elen Ewing. Éclairages: Alexandre Pilon-Guay. Avec Mathieu Gosselin, Rachel Graton, Hubert Lemire, Marie-Ève Milot, Hubert Proulx et Catherine Trudeau. Une production du Théâtre Urbi et Orbi. À La Licorne du 3 au 21 décembre 2013.
La cuvée 2013 des Contes urbains ne risque pas d’être banale! En effet, cette année, six jeunes auteurs ont pris possession de la tribune. Gageons que Martin Bellemare, Sébastien David, Rébecca Déraspe, Annick Lefebvre, Julie-Anne Ranger-Beauregard et Olivier Sylvestre sauront insuffler une énergie toute nouvelle à cette tradition du temps des Fêtes.
Les auteurs des Contes urbains 2013 ont accepté de répondre à mes questions. Consacré à Annick Lefebvre, ce billet est le quatrième d’une série de 6.
Annick Lefebvre
Diplômée de l’École supérieure de théâtre de l’UQAM en 2003, on lui doit Artères parallèles, une pièce mise en scène en 2010, dans la salle intime du Théâtre Prospero, par Maude Gareau, et Ce samedi il pleuvait, un texte qui a reçu une mention spéciale du jury du Prix Gratien-Gélinas et que Marc Beaupré a mis en scène en 2013 Aux Écuries. En 2012, Annick Lefebvre a fondé Le Crachoir, une plateforme de production «qui interroge le rôle de l’auteur au sein du processus de création et de représentation d’une œuvre». Ce samedi il pleuvait est publié chez Dramaturges.
Quel est votre plus beau souvenir du temps des Fêtes?
Mon plus beau souvenir c’est un souvenir de maintenant. Avec mon petit frère, qui a 26 ans, on menace toujours nos parents, quand on a bu beaucoup trop d’alcool, le 24 décembre au soir, d’aller sauter dans leur lit à 6h le lendemain matin. De les réveiller pour déballer nos cadeaux de bonne heure. Et le 25, aux aurores, même complètement scrap et en lendemain de brosse, ben on le fait! On leur saute dessus pour les réveiller, on met de la musique de Noël super forte, on exige que mon père fasse un feu de foyer dans le sous-sol, on allume toutes les décorations de la maison, on se garroche en pyjama en dessous du sapin, on shake les boîtes pis nos cœurs palpitent comme quand on avait 8 ans!
Quel est votre pire souvenir du temps des Fêtes?
Quand une famille s’entre-déchire toute l’année pis qu’elle fake de s’aimer à Noël… Mal de cœur (et banlieue).
Est-ce que votre texte respecte ou bafoue la tradition du conte urbain?
Mon texte respecte le conte urbain en ce sens qu’il se déroule à Montréal, le 31 décembre 2013. Il y a un décompte du Nouvel An et une narratrice qui nous décrit le réveillon. Mais mon texte bafoue surtout et volontairement le conte urbain en ce sens que je suis une «petite crisse» qui, comme auteure, se plaît à détourner l’ordre des choses. Sinon, l’exercice m’emmerde. Plus encore, je le trouve vain.
Est-ce que les gens qui connaissent bien votre écriture seront surpris de la direction que prend votre conte?
Je ne pense pas surprendre le public qui me connaît. C’est un texte assez fidèle à mon style. Un monologue avec des phrases longues, bourrées d’incises. Un texte qui verse dans le sociopolitique, avec quelques crochets de droite à la face du public. Une partition complexe, de l’émotion qui surgit inopinément… et Marie-Ève Milot sur la scène… Bref, du Annick Lefebvre!
Est-ce que votre conte a quelque chose de typiquement québécois?
J’ose croire que 90% des références de ce conte sont québécoises. J’ose espérer que ce conte s’adresse directement au «nous» collectif québécois de 2013. Mais aussi au «nous» intime de chacun. Je veux que l’âme, que le souffle, et que l’esprit de ce texte soit tatoué «Québec 2013».
Avez-vous été influencé par une quelconque actualité?
Un conte urbain, c’est l’occasion d’être radicalement collé sur l’actualité. Je n’allais pas me priver de cette opportunité. Après, va savoir ce qui, de l’actualité, a bien pu m’inspirer des phrases de dix lignes, hein! Un indice: je trouve qu’il y a des trous de culs qui sont bien trop trous de culs pour qu’on les nomme dans une œuvre artistique. Fais que je ne parlerai pas de Coderre, calvaire!
De quoi fallait-il absolument (ou absolument pas) que vous parliez dans ce conte?
Il ne fallait pas parler du maire de Toronto. Il ne fallait pas parler des successions des compagnies à créateurs. Et il ne fallait pas parler de Saint-Bruno-de-Montarville, parce que je l’ai déjà fait!
Qui est le personnage qui s’adresse à nous dans votre conte?
Je ne te le dis pas… mais je te dis que mon personnage «regarde sa génération dans le cœur pis pas d’ins yeux».
Que six jeunes auteurs dramatiques d’une même génération investissent les Contes urbains, quel sens ça a pour vous?
Quand j’ai approché Yvan Bienvenue pour qu’on prenne possession des Contes, je lui ai dit: «On est 6 et tu dois nous prendre les 6! On arrive en gang et c’est très important que ça se fasse comme ça. Tu ne peux pas me dire que tu vas me prendre ou prendre 2 ou 5 d’entre nous, je n’accepterai pas.» C’est certain que je pourrais aussi te dire que j’aime le symbole que ça renvoie: «une gang de jeunes qui prend d’assaut un événement qui existe depuis 20 ans». En ce sens, comme prochaine mission, je pourrais me donner comme défi: «une gang de jeunes prennent d’assaut la direction artistique d’une institution montréalaise qui a la même directrice depuis 20 ans»…
Contes urbains 2013
Textes: Martin Bellemare, Sébastien David, Rébecca Déraspe, Annick Lefebvre, Julie-Anne Ranger-Beauregard et Olivier Sylvestre. Mise en contes: Stéphane Jacques. Musique: Viviane Audet et Robin-Joël Cool. Scénographie: Elen Ewing. Éclairages: Alexandre Pilon-Guay. Avec Mathieu Gosselin, Rachel Graton, Hubert Lemire, Marie-Ève Milot, Hubert Proulx et Catherine Trudeau. Une production du Théâtre Urbi et Orbi. À La Licorne du 3 au 21 décembre 2013.